Puissance

14. Descente aux enfers...

Le ton d'Aurore me mit sur mes gardes. Ma transformation en Infini ne m'avait pas seulement apporté de nouveaux pouvoirs, elle avait aussi amélioré mes sens. Et dans sa voix, je parvenais à déceler, en plus d'une surprise à peine masquée, la panique acide de ceux qui comprennent que leur vie se joue dans les prochaines minutes.

L'adrénaline se répandit dans mon système à la vitesse de l'éclair, irriguant mon cerveau. Je réfléchissais à toute allure.

Elle avait parlé à haute voix, prononçant mon nom sans hésitation, j'éliminais donc une présence indésirable.

Mais que pouvait-il y avoir en dessous qui justifie son appel ?

Je m'approchai de l'ouverture prudemment. Je sentis ma kryëlle fermement serrée entre mes doigts, sans me souvenir de l'avoir invoquée.

Je glissai un coup d'œil et Aurore me retourna un regard impatient. La peur qu'elle affichait semblait être envers moi.

Puis je sautai d'un bond à l'intérieur. L'espace était étréci, cet endroit ne servait que pour déposer des outils. Mon utilisation ne différait que très peu de celle des anciens propriétaires. Mes outils étaient simplement... différents.

Mais en cet instant, tout ce que je voyais n'était qu'un râtelier vide. Et sur le mur en face de moi, un message en rouge me narguait :

Et encore trop tard...

Un flash de lumière amena Mélanie dans mon esprit.

Quand le sens de ces mots parvint enfin à ma compréhension, j'entendis un cri de surprise. Craignant un danger, je me retournai. Aurore me dévisageait d'un air horrifié

C'est la première fois que je voyais ce regard dans ses yeux. Transformant son visage et le déformant de peur. Elle n'était pourtant pas du genre à fléchir...

C'est alors que je remarquai des formes sombres qui s'échappaient par la trappe d'accès. Des nuages noirâtres qui dépravaient le peu de couleur de la pièce.

« J-je sais que tu as perdu ton épouse... m-mais je t'en prie, Kronos, c-calme-toi »

Ma magie devenait incontrôlable. Je ne la sentais même pas s'échapper de moi, comme si je ne faisais plus barrière entre le monde extérieur et ma source intérieure.

Et Aurore, qui ne m'avait jamais vu comme ça, s'inquiétait pour sa sécurité – à juste titre.

« Je ne sais pas ce qui m'arrive » m'entendis-je prononcer, dans un état second.

Aurore ne savait pas comment réagir.

Toutes mes armes avaient disparu. Non pas que j'en avais vraiment besoin, mais elles étaient très utiles pour dissuader tous ceux qui ne me connaissaient pas de faire quelque chose de stupide.

« Viens, nous partons. »

Elle ne se le fit pas dire deux fois.

À l'instant, mes idées se firent plus précises. Je pensais ne pas avoir besoin de Gohl, mais finalement, il semblerait que ce soit inévitable. Il me fallait le plus de personnes possibles. Et s'il pouvait convaincre Huna de se joindre à moi, il ne manquerait plus qu'une dernière alliée à retrouver pour que nous fussions au complet.

Le trajet du retour me sembla beaucoup plus court. Dirigé par une volonté obstinée, je ne semblais plus préoccupé par ce qui m'entourait. Mon corps se déplaçait sans moi. Il savait où il allait et je pouvais réfléchir de mon côté à ce que j'allais faire.

Juste avant de retrouver Aurore, j'avais l'intention d'aller faire un petit tour à Outrevent. Il serait peut-être enfin temps de m'y rendre. Ils étaient la source de mes maux.

Mais avant, je devais persuader Gohl. Et quelque chose me disait que je n'étais pas au bout de mes peines. Depuis notre dernière rencontre, je comprenais qu'il avait besoin d'être aimé, d'être au calme. Loin de toute agitation, loin de moi. Pourtant, je ne pouvais détourner mes pas de me guider vers sa maison. J'avais besoin de lui. Honteux de l'admettre, je ne cessais de secouer la tête en pensant à la réponse qu'il pourrait me donner. Accepterait-il de combattre de nouveau à mes côtés ? Ou bien voulait-il vivre de son côté ? Je ne l'en blâmerais pas.