Prologue

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Je devais avoir seize ans quand tout à commencé. On était en cours de français, en après-midi, et le temps n'avait pas l'air d'avancer. Le prof faisait une révision sur les participes passés employés avec avoir et moi, je discutais discrètement par textos avec Emma, ma meilleure amie. Son bureau était dans le coin droit, en avant, et le miens était dans le coin gauche, au fond de la classe.

»Raphaëlle à Emma : Ça marche toujours le magasinage ce soir ??

»Emma à Raphaëlle : Oui !

Puis, le prof m'avait posé une question, sûrement pour voir si je suivais son cours, mais je n'avais pas eu le temps de répondre, parce que la grande fenêtre sur le mur côté droit, positionnée à environ un mètre et demi du sol et se rendant jusqu'au plafond, avait éclatée en millions de petits morceaux, aspergeant les élèves les plus proches. Les filles s'étaient mises à crier et les garçons, à jurer. Je m'étais levée précipitamment et mon regard avait balayé l'extérieur en deux temps trois mouvement. J'avais remarqué un nombre important d'hommes postés sur le toit du bâtiment d'en face, vêtus de vieux vêtements usés et portant des protections anti-balles de tout genre. Quand je m'étais rendue compte que chacun d'eux tenaient un gros fusil et qu'ils nous pointaient avec, je n'avais eu le temps que de me jeter par terre et de crier :

-COUCHEZ-VOUS !!!!!!

À cause du vacarme que faisaient mes camarades de classe, seul les personnes qui étaient restées près de moi m'avaient entendues et s'étaient exécutées. Un dixième de seconde après, des coups de feu, provenant des mitrailleuse, avaient éclatés et tous les élèves de la classe, y compris le prof, étaient tombés par terre, ensanglantés. J'avais les bras repliés sur le dessus de ma tête, je hurlais et je pleurais, tandis que des feuilles de papier, des débris et de la poussière de plâtre me tombaient dessus.

Puis, après cinq secondes d'enfer, qui m'avaient parues durer cinq heures, les coups de feu avaient enfin cessés. J'avais retiré mes bras très lentement, toussé à cause de la poussière qui s'infiltrait dans ma gorge, et ouvert les yeux doucement. Le spectacle était plus qu'horrible. Des corps charcutés, couverts de sang et criblés de balles couvraient le plancher.

Et puis soudain, une des trois personnes qui avaient entendues mon alerte un peu plus tôt et qui s'étaient jetées par terre s'était levée rapidement, en larmes, le visage et les vêtements couverts de poussière, et avait soufflé :

-C'est fini, hein...?

Mais, sans que je n'ai pu lui crier de rester au sol, une balle était venue se planter dans sa tête, faisant voler du sang et des petits bouts de cervelle sur le mur derrière. Alors qu'il s'était écroulé par terre, je m'étais recouvert la tête encore une fois et avais fermé les yeux en braillant, imitée des deux autres, et personne n'avait bougé pendant un temps incroyable.

Ensuite, au son des sirènes de polices qui se rapprochaient, j'avais ouvert les yeux et retiré mes bras, soulagée. J'avais fait signe aux autres de ne pas se lever et avais essuyé le mélange de larmes et de poussière qui maculait mes joues. Quelques minutes après, des agents spécialisés, armés de gros fusils d'assaut, étaient entrés en trombe dans la classe. En nous voyant nous redresser au milieu des cadavres, ils avaient tout de suite baissé leur arme et s'étaient approchés de nous rapidement. L'homme qui était venu vers moi avait retiré son masque à oxygène en s'agenouillant et me l'avait placé sur la bouche et le nez, tout en m'aidant à me redresser complètement.

À un moment donné, mes yeux avaient croisés les siens, chose tout à fait normale, mais leur bleu profond m'avaient fait perdre mes moyens. J'avais tangué légèrement vers l'arrière, mais il avait placé une main dans mon dos, avant de glisser son autre main sous mes genoux et de se lever, moi dans ses bras.

Il m'avait transportée jusqu'à l'extérieur, où une ambulancière lui avait ordonné de me déposer avec la plus grande délicatesse sur la civière qu'elle lui indiquait. Ensuite, ils avaient poussé le lit à roulette vers l'ambulance la plus proche et l'avait levé pour le positionner à l'intérieur. Juste avant, le masque à oxygène que je portait avait été remplacé par un autre et l'ambulancière m'avait rejoint dans la cabine, mais pas l'homme aux yeux bleus. À mon regard, celui-ci m'avait fait un clin d'œil puis, il avait fermé les portes. Le véhicule s'était mit en branle et la femme m'avait donné des capelets pour me faire dormir.

AloneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant