8. Niais et pantois

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LOCHAN


Je n'arrive toujours pas à croire que j'ai tenté d'embrasser Isaac. Il était si près, et je ne pouvais pas me contrôler. J'ignore ce qu'il m'est passé par la tête, en cette fraction de seconde, la même fraction de seconde où je reçus le poing d'Isaac en pleine face.

Je l'avais mérité. Amplement.

Il m'évitait, évidemment. Je l'attendais chaque jour de la semaine à la sortie du lycée. Il prévoyait ses esquives, toujours plus rapide que moi. Lyderic me demandait sans cesse ce qui n'allait pas. Il n'était pas mon frère pour rien, il savait tout sur moi, il lisait tout chez moi. Mes cernes lui prouvaient que j'étais fatigué, et mon humeur désagréable en disait bien plus long qu'un long discours.

Puis on a eu cette discussion, entre frères, qui m'a ouvert les yeux.

«Tu ne comptes pas me dire ce qu'il te dérange ?

-Non, soufflais-je en débarrassant ma tasse »

Il suivait mes gestes en fronçant les sourcils. Je savais qu'il ne lâcherait pas. Alors, je l'ai regardé droit dans les yeux pour les faire parler à ma place, lui faisant comprendre que je ne pouvais pas en parler. Il semblait rêveur, méditer un temps pour comprendre ou chercher que répondre.

Après un moment, il se leva de la chaise sur laquelle il reposait et, à mon plus grand étonnement, me serra dans ses bras.

«Quoi que t'ai fait, quoi que tu caches, je serais toujours ton frère et j'assurerais toujours tes arrières. »


JAKE


«Monsieur Gross, voilà un moment que je comptais mettre la main sur vous et vous me rendez la tâche bien plus facile...»

Je sentais mes muscles s'embraser et ma mâchoire se contracter. Je n'écoutais que d'une oreille ce qu'il débitait. Je ne voulais pas jouer.

«Ton ami Tommy sera renvoyé pour un long moment...

-Ce n'est pas mon ami, marmonnais-je.

-En conséquence, je ne sais pas encore ce que je vais faire de toi.»

J'observais ses mains tapoter énergiquement son bureau. Il se balançait sur sa chaise, comme un enfant.

«Ecoute, je...

-Pourquoi tu t'es battu, fils ?»

Je roulais les yeux.

«Monsieur le directeur, puis-je dégager de votre bureau ? Faites ce que vous voulez en ce qui concerne la punition, je m'en fous.

-Jake, arrête de te comporter comme ça.

-Comme quoi ? M'énervais-je, Comme un fils en colère ?

-Non. Comme un gamin qui fout sa vie en l'air.»

Mon élan pour sortir de son bureau se mit en suspend.

«Alors comporte toi comme un père décent qui ne baise pas les adolescentes, Dave.»

J'ignorais ce qu'il me répondit pour sa défense et quittait son bureau en claquant la porte. Je tombais nez à nez avec Aveline, qui m'attendait sur une chaise en tapant du pieds nerveusement.

«Toi.»

Il ne manquait plus qu'elle sérieusement.

Elle se remit sur ses jambes en collant son corps contre le mien. Je sentis ses mains encercler mon dos.

«Qu'est-ce que tu...

-Je te fais un câlin, répondit-elle instantanément.»

Je restais droit, en regardant aux alentours si l'on pouvait voir cette scène relativement...étrange. Mes mains hésitaient, puis ma colère n'étant toujours pas dissipée, je me dégageais.

«Je ne me suis pas battu pour toi, l'informais-je afin d'être clair sur l'incident.

-Tes yeux aux myriades de couleurs se troublent quand tu mens, me dit-elle en souriant. »

Aux myriades de couleurs ?

«Rentre chez toi, Aveline.»

J'entends des bruits de pas résonner et s'approcher. Je me retourne en sentant Aveline faire de même. Les bruits s'arrêtent.

C'est un homme, grand, raide tel un piquet, la mâchoire contractée et les yeux qui me lancent des éclairs qui se tient devant nous. Il n'a vraiment pas l'air très désagréable à regarder, mais il a l'air d'être un con. Sa posture, son visage, tout porte à croire qu'il se rend parfaitement compte du fait que sa beauté ne laisse pas les gens indifférents.

Je me colle contre la paroi du couloir en pensant que je lui coupais le passage, mais au lieu de passer, il se contente de rajuster son blazer, pendant que je remarque qu'il s'empare des mains d'Aveline.

J'ouvre la bouche de stupéfaction et il colle la sienne contre ses lèvres.

HétérochromieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant