11. Des pensées...

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Après notre dernier échange avec Huna, je pris congé des deux Infinis. Je devais à présent me concentrer sur ma mission.

J'aurais aimé avoir Golh comme soutient, mais je n'avais pas eu le courage de lui demander de préparer ma vengeance alors qu'il venait de trouver son âme sœur.

De plus, je n'avais pas non plus envie de rester plus longtemps en compagnie de la Folie. Sa présence me rendait nerveux, et c'est quelque chose dont je n'avais pas besoin en ce temps.

Je déambulais, seul donc, dans les rues, repensant à notre conversation avec Huna. Enfin... conversation est un bien grand mot pour décrire notre échange.

Mais ce qui m'intriguait le plus, c'était sa démonstration de magie, juste avant que Golh ne la calme. Je n'étais pas préparé à un tel déferlement de puissance. La pression qu'elle avait exercée sur mon corps dépassait, et de loin, la totalité des Infinis contre lesquels je m'étais battu.

Une autre chose qui m'avait effrayé sur le moment ; pour la première fois, mes pouvoirs m'avaient été inutiles. C'était uniquement grâce à eux que j'étais capable de vaincre chacun de mes ennemis sans réellement me forcer : ils n'avaient tout simplement pas le droit à un combat équitable.

Mais avec Huna, les choses avaient été différentes. Je savais qu'elle m'avait amené dans sa dimension à elle. Dans un lieu où elle seule était le maître. Et ça m'effrayait !

Et je n'arrivais pas à reprendre le contrôle, m'accrochant désespérément aux parois glissantes, tombant inéluctablement.

Je ne voulais plus jamais revivre cette expérience. Plus jamais.

Les allées, véritables dédales serpentant entre les différentes maisons et autre bâtiments, devenaient de plus en plus sombres à l'approche de la nuit.

Même si la plupart des habitants de la citée étaient des Infinis, les humains nous rejoignaient aussi. Les seuls qui obtenaient cette « chance » étaient ceux qui avaient été témoins d'événements surnaturels survenus sur Terre.

Car il nous était normalement interdit de nous révéler aux humains. Notre existence devait être la plus discrète possible.

Je continuai ma déambulation aveugle, évitant par moment des passants, qui étaient assez rares. Mon esprit rassemblait les informations et j'essayais de trouver un début de piste à mon enquête.

Mais je n'avais pas grand chose à me mettre sous la dent. Revenir à la scène de crime ne m'inspirait absolument pas.

Ma -brève- rencontre avec les chevaliers, en revanche, semblait être une source d'information plus profitable. Et j'avais besoin de me défouler. Ça me répugnait, mais cette envie insatiable de me battre, de frapper, semblait me ronger de plus en plus.

Mes pouvoirs avaient fait jaillir en moi cette soif de haine pour l'autre que je n'arrivais pas à exprimer autrement qu'en me donnant corps et âme à mon métier.

Ou bien étais-je déjà ainsi ? Je ne le saurais probablement jamais...

Je tendis mon bras à la verticale, et lâchai ma magie. Une lueur noire commença à apparaître dans le creux de ma main. Un fourmillement continu vint s'ajouter à la démangeaison implacable qui me prenait lorsque je laissais mes pouvoirs s'échapper. J'adorais voir ma magie. La forme matérielle que prenait cette force de l'esprit semblait être, à mon goût, une beauté à couper le souffle.

Tout en marchant, je passai mes doigts ainsi illuminés sur les murs des maisons, comme le ferait un enfant. C'était aussi quelque chose qui m'amusait, de voir les objets changer d'apparence à mon contact. Et reprendre leur forme originelle une fois terminé le défilement. Les quelques personnes qui m'avaient vu faire ce genre de démonstration préféraient changer de trottoir -certains même faisaient demi-tour- pour ne pas croiser le chemin du Temps.

Cela m'avait beaucoup dérangé au début, que personne ne voulait s'approcher de moi. Que tout le monde me craigne et s'éloigne de moi comme d'un pestiféré.

Mais maintenant, je n'y prêtais plus attention. Je ne le percevais plus comme une insulte, mais comme le respect de ma force. Je me demandais d'ailleurs qui j'espérais convaincre avec ce raisonnement.

Je marchais en direction du quartier Outrevent. Je le remarquais par l'architecture beaucoup plus ferme et tranchante, des maisons à colombages. L'ambiance était elle aussi différente. Des cris retentissaient depuis les tavernes alentours, et les soldats que je croisais me fixaient avec insistance, sans pour autant savoir qui j'étais.

Je n'avais pas l'envie de m'attarder dans le coin, mais une voix familière qui provenait des allées sombres m'attira.

« Mais si c'est pas Kronos que voilà ! Alors gamin, toujours à la recherche de sa virilité ? »

Un rire gras ponctua cette blague de mauvais goût.

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