Episode 4

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«Mon cher journal, aujourd'hui, nous sommes le 23 juin, et depuis ma fenêtre, je peux t'assurer qu'une magnifique journée d'été s'annonce. Voilà désormais deux jours que je suis réveillée, mais clouée au lit. En ces deux jours chargés en émotion, j'ai appris beaucoup de choses sur ce qu'il s'était passé durant mon looong, trèèès long coma. Dès mon réveil, j'ai eu droit à la visite de Gabi et de sa petite poupée, Louise. Au cours de notre discussion, j'ai appris que le vieux dispensaire de l'hôpital avait été rénové et avait Fred comme heureux propriétaire. Elle m'avait également parlé de son changement de service, qui je crois l'avait particulièrement affectée. Le lendemain, c'est Sabine et Julien qui étaient venus me voir, m'apprenant le décès de madame Vögler. Et  depuis le temps que je les attendais, grâce à Sabine, j'avais enfin eu des révélations quelques peu surprenantes sur la disparition de Marc. Maintenant, j'attend avec la visite de Medhi et Gigi, et j'aimerais aussi revoir les docteur Hassmann. Patience, je suis sûre qu'ils finiront par venir me voir. Mais d'abord, une question tourne de plus en plus dans ma tête : où est passé Lucas ? Je ne l'avais pas quitté avant l'accident ? Marc lui aurait-il dit quelque chose à propos de ce qu'il s'est passé dans la voiture ?... »

Une fois ces quelques mots griffonnés sur mon journal, je scruta - encore - toutes les choses qui m'entouraient. Evidemment, rien n'avait changé depuis hier, donc l'ennui ne mit pas longtemps à me gagner. Une fabuleuse mauvaise idée me passa donc par la tête. Trois jours que je jonglais entre assise et couchée dans ce petit lit aux draps blancs comme la neige. Et si j'allais me dégourdir un peu les jambes ? C'est donc avec une détermination à toutes épreuves que j'arracha la couette qui recouvrait la moitié de mon corps et m'assit au bord de mon lit. Je m'appuya d'un côté sur la rambarde de celui-ci et de l'autre sur ma table de nuit; et puisa toute ma force et mon énergie pour me lever. Un an que me jambes n'avaient pas supporté mon poids, je comprends mieux pourquoi celles-ci flageolèrent quand je me redressa. Mais dans ces moments là, tout est dans le mental; alors transpirant à grosses goûtes j'essaya de lâcher une main, puis une autre. Une fois mon équilibre retrouvé, je fis un petit pas, sautant intérieurement de joie. En relevant la tête, j'aperçu ma mère et ses dizaines de Tupperwares accompagnée du docteur Keller. Ils entrèrent dans ma chambre, tous deux stupéfaits pas cet incroyable effort et jonglant entre mon sourire béat et mes jambes. Ma mère, lâcha tout ce qu'elle avait dans les mains et les plaqua sur la bouche, toute excitée de me voir marcher. Contrairement à elle, le docteur Keller se jeta sur moi pour me rattraper de ma chute imminente. Après m'avoir recouchée dans mon tout petit lit, celui-ci ne put s'empêcher de ma faire la morale.

- Docteur Haase, quelle idée de vous être levée sans personne avec vous ?! Et surtout sans mon accord !

- Je suis désolée, mais j'en avais marre d'être clouée dans ce lit du soir au matin !

Après un bien trop long monologue inutile pour m'expliquer les risques de se remettre debout trop tôt et blablabla, celui-ci me laissa seule avec ma mère. Elle me présenta et m'expliqua en détails tout ce qu'elle avait préparé, impatiente que j'y goûte. Ensuite, elle s'assit à côté de moi, attrapant son sac à main.

- Tiens, c'est pour toi, annonce-t-elle en me tendant un enveloppe. Le docteur Wagner me l'a laissée pour toi, et je lui ai promis de te la donner dès ton réveil, annonce-t-elle, le ton protecteur.

- Merci...

Sans perdre de temps, elle s'assit sur le bord du lit, toute ouïe. 

- Maman... 

- Oh pardon... Tu veux peut-être rester seule ? Bien, bien, je te laisse...

Lentement, elle se leva et quitta la pièce, me laissant seule face à cette enveloppe qui me faisait terriblement peur mais que je décida tout de même à ouvrir. C'est la main tremblante que j'ouvrit le rabat collé et sortit y la lettre.

"Ma très chère Meg,

C'est en cette chaude soirée de fin d'été que depuis ma terrasse, je t'écris cette lettre avec au plus profond de moi; l'espoir que tu puisses un jour la lire. Tu dois sûrement te demander pourquoi je ne suis pas à tes côtés ? Pourquoi je ne suis pas là pour te soutenir dans cette lourde épreuve ? Et bien pour deux raisons différentes. De plus, je tiens à te préciser que la deuxième m'a poussé à la première.

Tout d'abord, j'espère que tu ne m'en voudra pas longtemps, mais je suis parti. Ton état de santé était tout comme moi, au plus bas. Plus les jours passaient, plus les chances de te revoir un jour ouvrir les yeux diminuaient. En plus, comme tu l'avais sûrement remarqué, je n'avais plus vraiment ma place ici; mise à part le départ précipité de Lora Roth qui trouvait l'hôpital, je cite : "Minable et moyenâgeux"; la mort du docteur Lorenz m'a beaucoup affecté. Et oui, ce brave homme, pilier de la chirurgie à succomber à un arrêt cardiaque alors qu'il était en pleine opération. Malgré mon cœur emplit de chagrin par toutes ces épreuves, j'ai fini par accepter l'offre du plus prestigieux hôpital de Munich qui me nommait chef du service des grands brûlés. C'est donc le cœur brisé que je suis contraint de quitter Berlin et ma belle au bois dormant; qui j'en suis certain, sera un beau jour réveillée par son prince charmant.

Malheureusement pour moi, je n'étais pas ce beau prince charmant, puisqu'aucun de mes baisers ne t'ont réveillée. J'en viens alors à mon argument numéro deux. C'est donc tout naturellement que je laisse ma place à celui qui t'a toujours fait vibrer, celui qui hantait tes pensées et que tu as toujours aimé, le docteur Marc Meier. Pour tout te dire, je me suis toujours douté qu'il y avait quelque chose entre vous. Entre vos regards si fusionnels et son attitude qui était loin d'être anodine lors de l'accident, j'ai vite compris que la flamme qu'il y avait entre vous était présente bien avant mon arrivée. Entre nous Meg, tous les hommes que tu as eu dans ta vie n'ont jamais vraiment compté n'est-ce pas ?

Enfin bref, tout ça pour te souhaiter un bon rétablissement et plein de bonheur avec Meier; qui d'ailleurs, se morfond  au fond de son bureau en priant Dieu pour que tu daignes ouvrir les yeux. Je pense qu'il est enfin prêt à s'ouvrir à toi, et que l'époque où tu étais encore son jouet est révolue.

Quant à moi, je m'en vais prendre un nouveau départ à Munich, en espérant trouver enfin la femme de ma vie et qui sait, fonder une belle famille !

Je t'embrasse, cordialement,

Lucas W."

Au fur et à mesure de ma lecture, je sentais mes larmes se bousculer à la frontière de mes paupières inférieures avant de rouler sur mes joues et s'écraser sur cette si belle lettre.

Le journal de Meg - Que s'est-il passé ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant