Une clope et une lettre.

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Alors là, si je m'attendais à ça... Putain, pour une fois que je réussis un truc dans ma vie.

Je me retenait de froisser l'avis de décès dans mes mains, adressée aux "enfants du regretté Dr.Gaster". En voyant cette mention, je m'étais retenu d'éclater de rire. Le mec qui a écrit a dû aller se couper la main après tellement il avait honte d'avoir marqué ÇA. Mais quand même, je lui tirai mon chapeau pour avoir mis le mot "regretté" si proche du prénom de ce salaud. Sinon, rien d'intéressant, juste pour dire qu'il avait cassé sa pipe, et j'étais pas près de faire pareil vu que je gardais la mienne dans un joli étui qui la protègeait bien, surtout d'Éveline. Je lâchai un petit rire rauque, la fameuse pipe calée entre mes dents, avant de sentir le papier partir de ma poigne et de relever le regard vers la voleuse, qui esquissait un mouvement de fuite, son butin entre les mains. Elle veut jouer ? Pas de problème ma chérie, Sansy va te faire ta fête.

Avec une extrême lenteur, je me relevai après avoir brutalement frappé la table, explosant mon pauvre verre de cognac qui avait eu le malheur d'être pile sous ma paume. Le regard de la petite chancela entre mon air menaçant, mes puissantes épaules et le verre brisé. Elle lâcha un juron avant de détaler comme un lièvre. Ma lapine, tu risques bien de me servir de repas pour ce soir. J'aimais pas courir, alors je me contentai de me téléporter dans sa caverne d'Ali Baba, qu'on pouvait aussi appeler sa chambre si on n'avait pas le déshonneur d'accueillir cette cleptomane chez soi. Je me couchai sur le lit aux draps de soie rouges, et attendais, les bras derrière la tête, les jambes croisées et le regard vers le plafond recouvert d'étranges équations. J'avais beau être une bête en matières scientifiques, j'y comprenais rien sans y voir d'erreurs.

Tiens, la lapine débarqua dans son terrier sans y voir le renard.

D'une téléportation, je me déplaçai derrière ma petite fautive et enlaçai sa taille, pour faire ensuite remonter une main jusqu'à son cou en lui tripotant la poitrine au passage, sans me gêner ni me soucier de son grondement de colère et du coup de coude dans mes côtes.

<<Avoue, tu t'es fait coincer.

-Ouais, par un vieux con pervers. J'ai rien trouvé de mieux à faire tu vois, c'te lettre avait l'air bien sympa vu qu'tu riais comme un demeuré. Et effectivement, c'est du comique que j'en ai fait couler mon mascara à en chialer de rire.

-Tu l'as lue p'tite salope. Tu l'as lue.

-Ben quoi, fallait pas que je sache ? Après tout, c'est autant ton père que le mien, salaud.

-Si j'avais su que j'allais te péter les jambes, j'aurai été te chercher des béquilles.

-J'ai hâte de voir ça, Sansy. Mais après, j'dois ramener du blé, t'as oublié ou t'es juste complètement abruti par une paire de nibards ? J'crois que je connais la réponse. Faut calmer tes ardeurs, j'suis pas ta pute.

-Et pourquoi pas ? T'es bien celle de l'autre con.

-JE SUIS PAS SA PUTE NON PLUS ET TU L'APPELLES PAS COMME ÇA !>>

L'impétueuse Éveline se mua en un corps obéissant alors que ma main se resserra un peu autour de son cou et que mes dents déposèrent un baiser sur sa clavicule. Ben voilà, elle pouvait être obéissante quand elle voulait. À défaut d'être très soumise, elle avait un corps de rêve et j'allais pas me priver, bien sûr sans abîmer la marchandise.

Ah putain, ça ça fait du bien... Je laissai à la p'tite le temps de se remettre, et ce ne fut que lorsque je remarquai ses pleurs que quelque chose de presque mort se réveillait en moi, une sorte de pitié, mais plus... Douce. Je me retirai d'elle, très doucement pour ne pas intensifier ses gérémiades, et nous recouvrai avec la couette, légère mais agréable, elle tenait bien chaud. Je la retournai vers moi, et plus que son magnifique visage en larmes, j'y voyais une grande terreur et une envie de réconfort si grande qu'elle en agrippa les barreaux de ma cage thoracique avec ses petites mains, hoquetant contre moi. Bien que j'étais un salaud fini, j'étais son aîné, et cette chose dans mon âme me donnait envie de la tenir dans mes bras, de la protéger et de la rendre heureuse. Alors, presque naturellement, je l'enserrai dans mes bras, et prenai compte, certes bien trop tard, du fait qu'elle n'était qu'une gosse, treize ans maximum. Une gosse cleptomane, mais une gosse qui voulait juste l'attention de quelqu'un. Et dans tout ça, je reconnaissais un certain salaud, un p'tit squelette, qui fumait la pipe, aux épaules puissantes et qui aimait le cognac à son âge. Moi. Je la gardai contre moi, et elle venait naturellement dans mes bras. Une p'tite humaine certes magnifique, mais mienne.

Plus personne ne lui fera du mal, je l'jure sur l'honneur du vieux Sans.

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