Partie 1 - Où allez-vous jeune dame?

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Il est 22h. Meli est couchée sur le banc d'attente de la gare d'autocars, son foulard cache son visage. C'est la gare de bus la plus professionnelle du pays, le genre de bus qui est juste utilisé par les grands hommes de la place. Puis tout à coup, un jeune homme la réveille en la secouant délicatement l'épaule.

HOMME 1: Mademoiselle, mademoiselle, réveillez-vous.

Meli ouvre les yeux avec un peu de rage. Elle déteste que l'on dérange son sommeil.

MELI: Qu'est-ce qu'il y'a Monsieur?
HOMME 1: Je pense que vous attendez le même bus que moi. Il est prêt à partir.
MELI: Pas besoin de me réveiller. J'avais mis un réveil. Tsuipp.
HOMME 1: Oh désolé je ne savais pas. J'ai cru que...
MELI: J'hais qu'on me réveille! Vraiment. Ne dérangez pas souvent les gens ein...

Le monsieur se lève.

HOMME 1: Vraiment désolé alors de vous avoir réveillé. Je vais embarquer. Bonne nuit.

Elle sourit et se lève aussi à son tour, pour se mettre derrière le monsieur dans la file d'attente pour l'embarquement. Puis , doucement, elle lui dit:

MELI: Merci de m'avoir réveillé jeune homme.
HOMME 1 (souriant à tour ) : vous n'avez pas de réveil ein.
MELI: Qu'est-ce qui vous fait penser ça ?
HOMME 1: Le bus part dans 10min. Je vois que vous êtes une femme intelligente. Si vous aviez mis un réveil , il aurait sonné depuis une quinzaine de minutes. Mais la, toujours rien.
MELI (souriant): hum
HOMME 1: Ou allez-vous?
MELI: Vous etes bien gentils de m'avoir réveillé et de me considérer intelligente, mais vous n'avez pas besoin de savoir où je m'en vais.

Puis Meli aperçoit un homme âgé. C'est l'un de ses oncles et il s'adresse aux chauffeurs qui aident les gens à embarquer. Elle se cache et s'agrippe derrière l'épaule du jeune homme avec qui elle parlait.

HOMME 1: Tout va bien?
MELI: Oui oui
HOMME 1(il remarque le monsieur dont elle essaye de se cacher): C'est qui?
MELI: Un dragueur là. J'ai l'impression qu'il me poursuit depuis mon dernier bus. Je ne veux pas qu'il me reconnaisse.
HOMME 1: Ok, je vous couvre, n'ayez pas peur.

Ils se rapprochent du chauffeur qui les embarque. Meli mets des lunettes de soleil et attache rapidement un foulard sur sa tête, de sorte à devenir méconnaissable.

CHAUFFEUR: Bonjour Monsieur, votre billet d'embarquement svp.
HOMME 1: Le voici, je suis avec ma femme.
CHAUFFEUR: elle a son billet?
HOMME 1: Chérie, donne ton billet.
Meli tend le billet.

CHAUFFEUR: Vous pouvez enlever vos lunettes madame, c'est la nuit ein.
HOMME 1: Haha, elle a sommeil et s'apprête à dormir dans le bus.

Meli garde la tête courbée, le chauffeur leur fait signe de monter dans le bus. Ils montent les marches, lorsque son oncle demande au chauffeur de les interpeller, les trouvant suspects. Le chauffeur crie: "Monsieur! Revenez un peu ici avec madame.". Le jeune homme fait signe à Meli de continuer à monter et d'aller s'asseoir. Il la rassure qu'il gère tout.

HOMME 1: Oui Monsieur.
CHAUFFEUR: Elle est ou votre femme? Elle s'appelle comment?
HOMME 1 (hésitant): mmm elle s'appelle Lema. Pourquoi?
CHAUFFEUR: Aaahn ok, le monsieur ici cherche une de ses filles, qui aurait fui de la maison il y a 2 jours. Auriez-vous apercu une fille qui s'appelle Meli?
HOMME 1: mmm non, ça ne me dit rien. L'ONCLE DE MELI: Pardon, elle devrait être entrain d'aller à Douala. Je cherche mon enfant, elle n'est pas en sécurité seule là dehors. Elle est bien en forme, d'un teint noir chocolat comme ça, avec de courts cheveux Afro. Si vous la trouvez à Douala, appelez-moi. Vvoici mon numéro de téléphone. Elle s'appelle Meli. On a déjà trop souffert.
HOMME 1: D'accord tonton.
L'ONCLE DE MELI: Quel est ton nom mon fils?
HOMME 1: Sofi, Sofi Kang.
L'ONCLE DE MELI (étonné): Incroyable! Es-tu le fils du grand notable Kang, du village Bazou?
Le CHAUFFEUR: Vraiment désolé Messieurs, mais je dois partir. On est déjà en retard. Tu as pris son numéro non? Vous allez discuter après. Monte maintenant.
SOFI (rapidement): Oui, je suis son fils. Je vous appelle si je trouve votre fille.

Sofi Kang était le nom du jeune homme qui s'adressait à Meli. C'était le petit fils du grand notable Kang, et non son fils direct. Ses parents avaient quitté le pays alors qu'il n'avait que 7 ans. Ils s'étaient rendus au pays de Gaules, alors que son père avait obtenu une opportunité dans une banque par l'intermédiaire d'un de ses amis. Il pensait que c'était un poste à la hauteur de son doctorat en mathématiques mais fut étonné à son arrivée lorsqu'on lui appris que ça n'était rien d'autre que du service à la clientèle. Son égo ne supporta pas. Quelques mois après, il quitta et ouvra sa propre maison d'art. Au delà de ses études, c'était un collectionneur d'art Africain, passion qu'il avait hérité de son père notable. Par contre, la mère de Sofi avait un succès fou dans le milieu du business français, alors qu'elle avait réussi à se tailler une place de choix au sein d'une grande firme d'architectes. Ce qui n'avait jamais vraiment intimidé son mari. Ce dernier disait toujours à ses confrères qui lançaient des blagues déplacées: « Oui, ma femme, est une lionne capable de dévorer 5 loups, à elle seule, en un seul coup, là dehors, mais elle est un chat à la maison et me laisse ma place de lion lorsque nous sommes ensemble. Êtes vous sûrs que vos femmes vous laissent vos places de lion comme la mienne? J'en doute fort! »
Doma avait fait des études de médecine, en gynécologie et était de retour en Afrique, de façon définitive pour révolutionner la pratique de la gynécologie en Afrique, au mieux de ses compétences. Il était habitué à ce que les gens le reconnaissent à l'annonce de son nom Kang. Son grand-père, âgé de 76 ans, était en effet un monsieur très respecté dans le pays et un collectionneur d'art. Il détenait un musée qui regroupait certaines des pièces historiques les plus âgées de toute l'Afrique entière, des pièces que la famille Kang avait réussi miraculeusement à protéger du pillage sale effectué par les occidentaux durant la période coloniale. Pour cela, toute l'Afrique entière le considérait comme un monument pleinement vivant et il bénéficiait ainsi d'une protection spéciale du gouvernement. Il fournissait d'ailleurs certaines œuvres d'art à son fils en France qui s'était enfin résolu à suivre ses traces après maintes hésitations.

Sofi monta dans le bus et se mit à chercher la jeune fille à qui il parlait, mais il ne la trouvait nulle part. Le chauffeur lui demanda si il avait perdu quelque chose. Il ne pouvait pas cependant lui dire qu'il cherchait celle qu'il lui avait présenté comme sa « femme ». Il répondît par la négative et alla s'asseoir sur son siège, se disant qu'il allait la remarquer à l'arrivée, le lendemain. Il regarda à nouveau le papier que le monsieur lui avait remis avec son numéro dessus. Il était écrit dessus « Je recherche ma fille, Meli. ». Il se demandait: « Pourquoi se cachait-elle alors? Si ça n'était pas elle que le Monsieur recherchait? Elle ne ressemble pas à la fille dont le monsieur me décrivait. Elle est très brune et non noir-chocolat». Puis il s'endormit.

A l'aube le lendemain, aux alentours de 5h, le bus était arrivé à Douala, à Bonapriso. Sofi avait dormi durant tout le long du voyage. En se levant de son siège, il vit un papier à ses pieds qu'il n'avait pas remarqué la nuit. Sur le papier était écrit:

« Merci de m'avoir aidé. Mais vous n'avez vraiment pas besoin de savoir où je vais. Et vous n'aviez surtout pas besoin de leur dire que j'étais votre femme! Meli. »

Ses mains se mirent à trembler délicatement. Le nom de la fille sur le papier remis par le Monsieur était aussi le même que sur le message laissé. Il était maintenant sûr qu'il avait bien parlé à la fille du monsieur! Et maintenant, elle lui avait glissé dans les mains.

Il s'empressa de sortir du bus pour voir si il la reconnaîtrait parmi les gens qui sortaient. Mais il ne la reconnut nulle part. Il alla demander au chauffeur si ce dernier avait vu celle avec qui il était entré dans le bus et lui avoua que ca n'était pas sa femme, mais une fille qu'il essayait de draguer. Le chauffeur lui dit qu'il y avait 2 arrêts à Douala et que plusieurs personnes étaient sortis à New Bell avant, « Mais je ne regarde pas les visages des gens qui sortent du bus mon ami! Si tu n'as pas pris son numéro, bonne chance! »

Sofi se tapa le front en se disant: "Cette fille est vraiment maline. Comment ai-je pu la laisser s'en aller ?"  Puis, il plia le papier qu'elle lui avait laissé et le garda dans sa pochette, se disant qu'il la retrouverait bien un jour.

• FIN DE LA 1ère PARTIE•

Le fagot de bois et la dot AfricaineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant