Chapitre sept.

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Question du jour : quel est votre chiffre préféré ?

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Alors que nous continuons de nous regarder dans le blanc des yeux suite à sa tirade, un sentiment de bien-être me frappe. Pour une fois, je ne me sens pas jugée au moindre de mes mouvements ou dès qu'un mot franchit mes lèvres. Pas besoin de suspendre le monde, finalement.

C'est un pas énorme que j'atteins au bout d'un temps assez long dans mes relations en général. Même Timéo pourrait témoigner de mon manque de chaleur dans nos premières conversations. En fait, si nous sommes désormais amis, c'est particulièrement grâce à sa persévérance. Le fait que j'aime autant les films et la mythologie l'avait intrigué, donc il ne lâchait pas l'affaire.

De toute manière, il abandonne peu. Voire jamais.

- A quoi tu penses ? m'interroge soudain Éos.

Je réalise que j'ai laissé dériver mon regard dans le vide, alors je recentre mon attention sur elle. Elle m'offre un sourire encourageant, pour m'aider à être un maximum à l'aise. Son expression entière est une invitation à me laisser aller.

- Je crois que je pourrais vite m'accoutumer à... Ça, avoué-je en désignant l'espace entre elle et moi d'un mouvement souple du bras.

- Oh, donc mon petit speech t'a fait de l'effet ?

Je hoche la tête, alors que je sens mes joues s'enflammer. La fille qui m'a embrassée rit doucement face à cela.

- Tant mieux ! s'égaye-t-elle. Bon, alors, commençons par apprendre à se connaître. Allons-y doucement, je te propose.

Elle envoie un clin d'œil dans ma direction.

- Déjà, j'ai vingt ans, vingt-et-un dans deux mois environ. Je suis une piètre menteuse, parce que je trouve que la vérité devrait toujours être dite, même si ça fait mal. La vie n'est pas un long fleuve tranquille, donc il faudrait arrêter de prétendre le contraire. J'ai arrêté mes études de sciences et je me suis dirigée vers l'art à la place ; j'ai toujours eu un pied dans chaque monde, sauf que je me suis rendu compte que je préférais créer, imaginer et tout ça.

Elle s'arrête. Un silence trop long s'étale entre nous et je finis par saisir qu'elle souhaitait que j'embraye sur ma propre personnalité. Il est trop tard quand je m'apprête à le faire. Elle dit :

- Tu sais quoi ? Posons-nous des questions, ce sera plus simple.

Ses paroles me font paraître comme une enfant, mais le ton qu'elle utilise réduit cette possibilité à néant. Elle souhaite juste m'aider, sans m'infantiliser. Je hoche donc la tête. Cela ne me semble pas si compliqué.

- Je commence ! s'empresse-t-elle de dire. Quel âge as-tu ? Je te place dans une fourchette de dix-huit et vingt ans.

- Dix-neuf ans, en fait. Des frères et sœurs ?

- Enfant unique ! Et toi ?

- Une grande sœur, réponds-je. Ta couleur préférée ? Et pourquoi ?

- Ça fait deux questions, ça ! Sinon...

Elle réfléchit en se mordillant la lèvre inférieure. Puis elle jette un coup d'œil vers la fenêtre, qui laisse passer les lumières de la ville. Nous ne pouvons apercevoir que les toits des immeubles adjacents.

- Je dirais le rose orangé, celui du crépuscule ou de l'aube, parce que ça m'a toujours fait rêver de regarder les teintes que prend le ciel lorsque le soleil apparaît ou qu'il se couche. C'est magique.

UN MOMENT D'ÉTERNITÉ Où les histoires vivent. Découvrez maintenant