Le recueil de la nature morte

Chapitre 3 :Rose(première partie d'un tableau d'ombre)

Qu'est-ce que l'Amour?

Je te le demande à toi.

On s'aimait. Je t'aimais. Je t'aime. Je t'aime. Je te hais presque autant que je t'aime. Parce que si je ne t'aimais pas, je ne serais pas là sous la pluie à attendre désespérément que tu viennes en sachant que tu ne viendras pas.
Mais tu vois, je t'aimais.

Alors je suis là et j'attends.

L'Amour, c'est con.

Je me souviens encore de notre rencontre. Dans ce café. J'étais servante. Toi, tu travaillais sur un dossier important que tu devais rendre dans la soirée. J'ai fait tomber ta commande sur le sol  et je l'ai payé, alors tu m'as invité te sentant gêné de mon remboursement. C'était parfait. Comme une de ces stupides histoires d'amour à l'eau de rose. Trop guimauve pour la réalité.

L'Amour, c'est traître.

J'ai cru...  Non, nous avons cru que l'on pouvait surmonter toutes les difficultés de la vie. Mais il y avait ta femme, tu étais marié à une autre que tu avais aimé avant moi. J'espérais, mais je ne suis que la maîtresse. Je ne serai jamais vu que comme la garce qui a couché avec le mari d'une autre. Alors que moi... Alors que moi aussi je t'aime... Pourquoi le plus ancien devrait primer sur le récent?

L'Amour, c'est menteur.

Il nous souffle des belles promesses qu'il ne tiendra pas. Il nous fait croire que nous n'avons besoin de rien d'autre tant que l'être aimé est présent. Il nous fait croire que l'autre est parfait. Non, tu n'est pas parfait, je t'aime, je suis enceinte, je suis seule. Tu ne le choisiras pas même si je te le dis, car tu as une femme et des enfants. Pourquoi tout abandonné pour moi?

Après tout, je ne suis que l'amante, la garce qui a "forcé" son mari à la tromper.

Pourquoi me choisirais-tu ? Moi, la seconde, celle qui est arrivée après? Celle qui espère quelque chose alors qu'il n'y a rien.

Je suis seule sous la pluie. A pleurer. Ce test de grossesse dans les mains. Comment t'annoncer la nouvelle? Tu ne me choisiras pas même si tu m'aimes. Ta vie actuelle est bien plus confortable que celle que je t'offres.

Je ne veux pas t'appeler. Que pourrais-je te dire de toute façon?

Alors je pleures. C'est tout.

Ma vue se brouille. J'entends une voix prononcer mon prénom. Non, je dois rêver. Je me lève. Je dois être fatiguée... 

Mais la voix persiste. Ce timbre si grave que j'aime, le tien.

Pourquoi me tourmentes-tu?

Mais ta voix continues, elle se rapproches.

"Rose! Rose!" tu cries

Et ta main saisit mon poignet.

"S'il te plait, Arthur, stop"

Tu me regardes avec ses yeux de braises que j'affectionne tant, qui se dilate lors des moments de passion et d'amour. Je ne peux pas continuer dans cette voie-ci. Je ne veux plus souffrir. Je ne veux plus t'aimer, t'aimer me fait mal. Je veux juste que tout cela s'arrête. tu seras plus heureux avec ta vie actuelle. Moi, je ne t'offrirai que des moments de douleur et de peine. Le monde nous rejettera. Toi. Lui. Et moi.

"Arthur, je t'aime... c'est pour ça que tu dois retourner avec ta femme... Et tes enfants... qui t'aiment... Je ne veux que l'on continue à se détruire mutuellement..."

Tu me regardes.

Non stop, arrêtes, tu brises toutes mes résolutions, j'ai envie de te serrer dans les bras, de revenir sur ma parole. Je te veux...

Tu comprends...

Tu te retourne...

Et tu part...

L'Amour, ça me détruit.

J'ai arrêté d'y croire. Parce que je ne veux plus souffrir. J'ai arrêté de vouloir ressentir quelque chose à cause de ça.

Mais l'Amour est accompagné de l'Espoir, et il nous rend dépendant de cette stupidité qu'est l'Amour. Alors, je suis seule dans la rue à pleurer en espérant que le monde voudra de cet enfant impur  de cet enfant fait par amour, par insouciance du futur.

" Oh, bébé, tu naitra dans un monde bien cruel..."

La vie est difficile, mais je garderai cet enfant car je ne peux me résoudre à détruire la seule chose qui me reste de toi, ce petit être grandissant en mon sein.

alors, dis-moi Arthur, pour toi qu'est-ce que l'Amour?