Chapitre 23

616 41 0
                                    

Louis

J'ai finalement réussi à m'endormir juste avant l'aube, mais pas sans avoir versé toutes les larmes de mon corps. J'ai pleuré sur le jeune homme paumé que je suis devenu, celui qui a confié son cœur en miettes à un homme, et qui l'a perdu. J'ai pleuré sur le jeune garçon qui a déposé son bébé dans les bras d'une étrangère avant de lui dire adieu. J'ai pleuré sur l'ado que j'étais, le garçon qui a perdu quelque chose de précieux dans le lit d'un homme qui n'en était pas digne. Et qui n'avait pas demandé la permission.

Allongé, dans mon lit, seul, je me suis rappelé toutes ces fois où la solitude m'avait tant pesé.

« Vous leur direz que je veux qu'elle s'appelle Grace ? »

Sœur rose avait froncé les sourcils.

« Louis, nous en avons déjà parlé. Ils peuvent...
- Pouvez-vous simplement le leur dire ? »

Chaque semaine je reçois des photos avec un petit mot. 

Merci de nous avoir donné Grace, cette enfant est une vraie bénédiction

Est-ce que ce serait plus facile si je n'avais eu de l'enfant que j'ai mise au monde que ces quelques instants brefs mais précieux à l'hôpital ? Les choses seraient-elles plus faciles si je ne savais pas que ma fille a mes cheveux châtains et les fossettes de son père ?

Serait-il plus facile de dormir seul dans mon lit glacé si je n'avais pas connu la sensation que procure un homme qui tient vraiment à moi ?

Le seul endroit où j'ai envie d'être, c'est ici, roulé en boule sur le canapé de ma mère. En ce moment, je me fiche bien des petits napperons et des coussins brodés au point de croix. Je me fiche même de l'énorme crucifix doré qui pend au-dessus de ma tête.

J'ouvre les yeux en sentant un mouvement sur les coussins à côté de moi, je bats des paupières en voyant ma mère.

- Tiens, mon chéri, dit-elle en me tendant une tasse de thé fumant.
- Merci.
- Tes sœurs m'ont mise au courant pour la femme de Harry.

Je referme les yeux. Je ne peux pas la regarder en face. Pas tout de suite. Je prends une inspiration hésitante.

- Pardon.

Je secoue la tête.

- Pourtant, je t'assure que j'ai essayé de changer.
- Ce n'est pas de ta faute, mon chéri.

Je prends une nouvelle inspiration.

- Est-ce qu'il t'arrive de penser que papa avait peut-être raison en ce qui me concerne ?

Elle sursaute.

- Bien sûr que non, dit-elle en secouant la tête. Et je m'en veux de l'avoir laissé te traiter comme il l'a fait... après. Nous avons eu le cœur brisé en apprenant ce qui état arrivé à notre enfant, mais nous avons réagi d'une façon épouvantable. Et je t'en demande pardon.
- Ce n'était pas de ta faute.
- Je suis plus à blâmer que toi, Louis, dit-elle d'une voix plus douce. J'aurais tellement voulu pouvoir revenir en arrière pour réparer ce que nous t'avions fait. 

J'ai du mal à respirer tant mon cœur brisé comprime mes poumons.
Elle m'observe un long moment avant de hocher la tête et de se lever.

- Maman, attends.

Ma mère s'arrête net. Je ne l'ai pas appelée maman depuis la mort de mon père. Je ne l'ai jamais appelée par son prénom, non plus. Elle ne l'aurait pas permis. Je ne l'appelais pas du tout en fait. 

Unbreak me ( larry ) T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant