Un quart d'heure à vagabonder dans la rue, avant d'enfin apercevoir un visage connu.
Laurie...
La jeune femme venait de se lever d'une table de la terrasse extérieure d'un café, cachée par un paravent, si bien que Silvain ne pouvait voir que son amie qui venait de se lever, et pas ceux avec qui elle venait de manger.
Elle ne l'avait pas vu. Elle rassemblait ses affaires pour partir – le moment idéal pour la déclaration – quand un homme – au vu de sa position, assis à sa table – la retint du bras tout en se levant, puis se pencha sur elle pour l'enlacer et l'embrasser.
Lau... rie...
Silvain sentit son cœur se déchirer, si bien qu'il laissa tomber la petite boite qu'il avait en main, qui percuta le sol en un bruit qui fit détourner le regard de « l'ami » de Laurie. La jeune femme, voyant que son interlocuteur fixait étrangement autre chose, regarda dans la même direction, pour perdre son sourire en apercevant Silvain, toujours incapable de bouger.
Également surprise, elle s'approcha de lui et demanda :
— Silvain, qu'est-ce que tu fais là ?
— C'est plutôt à toi que je devrais demander ça, répondit Silvain, reprenant le contrôle de son corps. Je... je croyais que tu étais avec des « amis » ? Et... je... je croyais que tu m'aimais...
— Qu'est-ce que tu lui veux ? demanda l'homme, bien plus grand et imposant que lui, en passant un bras autour de l'épaule de Laurie.
— Je...
— T'as pas compris ? continua-t-il. Elle veut plus de toi. Alors tu dégages.
De sa main libre, il repoussa le jeune homme, qui recula de quelques mètres, avant de ne plus bouger et de regarder Laurie partir en compagnie de cet inconnu.
Lorsqu'ils eurent disparu de son champs de vision, le jeune homme ne sut pas quoi faire. Il commença par essuyer d'un revers de manche ses yeux qui avaient décidé d'inonder ses joues, avant de s'avancer de quelques mètres et de se pencher pour ramasser la petite boite toujours fermée contenant la bague.
Il se dirigea ensuite vers une petite ruelle sombre et déserte, avant de s'asseoir contre un mur et d'éclater en sanglots.
Il ouvrit lentement la petite boite, et regarda la petite bague. La pierre en son centre émettait désormais un terne reflet blanchâtre. Normal, il était dans la pénombre. Mais son esprit fragilisé par sa rupture avec Laurie n'y vit qu'une affreuse représentation de sa vie. Autrefois chaleureuse, joyeuse, resplendissante, rayonnante, aujourd'hui terne et sombre. Il referma alors la petite boite. La bague valait tout de même d'être gardée en sécurité. La tête posée sur les avant-bras, eux-mêmes reposant sur les genoux, Silvain se laissa sombrer dans une période de sombres réflexions, mêlées de peur et de pleurs.
Lorsqu'il redressa enfin la tête, bien une demi-heure était passée, et le jeune homme était toujours dans la pénombre, qui était encore plus sombre, tandis que le Soleil abordait sa longue descente vers l'Ouest.
Il tourna rapidement la tête : il lui semblait avoir vu quelque chose bouger à sa gauche. Mais finalement... rien.
Quelque chose bougea devant lui. Il se leva rapidement et s'approcha pour voir ce que c'était. Il n'y avait rien. Rien du tout. Hallucinait-il ?
Il commençait à s'interroger sur sa santé mentale quand une vieille légende lui revint en mémoire.
— La légende raconte, murmura-t-il à voix basse, que les Ombres enlevaient tous ceux qui osaient rester plus d'une dizaine de minutes dans la pénombre des ruelles désertes...
Son corps tressaillit, et une sueur froide descendit le long de son dos. Et si des Ombres venaient l'enlever ? On raconte également que la densification des villes a fait fuir ces êtres de mort et de désespoir, mais qu'ils ne sont pas morts pour autant.
À quoi s'identifient les Ombres ? À... une ombre, comme leur nom l'indique si bien. En réalité, c'est une forme sombre et immatérielle qui adopte le plus souvent une forme d'animal, mais peut en changer.
Silvain savait tout ça, ce qui ne faisait qu'augmenter sa peur et sa vigilance. Chaque bruit, chaque chose bougeant dans un coin de sa vision attirait son attention et sa peur.
Il n'y avait qu'un point positif à tout cette affaire : il ne ressentait plus la tristesse. Il ne pouvait plus y penser, obnubilé par la présence du danger que représentaient les démons légendaires.
— Il y a... quelqu'un ? demanda-t-il, sur un ton qui trahissait sa peur.
Silvain se retourna. Derrière lui s'avançait un gigantesque cheval noir. Un cheval ? Non. Une Ombre en forme de cheval. Le cheval était plus sombre que la pénombre, mais il semblait n'être fait que d'air...
Bientôt, une dizaine d'autres animaux similaires ; léopards, oiseaux, gazelles, ours, renards ; l'entouraient, l'encerclaient. Il ne pouvait pas partir. Car il paraît que le contact avec un seul de ces êtres est mortel.
— Non, supplia-t-il, ne me faites rien... Pas pitié...
Mais il n'eut pas son mot à dire. Les Ombres se jetèrent sur lui, et il sombra dans un profond sommeil.
Oui, c'est ça. Un profond sommeil...
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Au Delà Des Ombres
ParanormalneLa légende raconte que les Ombres, créatures immatérielles représentant le désespoir et la mort, enlevaient ceux qui osaient rester plus d'une dizaine de minutes dans la pénombre... Croyez-vous aux légendes ?