13. Molly

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J'arrive avec un quart d'heure de retard sur mon lieu de travail. Tous les yeux sont rivés sur moi, mais moi je n'ai d'yeux que pour ceux d'Alaric. Je lui souris et articule un bonjour pour qu'il le lise sur mes lèvres. Je vois l'étonnement sur son visage.

Oui très cher, aujourd'hui, j'offre un sourire dès le matin.

J'ai besoin que cette journée rayonne. Je dois puiser suffisamment de force dans mon entourage afin d'oser franchir un pas pour tenter de sortir John de ses tourments du passé. Je vais appeler cette infirmière psychologue qui s'est occupée de lui lors de l'accident de Rose.

Qui est Rose ?

Je pense qu'il est temps de vous révéler mon véritable visage, afin que vous saisissiez l'étendue des dégâts que mon égoïsme a causés jadis. Après ces confidences, vous allez me haïr, mais qu'importe, vous livrer les faits enfouis en moi depuis deux longues années ne peut qu'être libérateur. Maintenant, suivez-moi et faisons un bond de deux ans en arrière.

Flash-back

-Allô ! Molly ?

-Oui ma chérie !

-Mais... Il est une heure du mat' ! Pis t'es complètement bourrée là !

-Rose... Viens faire la fête avec moi, s'il te plaît, implore Molly en articulant difficilement.

-Tu fais chier ! J'ai une vie moi et je te rappelle que je suis maman, donc à cette heure-ci, je dors !

-Je sais, mais c'est pour arroser mon master, argumente-t-elle. Mes amies se couchent comme les poules et veulent déjà me quitter.

-Putain Molly ! Téléphone à un taxi et rentre te coucher. Tu as assez bu pour ce soir.

-Laisse tomber Rose, je trouverai bien un type qui sera ravi de me raccompagner chez moi, crache Molly sous l'effet néfaste des vapeurs d'alcool.

-Non, non et non ! Pas question que tu montes en voiture avec un inconnu. Tes copines peuvent attendre trois quarts d'heure ?J'arrive !

-Ouiiiiiii ! T'es ma belle-sœur d'amour !

Rose dépose un baiser sur le front de son mari. Elle se réjouit de ne pas l'avoir réveillé avec sa conversation téléphonique houleuse. Elle passe rapidement par la case salle de bains, embrasse tendrement son fils qui dort à poings fermés, enfile une veste, une paire de tennis et empoche les clés de la Mercedes.

Le périphérique parisien est fluide à cette heure-ci. Rose, préoccupée par sa belle-sœur, appuie un peu plus que d'ordinaire sur le champignon. Ses yeux ne croisent pas l'aiguille qui indique la vitesse sur son compteur, pas plus que ses rétroviseurs. Seulement des feux de croisement vont ramener son esprit sur le bitume. Son regard zigzag entre ses rétros.Son cœur tambourine quand elle se retrouve subitement prise en sandwich entre deux voitures folles. Les conducteurs de celles-ci effectuent des embardées, des coups de freins intempestifs, klaxonnent à tue-tête et finissent par faire paniquer Rose.

La mère de famille perd le contrôle de son véhicule, s'encastre dans celui qui la devance et se fait percuter par celui qui la suit.

***

Le réveil dans la maison de Rose est brutal. Un gendarme accompagné d'un élu local, annonce à son mari le décès de la jeune femme. Il est perdu, mais avant tout, incrédule. Il se précipite dans toutes les pièces de l'appartement, appelle en boucle sa femme, console son bébé de douze mois en lui assurant que sa maman va vite rentrer. Les messagers du malheur patientent quelques minutes avant d'envelopper de leurs bras, l'homme anéanti. Celui-ci, percé par un rayon de lucidité, hurle sa douleur contre le torse du gendarme.

-Ce n'est pas possible ! Elle dormait avec moi. Jamais Rose ne quittait la maison en pleine nuit, articule-t-il entre deux sanglots.

-Peut-être a-t-elle laissé un message, propose l'élu.

Les trois hommes retournent la maison à la recherche de cet hypothétique message, en vain.

-Avez-vous Monsieur, un membre de votre famille que l'on pourrait prévenir afin de vous soutenir dans cette épreuve ?

-Molly, lâche-t-il, hagard.

***

Molly arrive chez son frère, la bouche pâteuse, les yeux cernés de noir et le visage défiguré par la terrible nouvelle. Lui, se blottit dans les bras de sa cadette.

-C'est un cauchemar, verbalise-t-il en pleurant toutes les larmes de son corps. Mais où pouvait-elle bien aller en pleine nuit ? Je sais qu'elle m'aimait et jamais elle n'aurait pu... Non, jamais elle ne m'aurait fait ça !

Molly est pétrifiée a l'idée d'annoncer à son frère, la raison pour laquelle Rose a quitté la maison en pleine nuit. Un horrible sentiment de culpabilité se répand vitesse grand V dans ses veines. La vie de son frère et celle de son neveu sont détruites par son unique faute. Pourquoi n'a-t-elle pas appelé un taxi, plutôt que Rose. D'autant plus que pour finir, ne voyant pas sa belle-sœur arriver dans le bar de nuit, c'est en taxi qu'elle regagne sa demeure.

-Non, jamais Rose ne t'aurait trahie, murmure Molly tout en lui caressant les cheveux.

-Je l'aime comme un fou, sanglote-t-il. Je veux qu'elle rentre et quelque soit ce qu'elle me dira, je lui pardonnerai.

Molly peine à respirer. Étouffée par le dégoût d'elle-même, il faut qu'elle s'éloigne de cette souffrance.

-Je vais m'occuper du petit, souffle-t-elle.

Seule dans la cuisine, la poudre de lait dans une main et l'eau minérale dans l'autre, elle éclate en sanglots. Une question tourne alors sans discontinuer dans sa tête. Comment survivre avec ce si lourd secret ?

Molly s'enferme dans la chambre de son neveu, le serre contre elle et le berce tout en lui donnant son biberon.

- Tata sera toujours là pour toi, je te le jure, lui murmure-t-elle.

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Coucou ☺

Voilà :( A présent, vous connaissez le secret de Molly...

Difficile de s'autoriser à aimer et être aimée avec un tel poids sur la conscience.

Bisous ♥





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