La tempête

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Cela plusieurs heures que je m'étais endormie, mais un bruit assourdissant me réveilla. Je sursautai et grimaçai en ressentant de vives douleurs un peu partout, suite à mes folles courses de la journée. L'air était étrangement chaud, presque bouillant. Je dégageai la couverture de mes épaules et essuyai les gouttes de sueur qui perlaient sur mon front. Je me levai de mon matelas de fortune avec difficulté et me dirigeai vers une fenêtre qui donnait sur l'extérieur.

Au loin, vers les dunes que formaient les amas de sable, une violente tornade semblait se rapprocher et levait d'immenses nuages jaunes. La terre et le ciel se mélangeait, la ligne de montagnes au loin était imperceptible. Je posai ma main sur la vitre, puis mon front. Un sentiment dévastateur d'injustice me serra la gorge.

Même en pleine nuit, il n'y aurait jamais de répit ?

Je pris alors mon sac et mes affaires, et déguerpis en vitesse. Mais en dévalant les escalators en panne du centre commercial, je crus apercevoir une silhouette encapuchonnée, qui courait vers la porte de sortie de secours. Je m'arrêta net, et n'entendis plus un bruit, à part le son continu du vent qui hurlait au-dehors.

Puis le claquement sonore d'une porte qu'on referme. Tous mes sens aux aguets, je courus, maquant trébucher plusieurs fois. Il y a quelqu'un, j'en étais sûre. Il y a quelqu'un ici, avec moi. L'espoir de trouver un être vivant me précipitait à l'endroit où la porte avait claquée, mais une petite voix me chuchotait que ce n'était qu'une illusion. Le sol dérapait sous mes pieds et, dans la pénombre du lieu, je me cognais à plusieurs objets.

Une fois arrivée devant la sortie, j'hésitais à pousser cette porte. Mais après tout, je n'avais rien à perdre. Ma main tremblait alors que je la posait lentement sur la poignée. D'un geste franc, je l'ouvris et une bouffée de chaleur s'engouffra dans le centre commercial. Je manquai tomber à la renverse alors que le vent transportant des tas de sable et de poussière me fouetta le visage. Je fis un pas en arrière et protégeai mes yeux avec mes mains.

Soudainement, je ne savais pas si c'était une bonne idée. Peut-être que j'avais rêvé, que je me faisais de faux-espoirs. Mais la curiosité de savoir qui était cet inconnu était plus forte que tout. Si j'arrivais à le rattraper et à lui parler, il pourrait m'expliquer ce qu'il s'est passé. Alors je remis mon sac en place sur mes épaules et je fis un pas en avant. La chaleur au-dehors avait grimpé de plusieurs degrés, et le vent avait redoublé de force. On ne voyait pas à plus de trente mètres et les grands immeubles détruits avaient disparus. Décidée, je m'avançai aveuglément dans cet univers flou. L'instinct seul me guidait et il me semblait marcher pendant des heures.

Là, dans ce désert flou, il ne restait plus que moi et mes pensées. Qu'est-ce qui m'avait pris au juste ? Foncer comme ça, sans réfléchir, dans la tempête, sans aucun moyen de me repérer ? Parce que, même si j'étais restée dans ce centre commercial, même si j'avais dormi jusqu'à ce que le jour se lève, même si j'avais attendu la tempête passe, même si les ressources que j'avais trouvées auraient pu me suffire pendant plusieurs jours, combien de temps aurai-je survécu, non pas physiquement, mais mentalement ? Combien de temps cela aurait-il mis, avait que je devienne complètement folle ?

Un tas de sentiments contradictoires se bousculaient en moi. La tempête et les débris qu'elle emportait de frappaient de plein fouet et chaque minuscule parcelle de mon corps me faisait souffrir. La chaleur insoutenable me donnait des vertiges et je voyais de plus en plus flou. Je serrais les dents en essayant de rester debout. Mais c'était trop, beaucoup trop. Alors, pour la énième fois depuis que je tentais de survivre, depuis que tout le confort de mon ancienne vie n'était plus qu'un souvenir et depuis que j'avais tout perdu, je perdis connaissance et m'affalai par terre.

Je ne voyais plus qu'un écran noir, calme. Je n'entendais plus rien. Le bruit assourdissant avait peut-être finalement eu raison de mes tympans. Mais je ressentais toujours l'atmosphère autour de moi. Je m'imaginais sortant de mon corps, trop douloureux à supporter pour une jeune fille de mon âge. J'allais sûrement mourir. Cette pensée fit chemin dans mon esprit avec un calme effrayant. La vérité était que, si la mort me permettait d'échapper à cette solitude, j'étais prête à l'accueillir à bras ouverts.



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