Un peu

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-- Novembre --
Mercredi 8

Je m'étais mis à détester le bruit de l'ascenseur depuis peu, à regretter celui d'une paire de chaussure sur un escalier.
Cela ne faisait que cinq jours, pourtant j'avais déjà maudis une bonne vingtaine de fois l'inventeur de cette boîte de conserve.

Quand les portes s'ouvrirent, une voix robotique insupportable m'indiqua que j'étais au rez de chaussée.
Ma chambre se trouvant au deuxième, j'étais forcé de prendre ce foutu truc dès que j'avais envie de sortir.
Les infirmières passaient leur temps à me courir après, elles n'arrêtaient pas de me dire que je devais être accompagné, et que si j'avais besoin de quelque chose, je n'avais qu'à appuyer sur la télécommande.
Mais ça me donnait encore plus l'impression d'être un assisté.

Dans le fond, je savais très bien pourquoi tout le monde paniquait quand je sortais seul de ma chambre, la psy me l'avait très bien expliqué à mon arrivée ici.

"Jungkook, ton accident t'a rendu affectivement et psychologiquement instable. Notre équipe est là pour te soutenir jusqu'à ce que tu ne sois plus un danger pour toi même."

Autrement dit, j'étais catalogué suicidaire. On surveillait le moindre de mes gestes et j'arrivais de moins en moins à m'échapper et à m'offrir des moments de répit comme celui-ci.
J'admets que le deuxième jour, je m'étais introduit dans un local pour essayer de prendre une dose mortelle de médocs ... Ça n'aidait pas forcément mes médecins à avoir confiance en moi.
Mais cette fois je voulais juste prendre une boisson au distributeur, un truc assez sucré pour me donner la force de garder les yeux ouverts devant la petite télé posée en face de mon lit.

Alors pourquoi cette foutue machine refusait d'être de mon côté ?
J'aurais bien foutu un coup de pied dedans si j'avais pu, mais même ça m'était interdit.
Ce fut donc mon poing qui rencontra la vitre en plexiglas, mais ce fut autrement plus douloureux.

Je m'en foutais un peu, la douleur était devenue banale pour moi. Mais cela faisait partie d'un tout. Mon impuissance, la machine, l'ascenseur, ces foutues infirmières, ... La somme de tout cela me mit les larmes aux yeux.

- Bah alors ? Tu vas te mettre à chialer ?

Mon bras droit vint frotter rageusement mes yeux avant que la moindre larme n'en sorte pour pouvoir foudroyer l'énervant propriétaire de cette voix du regard.

Je ne l'avais pas vu arriver, peut être était-il là depuis le début, au premier rang pour assister au spectacle pathétique que je donnais.
Il vint poser l'épaule contre la machine et me regarda avec un sourire moqueur qui me donnait envie de lui envoyer mon poing dans l'entrejambe.
Il portait une veste de motard et avait un bouquet de fleurs blanches dans la main droite. Si ce dernier détail ne m'intéressait pas vraiment, la veste suffit à me mettre en rogne. J'avais du mal avec les motards depuis quelques jours.

- T'as besoin d'aide super roulettes ? Demanda-t-il, toujours sur ce même ton sarcastique qui me fit grincer des dents.

- Si tu veux m'aider, fais demi tour et ferme la.

- J'aimerais bien, mais tu bloques le passage et j'ai besoin de ma dose de caféine.

Pas le moins du monde désarçonné par la froideur de ma voix et mon visage de marbre, il posa son doigt sur la vitre, au niveau d'une canette de café glacé.

- Si la machine marchait, je resterais pas là à t'écouter dire des conneries, grinçai-je.

Le mec au blouson de motard et aux cheveux gris cendrés haussa un sourcil et donna un coup de hanche dans la machine.
Un grand bruit métallique se fit entendre et ma cannette de soda arriva dans le bac de sortie du distributeur.

Daisy [KookV]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant