Chapitre 7: Un petit oiseau m'a dit (Aladrinh)

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Il leur fallait un cristal d'une quinzaine de centimètres au minimum. C'était problématique. Aladrinh n'était pas sûr qu'une pie puisse porter autant, fusse-t-elle entraînée à voler des objets.

Car bien sûr, son plan était d'entrer en communication mentale avec Pactole, pour qu'il lui amène le cristal à la fenêtre. Ce qui était un plan plus risqué qu'il n'en avait l'air.

D'abord, une pie avec un cristal orange volant à travers Isaldor, ce n'était pas ce qu'il y avait de plus commun. Certes, des pies volaient parfois des objets brillants comme des cristaux, mais jamais d'une telle taille.

Mais c'était surtout quand Pactole s'approcherait de la prison qu'il risquait de se faire remarquer. Il fallait espérer que le ciel n'était pas surveillé.

Aladrinh ferma les yeux et se concentra. Il visualisa la pie dans son esprit, puis se mit à l'appeler mentalement. L'exercice consistait à hurler son nom intérieurement en restant focalisé sur l'image de l'oiseau. La communication se faisait au bout de quelques minutes, en général.

Soudain, l'elfe entendit un son dans sa tête. Un cri d'oiseau. Pactole répondait à son appel. Il apparut comme un songe à Aladrinh et pencha la tête, pour manifester sa curiosité. Puis leurs esprits fusionnèrent.

C'était une des sensations les plus étranges qui puissent exister. Les esprits d'un elfe et d'une pie sont très différents. C'est pourquoi ils ne pouvaient s'unir parfaitement. C'était plutôt comme s'ils percevaient en temps réel les pensées de l'autre. Aladrinh pouvait aussi voir à travers les yeux de l'oiseau, ce qui lui permit de voir qu'il se trouvait en forêt profonde.

Il lui ordonna de s'envoler vers la ville, lui faisant comprendre que ce qu'il allait devoir accomplir était très important. Pactole aperçut les premiers toits d'Isaldor une dizaine de minutes plus tard.

Trouver des cristaux ne fut pas difficile. On en vendait dans n'importe quel marché de la ville. Ils brillaient, multicolores, sur les étals, jouant avec les rayons de soleil dans la lumière du matin. Mais les cristaux oranges étaient toujours soigneusement emballés dans des draps et placés dans des caisses pour éviter tout accident.

Aladrinh dut attendre longtemps pour qu'une occasion se présente. Un vieil homme acheta un cristal orange à un commerçant sous les yeux de Pactole. Une cible facile. La pie s'empara du paquet et s'envola à tire-d'aile, son butin entre ses griffes et s'envola vers la prison.

Aladrinh savoura ce moment. Il se trouvait sur le sol froid d'une cellule, et pourtant il se sentait plus libre que l'air. Il fendait le ciel, loin au dessus de l'effervescente cité d'Isaldor. Les clameurs de la cité étaient étouffées par le sifflement du vent dans ses oreilles de pie.

Mais ce sentiment grisant ne pouvait durer éternellement. Pactole se posa doucement sur le rebord de la fenêtre de la cellule et y laissa le paquet. Aladrinh remercia mentalement son familier, coupa le lien et ouvrit les yeux. Devant lui se trouvaient l'objet et une Maria ébahie.

-Je croyais que tu t'étais endormi, lui dit-elle. Cela fait près d'une heure que tu ne bouges pas.

-Tu t'attendais à ce que Pactole ramène un cristal en quelques secondes? Un bon larcin prend du temps, répondit-il.

Aladrinh s'approcha du rebord et retira le drap du cristal. Il faisait la taille demandée par Maria, soit quinze centimètres. Il se mit aussitôt à produire un son caractéristique, qui ressemblait au frétillement de l'huile de friture. L'elfe s'empressa de reposer le drap dessus.

-Comment s'y prend-on pour éviter les explosions inopportunes? demanda-t-il.

Maria réfléchit.

-Normalement, si l'on attache ce drap aux barreaux et que l'on perce des trous, le cristal devrait recevoir assez d'énergie pour se charger lentement, sans exploser. A condition qu'il ne fasse pas trop humide. Sinon...

Elle imita le bruit d'une explosion. Leur plan, bien que simple d'apparence, pouvait être soufflé en un instant, au sens propre comme au figuré. Si le cristal éclatait avant d'avoir atteint sa charge maximale, il ne produirait qu'une petite déflagration qui ne serait pas suffisante pour détruire les barreaux, mais qui alerterait tout de même les gardes.

Cachant le cristal sous des couvertures, il tâchèrent de percer de petits trous dans la toile avec leurs dents et leurs ongles. Le résultat avait l'air misérable, mais il ferait l'affaire. Ils placèrent la pierre derrière le filtre de fortune et s'assirent sur leurs lits respectifs. Le cristal grésillait toujours, mais nettement moins fort.

Ils attendirent toute la matinée, parlant parfois, mais surtout dans un silence tendu, craignant tous deux que la pierre n'explose.Aux alentours de midi, Aladrinh cacha le larcin sous ses couvertures, craignant que les gardes ne viennent pour leur apporter leur déjeuner et ne découvrent le cristal. Ils découvrirent avec déconvenue qu'on ne leur servait tout simplement pas de déjeuner.

L'après-midi s'écoula comme la matinée. Le jours suivant, le cristal fut enfin prêt. Ils étaient la veille de la semaine du Destin. Mais il fallait encore attendre quelques heures pour être certain que la pierre orangée fonctionnerait bien. Aladrinh s'ennuyait profondément. Il haïssait la captivité plus que tout. Pactole ne répondait même plus à ses appels mentaux. Il chassa une guêpe qui passait à côté d'un revers de main.

Il se redressa soudain. Il entendait un bruit de pas. Vif. Non, trois. Ils s'approchaient d'eux.

Trop tard. Trois gardes firent irruption dans la cellule. Les deux détenus étaient pris sur le fait. Aladrinh jeta un rapide regard circulaire pour considérer ses armes éventuelles.

Son regard se posa sur le broc d'eau.

Parfait, pensa-t-il.

Il se saisit à deux mains du broc. Il était prêt.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 10, 2017 ⏰

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