Huit

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Mr Cooper se poste face à moi et me fixe sans rien dire. Je ne sais plus quoi faire, ni où me mettre. Je sens mon coeur s'affoler plus encore et je ne sais pas comment faire pour le calmer. Ce silence est insupportable, si bien que je me racle la gorge.

— Je... euh... Je crois que je commence à avancer.

Ma voix tire vers les aigus, pas loin de ressembler à celle d'une petite souris apeurée. Ce que je suis, sans aucun doute. Je suis effrayée et perdue. Je ne comprends pas pourquoi Mr Cooper agit comme cela et pourquoi je suis si friande de ces moments. Serait-ce un jeu ?

— Vraiment ? Tant mieux. Moi, je me trouve dans une impasse et je ne sais pas vraiment comment passer outre.

Il croise ses bras musclés, faisant tendre sa chemise noire. Curieuse, je m'empresse de m'engouffrer dans l'ouverture qui est clairement mise à ma disposition.

— Quelle impasse ?

Mr Cooper s'autorise un sourire et s'avance lentement vers moi.

— Mon personnage principal est intéressé par une femme. Une fille plus jeune que lui, sur laquelle il a l'ascendant au niveau professionnel.

— Ce n'est pas très éthique, je rétorque plus rapidement que je ne l'aurais voulu.

Le souffle me manque, car j'ai bien peur de comprendre le sous-entendu. Ce jeu auquel il joue me rend dingue et je ne sais pas où se trouve sa limite. Peut-être se moque-t-il de moi, afin de savoir si je suis sous son charme également, comme la grande majorité de cette fac. Ou tout simplement, je me fais des films encore une fois. Son problème est vraiment d'ordre créatif...

— Oui, mais c'est ça qui le motive. Et plus il tente de s'interdire de ressentir ce genre de choses, plus ça le rend dingue.

Il se stoppe juste à quelques centimètres de moi. Mon souffle se coupe dans ma gorge et je n'ose faire le moindre mouvement. Le charisme qu'il dégage est tel que je ne peux y résister.

— Alors, Emily. Selon toi, que doit-il faire pour que cette femme comprenne qu'elle l'intéresse ?

Ses pupilles attrapent les miennes, la lumière du bleu contre les ténèbres du marron. Il semble réellement attendre une réponse de ma part et je ne sais pas si je suis capable de jouer à ce jeu. Vais-je passer le cap ? Vais-je lui tendre la perche qu'il semble visiblement attendre ? Son regard scrute mon visage, tentant sûrement de déchiffrer mon expression.

— Je...

J'avale ma salive, tandis que son regard se fait plus vorace. Quelque chose brille au fond de ses pupilles claires.

— Je pense qu'il devrait le lui dire. L'honnêteté est ce qu'il y a de plus appréciable chez un homme.

Mr Cooper penche la tête sur le côté. Il se rapproche ensuite, m'obligeant à reculer, sauf que contre le bureau, je ne peux aller bien loin. Il positionne ses deux mains autour de moi sur la table, me faisant prisonnière.

— C'est donc ça que tu voudrais ? Tu veux que je sois honnête avec toi ?

— Que voulez-vous dire par là ? Je ne suis pas sûre de comprendre...

Ma tentative est vaine, car il me lance un regard entendu.

— Emily, dois-je vraiment te dire à voix haute que tu me rends fou ? Que je te désire ?

Un hoquet de surprise s'échappe de ma bouche, ce qui le fait rire. Il approche encore plus son visage et je n'ai plus que lui dans tout mon champ de vision. Le monde entier a disparu, nous sommes seuls au monde, à présent.

— Mr Cooper...

Son regard lubrique annihile mes vaines défenses, si bien que je ne bouge pas lorsqu'il se rapproche et scelle nos lèvres entre elles. Une explosion retentit dans mon ventre. Mon professeur se colle contre moi, mon corps épouse parfaitement ses formes, comme s'il avait été créé pour lui. Ses grandes mains quittent la table et remontent le long de mes bras, me faisant frissonner. L'une d'entre elles se pose sur ma hanche, tandis que l'autre trouve sa place sur ma nuque pour accentuer la pression.

On m'a déjà embrassé auparavant, mais pas comme ça. Pas aussi sensuellement, pas avec cette langue qui tente de forcer le barrage de mes dents. Je laisse libre accès à ma bouche et sa langue vient caresser la mienne avec une telle maîtrise que je suis obligée de me laisser guider. Le ballet sensuel continue pendant encore quelques secondes avant qu'il ne mette fin au baiser. Il se recule, me laissant rouge et les lèvres gonflées et luisantes de sa précédente torture.

Mr Cooper m'observe, tente de jauger ma réaction. Les phéromones disparaissent un peu et je me rends compte de ce que nous venons de faire, de ce que je viens de le laisser faire. Complètement mortifiée, je pose mes doigts sur mes lèvres, les yeux grands ouverts. Les mots me manquent et je n'arrive pas à me décider sur ce que je dois dire.

— Merde, je souffle.

Mon professeur s'autorise un sourire avant de dégager une mèche de mes cheveux derrière mon oreille. Complètement abasourdie, je me laisse faire, mais la sorte de transe dans laquelle je me trouvais semble se dissiper. Qu'ai-je fait ?

— Mr Cooper, on a fait une grosse bêtise...

— Tu crois ? Rétorque-t-il en penchant la tête sur le côté. Une bêtise, c'est quelque chose de mal, non ? Et là, t'embrasser, c'est quelque chose que je considère comme bien.

Je passe une main sur mon visage, totalement mortifiée. C'est la giga merde. J'ai embrassé mon professeur. Un homme de plus de dix ans mon aîné. Je suis gérontophile, Doux Jésus !

— Mais, vous êtes mon professeur !

Mon haussement de ton ne semble pas lui plaire, car il fronce les sourcils. Il croise à nouveau ses bras, le rendant vraiment impressionnant.

— Et alors ? Tu es majeure à ce que je sache.

Il n'a pas tort, mais je n'arrive pas à m'enlever de la tête que c'est mal, que c'est interdit. C'est même illégal. Si quelqu'un l'apprenait... Je brise le contact visuel, me retourne et attrape mon sac de cours.

— Où vas-tu ?

Je lui fais face et je sens mon corps flancher. Je brûle d'être à nouveau dans ses bras, mais il ne faut pas.

— Je rentre chez moi. Je suis désolée, c'était une erreur.

Son visage se décompose et il lève les mains devant lui, comme pour me retenir.


— Non, c'est moi qui suis désolé. Je n'aurais pas dû faire ça. Je n'ai pas pensé que ça pourrait te mettre autant dans l'embarras. Vraiment, excuse-moi, ça n'arrivera plus. Je saurais me contrôler.

Mon coeur fait un bond dans ma poitrine et je m'en veux de ressentir ce genre de choses. Pourquoi est-ce qu'une pointe déçue s'installe dans ma poitrine ? Pourquoi est-ce que je regrette mes paroles ?

— Emily...

Je lève les yeux vers lui et un long frisson parcourt mon dos. J'aimerais sentir à nouveau ses mains sur mon corps, ses lèvres sur les miennes. Cet homme est un appel à la luxure et le voir presque m'implorer de la sorte me rend dingue.

— Mr Cooper, à vendredi prochain.

Je quitte le charme de son regard, le contourne et sors de la salle. Une fois dehors, je n'ai qu'une envie, y retourner. Mais ma raison m'en empêche. Je reste quelques secondes devant la porte à hésiter, mais je me résous à rentrer chez moi. Après le dîner, je remarque que Mr Cooper m'a envoyé un mail dans lequel il s'excuse encore une fois et m'indique qu'il souhaite me parler. Je décide de ne pas répondre, car je ne suis pas prête à discuter de ce qui s'est passé plus tôt. Je reçois également un SMS de Taylor qui me rappelle que je lui dois un verre.

J'hésite quelques secondes avant de lui proposer de se voir demain soir, ce qui me donnera une bonne excuse si Zoey souhaite m'embarquer encore une fois dans l'une de ses fêtes. Le rendez-vous est fixé à 20 heures et le verre s'est transformé en dîner. Ma vie commence à ressembler à une histoire pour film, mais fidèle à moi-même, je m'acharne jusqu'à tard le soir à mes révisions.

Dangerous GameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant