6. Alaric

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- Continue, m'implore-t-elle en emprisonnant mes cheveux entre ses doigts.

Mon regard oscille entre sa bouche demandeuse et ses yeux humides. Qui dois-je écouter ?

La réponse, c'est Molly qui me la donne, en débarrassant le bas de mon corps de la dernière barrière vestimentaire entre nous.

-Une seule fois Alaric, une seule fois, répète-t-elle en cambrant un peu plus son corps sur moi.

Coupable ! Voilà la sentence que le juge de la morale pourra prononcer. Oui Maître, j'ai succombé à la tentation ! Oui, je me suis abreuvé de ce corps Messieurs les jurés, mais à ma décharge, ce n'est pas le vice qui m'y a poussé. Non Monsieur le juge, c'est l'amour qui a guidé mes actes, malgré les nombreux avertissements de ma raison. Avant de subir votre punition, je tiens à préciser qu'aucune sanction ne sera assez conséquente pour me faire regretter la parfaite fusion de nos deux âmes. J'aime Molly et pour elle, je suis prêt à renoncer à mon éthique. Pour lui appartenir, je suis capable d'endosser le rôle de l'amant caché.

Oui... Bafouer et piétiner ma droiture.

À bout de souffle, Molly emboîte ses membres aux miens, pose son oreille à l'endroit où bat mon cœur de minable et me répète l'introduction de notre échange physique.

-Juste une fois...

Je dessoude notre peau à peau, relève son menton de mon index, ancre mes yeux chargés d'inquiétudes dans les siens et l'interroge en silence.

-Je ne peux pas, dit-elle dans un souffle. Je n'ai pas le droit, rajoute-t-elle en baissant les yeux.

Machinalement, je caresse son corps repu de notre amour et me concentre sur chaque courbe qui glisse sous ma paume, afin de les graver dans ma mémoire. Elle va partir. Je vais la perdre, alors qu'elle n'a jamais été mienne.

-Je comprends, répond ma bouche sans que je ne lui en donne l'ordre.

Alaric Charmes, l'homme sage est de retour. Il a repris possession de mes entrailles et va à coup sûr prôner les mots justes, au détriment de sa propre douleur.

-Je vais mettre tes vêtements dans le sèche-linge.

Je m'exécute. Quitter la douceur de sa peau est un réel déchirement, mais autant m'y habituer tout de suite. Je suis en colère et pourtant je ne lui en veux pas. Je ressens sa lutte interne, entre l'attirance qu'elle éprouve à mon égard et le besoin de respecter son serment de mariage.

Je m'assieds sur le sol froid de la salle de bains et regarde danser les habits à travers le hublot. C'est idiot comme distraction, mais je suis intimement convaincu que si je retourne auprès de Molly, je ne saurais respecter sa volonté de ne faire l'amour qu'une seule et unique fois. Ma peau est encore empreinte de son odeur, du souvenir de son souffle chaud, de ses ongles plantés dans mes omoplates, de sa bouche...

Parti loin dans mes pensées orgasmiques, je ne vois pas l'objet de celles-ci pousser la porte de la pièce. Une masse roulée dans la couette, tel un cocon de ver à soie, prend place à mes côtés. La tête posée sur mon épaule, Molly observe également la valse des tissus.

-Est-ce que tu l'aimes ? Osé-je demander, sans pour autant quitter mon objectif des yeux.

-Oui, répond-elle timidement.

Son affirmation me poignarde. Le mal qu'elle m'occasionne actionne le levier colère dans ma boîte crânienne.

-Alors, qu'est-ce que tu fous là ? Pourquoi... Pourquoi t'offrir à moi si tu as encore des sentiments pour lui ? Que cherches-tu ? À quoi joues-tu ? Putain Molly ! Pourquoi me choisir moi pour t'amuser ?

Je crache des salves de questions sans lui laisser le temps de répondre à aucune d'elles, tant la rage fuse dans mes veines. Choquée par ma vive réaction, elle reste coite. Je souffre tellement que je préfère regagner le salon avant que mes mots dépassent ma pensée.

Quelques minutes plus tard, c'est une Molly couverte de ses vêtements encore humides, qui s'apprête à déserter mon appartement.

-Excuse-moi. Je suis con. Tu ne me dois aucune explication. Je ne veux pas te quitter comme ça...

La main sur la poignée de porte, elle hésite un instant, puis se tourne vers moi. Ses pupilles brillent, sa lèvre inférieure tremble, certainement pour contenir des pleurs. Elle reste ainsi, pas vraiment partie, mais pas plus dans mes bras. Poussé par mon besoin d'elle, je franchis les pas qui nous séparent, marque un temps d'arrêt à sa hauteur, cherche le feu vert dans ses yeux, intègre le battement rapide de ses cils comme tel et fonds sur sa bouche.

Je donne tout mon être dans ce baiser. Mon amour, mes peurs, mes envies, mes besoins, le bien, le mal, tout...

Molly doit percevoir la force des sentiments qui s'infiltre dans ce baiser d'adieu. Ses bras s'enroulent autour de ma nuque, ses doigts s'ancrent dans ma chevelure et ses lèvres répondent avec ferveur à ce dernier contacte.

-Pars vite, murmuré-je, mon front collé au sien.

Et c'est ainsi, que ma vie rangée d'architecte parisien, bascule dans la partie sombre de l'amour. Ce côté lugubre où règne l'interdit, la douleur, la jalousie, l'envie et surtout le manque. Pourtant, malgré la solitude que Molly laisse dans mon cœur, je signe pour cette vie tatouée de son empreinte.

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Bonjour ☺

Une seule fois ... Leur histoire va-t-elle se terminer ainsi ?

Gros bisous mes très chères lectrices ♥

Culpabilité (tous droits réservés) Terminé Où les histoires vivent. Découvrez maintenant