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justine.

« Justine ? »

Ma mère toquait doucement à la porte alors que nous étions encore nues, à peine cachées par la couverture, mais surtout encore presque endormies. Je venais de me réveiller, et la marmotte dormait encore.

J'enfilai rapidement une robe de chambre et sortit rejoindre ma mère pour, sûrement, discuter.

« J'ai réfléchi toute la nuit. »

Elle avait de légères cernes sous les yeux. Ma mère, qui dormait d'habitude sous anti dépresseur et somnifère seulement.

« Tu as pris tes médicaments, maman..?
- Tu as le droit de savoir.
- Écoute, c'est mieux pour toi que tu ailles te reposer, on en reparlera tout à l'heure si tu veux.
- Eh, je suis encore ta mère et aux dernières nouvelles j'ai toute ma tête ! Donc laisse moi faire ce que j'ai envie, merci. »

Je me tût. Elle me demanda de la suivre au salon, ce que je fis.

« Avant que tu dises quoi que ce soit, maman, je voulais te dire qu'il y a un ou deux jours, un homme voulait t'appeler et avoir ton numéro, apparemment il te connaîtrait depuis longtemps, alors j'ai son numéro si jamais.
- Justement. Par je ne sais trop quel moyen, cet homme m'a joint hier soir.
- Je te jure que ce n'est pas moi qui lui ai donné ton numéro ! Je voulais ta permission avant !
- Peu importe. Il faut que tu saches qui est-ce. Il faut que tu saches la raison pour laquelle ton père et moi, ça c'est si mal finit, pour laquelle..
- Il est tétraplégique..?
- Non, Juju, ça c'est la faute du destin et même si ton père avait été un homme bon, il n'aurait pu empêcher ça. »

Juju. Ça faisait tant d'années qu'elle ne m'avait pas appelé comme ça.. J'avais l'impression d'avoir cinq ans à nouveau. Je déteste ce surnom, mais c'est si doux de la bouche de ma mère.. Comme une petite bulle protectrice de lien mère-fille.

« Alors..? Qui est-il ?
- C'est ton géniteur. »

Je m'étouffai après avoir avalé de travers ma salive. Pardon ? Mon père n'était pas mon père et elle a refait sa vie avec un père qui est encore plus éloigné de mon père tout ça parce que mon père n'est pas mon vrai père et que je n'ai jamais connu mon vrai père ?

Wow. Même moi j'ai pas suivi.

« Qu'est ce que tu veux dire par mon géniteur ?
- Ne commence pas à croire que je suis une Marie couche-toi là. Non.. Ton père était devenu stérile après une histoire compliquée de médecine pas si performante.. Alors, pour t'avoir toi, et ne pas gâcher sa vie d'homme en lui apprenant qu'il ne pouvait plus avoir d'enfant, je suis tombée enceinte de toi. Mais pas de lui. Je suis tombée enceinte de son frère, mais je n'ai eu aucun rapport avec lui ! Il a beaucoup forcé au début mais j'étais une femme mariée alors pour rien au monde, même pas un enfant du bonheur, je n'aurais accepté. Nous avons eu un enfant, toi, dans un laboratoire par insémination artificielle. Il avait accepté de garder le silence en échange de te voir le plus souvent possible. Malheureusement, ton père, étant en mauvais terme avec lui, il ne le prévint pas de sa mutation et il ne sût jamais où nous étions parti. Et il n'a jamais pu te contacter après tes trois mois.. Jusqu'à il y a peu de temps.
Ce jour où tout a explosé dans la famille.. Ce jour où.. L'homme que j'ai aimé est devenu un monstre.. Il a appris tout ça. Tout ça d'un coup.. On lui a diagnostiqué une maladie mentale, mais on avait clairement pas l'argent pour l'aider dans son traitement, alors je l'ai juste.. Laissé à la maison. Sauf que.. Sauf qu'il est devenu la pire des ordures. Il vous frappait, je le savais mais je ne disais rien parce qu'il faisait pareil avec moi.. Et si j'avais su pour ta sœur.. Je te jure que je l'aurais égorgé de mes propres mains.. »

Elle pleurait, elle pleurait beaucoup et si fort.. J'étais sous le choc, vraiment. Mais je ne supportais pas de voir ma mère pleurer..

« Maman.. Arrête de pleurer s'il te plaît.. »

Je la pris dans mes bras. Oui, j'étais énervé d'être la dernière au courant, mais j'étais heureuse qu'elle ne me l'ai pas dis, genre, sur son lit de mort.

« Ju..? »

Une voix à l'étage se faisait entendre. Ma porte de secours à ce moment très pesant.. C'était elle, elle m'appelait.

« Je vais monter maman. Je dois prendre du recul. Je te remercie de me l'avoir dis.. »

Et je montai. Mon visage était tellement blanc à cause du choc..

J'ouvris la porte. Elle avait enfilé les mêmes habits que je lui avais retiré la veille.
Et dès que je l'ai vu, surplus d'émotions oblige, j'ai éclaté en larmes. Elle me serra fort dans ses bras et ne me laissa pas partir avant que je fus calmé.

« Qu'est ce qui se passe, bébé..? »

Et je lui racontai tout, d'un seul pavé, sans presque respiré mais en ne pleurant plus, comme ma mère l'avait fait quelques minutes plus tôt. J'avais du oublier quelques détails, comme les viols perpétuels de ma sœur ou le fait qu'on ait été une famille battue, mais.. Elle savait tout maintenant. Toute ma vie ou presque, bien mieux que je la connaissais moi. Je ne manquai pas de lui faire la remarque, tout en séchant les dernières larmes qui avaient perlés au coin de mes yeux.

« Tu me connais si bien et je te connais si peu.. C'est horriblement injuste.. »

Elle me tira doucement sur le lit, elle s'assit et je m'assis également.

« Que veux-tu savoir sur moi ?
- D'où viens-tu ?
- Je suis né ici, et je mourrais sûrement ici. Ce sont mes origines, mon sang, et je n'en changerais pour rien au monde.
- Quel est ton plus sombre secret ?
- Je dirais que.. »

Elle semblait réfléchir, puis.. Son visage s'effondra.

« Je dirais que c'est que j'étais avec ma sœur, lorsque.. »

Oh non. Elle.. Oh non. Elle a vu sa propre sœur mourir.. Elle se mit à sangloter un petit peu, puis beaucoup. Alors je la pris dans mes bras comme elle l'avait fait quelques minutes auparavant.

« J'ai du te mentir en disant que j'ai arrêté de vivre quand on me l'a appris parce que.. J'ai arrêté de vivre dès que.. Dès que ce putain de train nous a percuté.. J'aurais du partir avec elle ce jour là. Sauf qu'ils ont réussi à me ramener.. Et.. Elle non.. »

Elle ne pleurait plus mais son souffle était si lent, son regard si vide.. Elle me faisait presque peur.

« J'ai été avec elle jusqu'à la fin. J'ai même essayé tant de fois de la rejoindre.. »

Elle rit légèrement.

« J'essaye encore, je t'avoue. »

Je la regardais avec des gros yeux et des larmes naissantes.

« Non..
- ..
- Non..!
- Je suis désolé.. »

Elle se leva.

« Si je pars bientôt, je ne veux pas que tu t'en veuilles. Ni à moi, ni à personne. Soit en paix avec toi même, parce que je mourrais en t'aimant, sache le. »

Elle me regarda une dernière fois avant de sortir de la pièce.

Mon monde s'était littéralement écroulé en une journée.

lonely girlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant