Désadorer l'adoré

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« Teddy ! »

Il se retourna. Juste à temps pour réceptionner Victoire contre son torse, ses mains dans ses cheveux et ses lèvres contre les siennes. Elle s'accrochait à lui avec la force du désespoir. Ses larmes rendaient leur baiser salé. Il verrouilla ses bras autour de sa taille pour l'empêcher de partir, abasourdi par la passion qu'elle lui transmettait. C'était comme si sa vie n'avait menée qu'à cet instant où Victoire choisissait Teddy. Et lorsqu'il la sentit sourire, tout contre ses lèvres, il perdit pied, se rattachant à la bouée de sauvetage qu'elle lui offrait. Il passa une main sous son tee-shirt, jubilant de retrouver les mêmes sensations que cinq mois plus tôt, le soir du bal. A l'exception que cette fois-ci, il saisirait sa chance.

Teddy s'éloigna d'elle, et se plongea dans ses yeux humides mais plissés par son sourire. Et il se surprit dans un rire joyeux, serein, sincère qu'il ne s'était jamais entendu.

>>o<<

Junie titubait sur le chemin qui traversait le domaine. Elle tentait vainement de fixer son regard et de garder un minimum de grâce dans sa démarche mais c'était peine perdue. Elle ne savait pas ce que Thomas lui avait donné à boire. Il avait toujours un don pour trouver des hydromels et pour les faire passer à l'intérieur de l'Académie à l'insu des adultes. Cette fois ci, il l'avait mis dans une bouteille de jus d'orange et en avait servi à toute la tablée. Junie, ne sentant pas les effets s'était resservie plusieurs fois, en riant.

Bien que très joyeuse, elle était restée lucide un moment d'ailleurs, mais en remontant dans sa chambre, les effets avaient commencé à l'abrutir, durablement. Elle se souvenait avait envoyé un hibou. Plusieurs en fait. Elle se souvenait avoir ri seule comme une folle et elle se souvenait avoir pleurer dans son lit, roulée en boule. Elle devait avoir une tête épouvantable. Junie ne savait pas comment elle avait fait pour sortir du Pavillon sans être prise par les Maitres. Sans doute étaient-ils allés profiter de leur vendredi soir, eux aussi. Elle sentait à peine le vent frais s'engouffrer sous son débardeur de pyjama et son short et le gravier du chemin écorcher la plante de ses pieds. C'était comme si le brouillard avait envahi tous ses sens.

Elle arriva enfin devant la ferme où elle avait rêvé de se rendre pendant de nombreux mois. Elle frappa de toutes ses forces longuement. Mais personne ne lui répondait.

« ALEXANDRE ! » Hurla-t-elle, hors d'elle.

Il devait se tenir derrière la porte car aussitôt, il sortit et la tira à l'intérieur.

« Tu es folle ?! » cria-t-il à son tour en refermant la porte. « Tu veux que je me fasse renvoyer ?! C'est quoi ce cirque ? Et tes lettres ? » Il la fixa de son regard sévère de professeur en gardant ses distances. « Tu as bu ?

- Non » pouffa-t-elle.

Soufflant, il entra dans une pièce adjacente au couloir, la laissant seule. Elle se sentait très mal. Elle n'arrivait pas à fixer son regard, à détailler les lieux. Et de toute manière, le sol valsait bien trop à son gout. Il l'appela de la pièce d'où filtrait une lumière mais elle ne voulait pas le rejoindre. Elle avait mal à la tête. Il l'appela une nouvelle fois, passant la tête dans l'embrasure de la porte et Junie sentit son estomac se contracter violemment. Elle eut juste le temps de plaquer une main sur sa bouche, les lèvres sellées, mais elle étouffait. Il la traina à travers l'appartement et dès qu'elle vit les toilettes, Junie s'y jeta et vomit sous les yeux de l'homme qu'elle voulait séduire. Les mains posées sur la cuvette, haletant, elle se sentait mieux. Mais elle ne voulait pas lever les yeux, priant pour qu'elle soit dans son lit en train de faire un cauchemar.

Son professeur s'approcha, soulevant quelques mèches de cheveux et lui demanda si ça allait, le rouleau de papier toilette dans la main. Elle ne répondit pas. Morte de honte, elle remit au maximum un coup de frais dans sa tenue grâce à sa baguette. Il l'attendait les bras croisés, appuyé nonchalamment sur le mur du couloir. Elle n'osa toujours pas le regarder.

You belong with me and I can't go without youOù les histoires vivent. Découvrez maintenant