Chapitre 4

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Et puis qui sait, peut être que ça ne sera pas si ennuyant, de vivre avec Iron Man à longueur de journée.

Un gros soupir détourne l'attention de Julia sur ses pensées – ouf, Tony est encore vivant. Il se redresse tant bien que mal, se tenant l'épaule.

-Vous avez intérêt à m'apprendre ce truc.

-Vous êtes sûr ? Parce que ça inclurait que je vous refasse une démonstration.

Un faible sourire se dessine sur les lèvres du milliardaire :

-On verra ça plus tard alors. Apportez moi un café.

C'est au tour de Julia de soupirer maintenant

-Je ne suis pas une stagiaire vous savez.

-Vous êtes dans un espace de travail que vous ne connaissez pas pour une durée temporaire, et vous allez bien finir par retenir quelque chose à force de me voir travailler tous les jours. Donc si, vous êtes une stagiaire. Vous devriez déjà être contente, on a pas de photocopieuse !

-...

-Café ?

Julia lui adresse un regard noir, puis se lève. Non, décidément, cette punition ne présente aucun bon côté.

-Je suppose que la machine la plus proche est celle de l'étage du dessus ?

-Voyons, je ne vais pas prendre mon café à la machine, je suis milliardaire ! Il y a une petite cuisine au bout du couloir, débrouillez vous.

Il la prend de haut, elle prend sur elle. Pourtant c'est une des choses qu'elle hait le plus chez les êtres humains, ce genre de comportement. Enfin, chez les aliens aussi probablement, bien qu'elle n'ai jamais eu la chance ou le malheur d'en rencontrer elle même.

Sans un mot de plus, elle se dirige vers la porte.

Qu'elle franchit.

Et qui se referme brusquement derrière elle.

-J'y crois pas! Ce c*****d !

Un froncement de sourcils, un soupir puis un sourire se suivent sur son visage, et elle disparait dans la cuisine.

Elle a un plan.

Pendant ce temps, à l'intérieur du labo, Tony s'est assis sur la chaise qu'a quittée l'espionne. Il se doute bien qu'elle finira par rentrer, mais il a besoin d'être seul un moment. De faire le point.

-Je crois que j'aimerais bien un peu de musique, Friday.

-Voulez vous que je lance l'Harmoniseur?

-Hm, pourquoi pas.

C'était une de ses créations, vieille de quelques mois déjà - un simple programme, enfin un algorithme plutôt. C'est Pepper qui avait trouvé son nom - c'est elle aussi qui avait inspiré sa création.

Le train de pensées de Tony était parfois compliqué à saisir, et ses émotions presque insondables. Communiquer avec les autres, même les proches, lorsque l'on ne maitrise plus ses pensées, est plus que difficile - impossible en fait. C'est ce qu'elle lui reprochait parfois.

Il avait trouvé la solution à ce problème dans la musique. L'Harmoniseur analysait ses émotions, les souvenirs et les idées qui le préoccupaient. Puis il trouvait des musiques dont les paroles s'accordaient, s'harmonisaient parfaitement avec son humeur, permettant à Tony de se comprendre et de se calmer plus facilement.

Il avait utilisé le logiciel de nombreuses fois maintenant, et celui ci, dirigé par Friday, était désormais capable de trouver des similitudes même très légères, subtiles ou imagées.

Au début, il ressortait principalement des titres de rock, qui à défaut de toujours être de mise avaient au moins l'avantage de correspondre aux goûts du milliardaire. Mais petit à petit, les styles s'étaient diversifiés. Tony s'était ainsi surpris à apprécier plusieurs titres de pop moderne, voir du reggae, et même quelques chansons d'amour.

-Alors Friday? Le résultat du jour?

-Viva La Vida de Coldplay. Voulez vous connaitre le taux de correspondance Monsieur?

Le titre ne lui disait rien, ni l'auteur. Peut être de l'italien.

-Non, ça ira. Lance la juste.

La mélodie envahit la pièce - en se retournant vers l'écran le plus proche, Tony peut voir les paroles défiler.

Et il réalise à quel point son I.A a progressé.

Dès les premières phrases, il comprend et voit les similitudes entre le chanteur et lui. Un roi, un génie, un super héros, on en revient au même.

Il était entouré, il était aimé. Et maintenant il se sent si seul. Il commandait tout, depuis la mort de son père. Les gens l'adoraient. Puis l'Afghanistan, les murs refermés sur lui. Son empire budgétaire qui reposait sur la mort et la destruction. Il s'était habitué à vivre au milieu des mensonges jusqu'à ne plus les voir.

Et puis il était devenu Iron Man. C'était son armure qui explosait les fenêtres et lui ouvrait les portes. Les Avengers. Les combats, et leurs tambours. Le danger. Il avait perdu beaucoup.

Il avait eu peur, oui. Imaginé et vu ses amis mourir sous ses yeux, le lui reprocher. Il avait voulu empêcher ça. Il avait vu le danger et la mort venir.

Il avait voulu créer quelque chose qui lui ressemble - un miroir.

Quelque chose qui puisse se battre à ses côtés - une épée.

Quelque chose qui puisse les protéger - un bouclier.

Ultron. Vision.

Et malgré le bien qu'il s'efforçait de faire, les gens ont commencé à se concentrer sur la destruction qu'il engendrait à nouveau. La Sokovie avait tout fait basculer, et l'équilibre fragile qu'il entretenait avait disparu.

Puis son opposition avec Steve. Il culpabilisait déjà, il cherchait à limiter les dégâts, à aider les autres, les étudiants. Il voulait réparer ses erreur. En empêcher d'autres d'arriver. Les limiter. Mais le Cap avait refusé les accords. Une révolution interne. Il lui en avait voulu. Il avait appris des choses qu'il aurait peut être préféré ignorer.

Il s'était fait maitrisé par les événements, sans aucun contrôle ni réel choix à faire. Une marionnette. Qui voudrais être ce genre de super héros?

Et il avait trouvé Peter, au milieu de cet enfer. Un espoir de rendre le monde meilleur, petit bout par petit bout. Quartier par quartier. Il le trouvait doué ce gosse, prometteur. Il avait voulu le protéger du danger, le former. En faire un grand super héros.

Une sorte de mini lui - un miroir.

Un allié - une épée.

Un protecteur - un bouclier.

Et il était sur la bonne voie cette fois. Mais il savait que Peter ne l'appellerait pas avant un bon moment. Il était occupé, ce super héros de quartier.

Tony revient peu à peu à la réalité, au fur et à mesure que la musique se termine. Oui, il a menti. Oui, il a fait des choses dont il est loin d'être fier. Mais c'était quand il dirigeait le monde.





La musique s'est arrêtée, tout doucement. Une larme solitaire termine sa course le long de la mâchoire de Tony. Il reste silencieux, respirant doucement.

Une grande inspiration. Il se lève, et efface la trace salée de sa joue. Au moins, ce n'est plus de l'angoisse qu'il ressent.

C'est du manque.

Du manque des Avengers. Du manque du travail d'équipe. Du manque de leurs amitiés. Du manque de leurs disputes même. Du manque d'amour. Du manque de Pepper.

Et en cet instant, il se sent si seul.

The Broken OnesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant