Chapitre 3

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Le proviseur était penché en arrière et tapotait un rythme insupportable avec ses doigts se la surface de son bureau. Je pariai qu'il faisait ça pour soutirer toutes les informations nécessaires pour ses enquêtes palpitantes dans l'enceinte de Gipsum Valley.
Mon regard se promena le long des murs où des traces de moisissures commençaient à grignoter la peinture. Puis sur le bureau acajou, et les cadres photos qui exposaient toute la famille de ce cher M. Serge. Parfois, je me disais que ce lieu était une mise en scène, pour faire paraître le proviseur moins sauvage et insensible.
Je le regardais dans les yeux, sachant qu'il ne pouvait pas me reprocher fortement quelque chose sous peine de perdre mon assistance envers les professeurs les moins habiles.

"Je vous répète que Nahéma Orton pense avoir été violée ! Est-ce que ça vous importe un minimum, ce niveau de gravité ?!"

Garry hoqueta et je l'entendis même grogner après.

"Mademoiselle Flamme, il va falloir que vous compreniez que la justice de Gipsum Valley se gère ici, dans mon bureau. Vous n'auriez pas dû frapper M. Deschamps ici présent. Plusieurs élèves le confirment et sont venus me voir pour témoigner sur votre acte déplacé.

- Je comprends, Monsieur, et je m'en excuse, mais je savais que le problème ne passerait pas en priorité. Ce qui encourage les idiots dans son genre à agir ainsi, c'est le peu de restrictions que vous leur donnez !"

Le proviseur soupira comme si j'étais incapable de comprendre ce qu'il voulait dire.

"Il va falloir que vous vous maîtrisiez. Vous auriez dû venir m'en parler. Vous serez collée. Mais si Mlle Orton a vraiment subi cette agression elle le me dira. Retournez en cours et allez envoyez-la moi."

Je lançai un regard haineux à Garry, qui me fuyait des yeux, et me levai en jetant mon sac sur mon épaule, bousculant la chaise en plastique qui grinça sur le parquais.
Au même moment, l'orage éclata. Le proviseur sursauta et me dévisagea.
Sur le point de partir, je fis une révérence exagérée, et partis vers la cour goudronnée. Je descendis à l'étage inférieur - Le bureau du proviseur donnait une vue sur la cour, en plongée.

La pluie commença à tomber. Elle joua de la musique sur le toit de l'établissement.
Les élèves en permanence libre allèrent s'abriter. Sauf une.
C'était Mel Sunah, une élève de première, comme moi.
Les gens la connaissaient comme ça : calme et neutre.
Ma meilleure amie, Sarah, était son amie d'enfance. Mais elle ne m'a jamais rien dévoilé sur elle, et je ne lui avais jamais posé de questions non plus.
Et de toute façon, je ne pouvais plus voir Sarah : suite à un accident, elle est devenue sourde et était dans un centre spécialisé pour l'apprentissage de la LDS.
En effet, ses deux tympans ont été troués après qu'un feu d'artifice ait détoné juste à côté d'elle, quelques mois auparavant, alors qu'elle se trouvait dans une voiture.
Je regardais d'un œil perdu la jeune fille qui, a quelques mètres de moi, restait sous la pluie en regardant calmement autour d'elle.
J'étais légèrement décontenancée devant quelque chose d'aussi étrange. La pluie commença à ruisseler sur mon front et je l'essuyai du revers de la main en secouant la tête. Puis, je la détaillai du regard : elle avait des yeux gris et des cheveux en cascade brun foncé, presque noirs. Elle était debout, les mains dans les poches de son jean, un TEE shirt à fleurs noires et blanches était partiellement caché par un sweat-shirt ouvert. Malgré son style vestimentaire, elle ressemblait plus à une richarde qui avait froid qu'une hipster dans mon genre.
Je soupirai lourdement lorsque dans mon dos j'entendis :

"Mademoiselle Flamme, retournez en cours !"

M. Serge venait de crier ces mots depuis la fenêtre de son bureau et je me retournai en levant la tête vers l'étage supérieur pour répliquer :

"Je ne sais même pas quels cours j'ai aujourd'hui ! Je regarde."

En plantant mon regard dans le sien, je pris mon sac qui se ballotait dans mon dos. Puis je feignis de regarder à l'intérieur et me retournai pour partie vers ma salle de cours.
Je sentis les regards brûlants de M. Serge et de Mel dans ma nuque, mais je ne tournai pas la tête.
Il fallait bien que quelqu'un interrompe le contact. Les échanges.

Charlie FlammeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant