Margaux Visdeloup.

Personne ne savait.

Anna n'est jamais sorti avec Gaël. Du moins, pas officiellement. Il y avait entre eux un étrange jeu de regards, de contacts et de réflexions. Margaux l'avait compris vite, quand elle fut amené à côtoyer la jeune femme. Elle ne doutait pas qu'une ou deux fois Anna ai finit dans le lit de son frère - bien qu'il y avait plus réjouissant comme idée -, mais pourtant, on ne lisait aucune douceur dans ces regards, ces contacts et ces réflexions, seulement quelque chose de cru, de déstabilisant, de malsain, presque.

Le frère et la soeur avait pour habitude depuis bien longtemps d'inviter quelques amis chacun - je veux dire par quelques cinq ou six personnes - dans leur maison familiale à quelques kilomètres de Gap, une semaine de bordel intense en février où le plus importants pour tous résidait dans la cheminée incrustée dans la pierre du mur. Peut-être le lecteur aura-t-il du mal à le comprendre, mais l'année de leur rencontre, Gaël proposa à la belle Anna de les accompagner. En fait, peut-être est-ce bien là, que tout commença.

" - Tu comptes sortir avec elle un jour ou quoi ? avait un jour demandé Margaux à son aîné alors qu'ils étaient de corvées vaisselle.

- Avec Anna ? J'en sais rien. Ouais, peut-être. Ou pas. Je devrais ? Elle me fait kiffer."

Oui, sûrement, puisque lui semblait l'aimer. Non. Peut-être. Des sentiments. Forts. Ou non. Des pulsions. Sexuelles. De celles qui dirigent par le creu du ventre. Une amitié. Ou une haine puissante. Aimer par le corps et détester par l'esprit. Ou l'inverse. Jouer. Mentir, ou dire la vérité. Savoir et ignorer à la place. Ne plus rien écouter. Une beauté. Psychologique. Physique. Une identité surpuissante. Admirable. Une autre plus douteuse. Mystérieuse, presque. Innocente.

" - Tu comptes sortir avec lui un jour ou quoi ?

- Gaël ? Maybe. Il est chou. Mais je sais pas... Ouais. Non. Va savoir, je verrais."

Alors personne ne savait. Un jour, on savait qu'ils le feraient. Le lendemain on était sûrs du contraire. Beaucoup des invités riaient quand on évoquait leur cas, et seul Margaux gardait le silence. Parce qu'elle était amoureuse ? Non, pas tout à fait encore, parce qu'elle sombrait doucement dans une ivresse qu'on peinait à comprendre.

"Laissez, s'exclamait-on parfois, elle a juste peur de s'éloigner de son frère."

Il y avait peut-être bien un peu de cette possessivité fraternelle dans ce qui gênait Margaux, sûrement un peu plus. Mais comme Anna et Gaël, Margaux ne savait pas encore.