Chapitre XI

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PDV DongHae 

Je me racle la gorge encore une fois. Maître Shim ChangMin, notre avocat et aussi ami de mon père, a eu bien raison d'être si confiant. Alors que le juge tape avec son marteau pour annoncer la fin de la séance, j'ai encore du mal à réaliser tout ce qu'il vient de se passer.

Mes bourreaux ont été jugés coupables pour coups et blessures et violation de vie privée, ce dont je n'étais pas au courant avant d'avoir vu les publications qu'ils ont faites sur mes comptes sur les réseaux sociaux. Et je comprends maintenant parfaitement pourquoi ils ont été fermés par mes proches. Puis toujours sans que je me rende vraiment compte de ce qu'il se passe, mon père me sert dans ses bras.

_ C'est fini maintenant. Tout est fini, me dit-il.

Et c'est vraiment agréable de le sentir contre et avec moi. Parce que je ne sais pas ce que j'aurais fait sans lui. Je ne sais pas ce qu'il aurait pu se passer s'il avait réagi aussi négativement que ma mère ; je n'ose même pas l'imaginer.

Il se détache de moi et du coin de l'œil, je les vois tous, sur les bancs de l'autre côté de la salle. Choi Siwon, Kim YoungWoon, Park JungSu. Cachés derrière leurs père et avocat, ils sont pourtant loin d'être vraiment intéressés par ce qu'il se passe, comme si toute cette histoire leur importait peu. Parce que c'est le cas. À quoi bon se mouiller et plaider coupables alors qu'ils ont simplement été élevés comme ça ? Et plus loin derrière, leur mère mais également la mienne avec le visage aussi impassible que d'habitude. Et ça me fait mal de la voir de ce côté de la salle. Parce qu'elle préfère venir épauler ses amies que son propre fils.

Les pères et leurs avocats se dirigent les premiers vers la sortie et en passant près de nous, j'entends clairement ce que l'un d'eux, qui a un poste très élevé dans la société où travaille également mon père, nous dit.

_ On se reverra bientôt mais ne comptez pas vous en tirer aussi facilement.

_ C'est ce qu'on verra, lui répond ChangMin.

Et ils sortent, suivis de leur fils qui, même sans avoir besoin de sourire ou de me regarder,

semblent à nouveau me mettre plus bas que terre. Est-ce que ça me fait plaisir de les voir payer 60 000 000 de Wons à cause de ce qu'ils m'ont fait ? Je ne sais pas. Je m'en fiche en fait. Je ne cours pas après l'argent, ce n'est pas ce dont j'ai envie de leur part. Je ne veux pas de fausses excuses non plus. Je veux juste qu'ils me foutent la paix, qu'ils nous foutent la paix.

Les femmes suivent le mouvement et dans le lot, ma mère qui évite soigneusement tout contact, même visuel, avec nous. Et c'en est trop. Je me fiche d'avoir perdu les gens que j'aurais dû supporter toute ma vie, je me fiche d'avoir changé de lycée, je me fiche de savoir que je les dégoûte mais je veux recevoir un minimum de soutien de la part de ma mère. Je ne demande pas un sourire, ni même un mot gentil, je veux juste qu'elle me regarde, qu'elle me donne ne serait-ce qu'une seconde d'attention.

Je sors des bancs à mon tour et me dirige vers elle en l'appelant par le nom que je lui ai toujours donné : Maman. Et après plusieurs essais, elle se tourne enfin vers moi mais de par son regard, je sais qu'elle a juste envie que je disparaisse de sa vue.

_ Arrêtez de m'appeler Maman. Je ne suis la mère de personne, je n'ai pas d'enfant.

Ses mots me putréfient, me glacent les muscles et il m'est impossible de faire le moindre geste. Une énorme boule vient se loger dans ma gorge, ne voulant pas partir. C'est une lance plantée en plein cœur, la sensation de n'être rien, moins que rien, même pas un microbe. Mort avant même d'être né.

« Je n'ai pas d'enfant. » Je n'existe pas, plus, ne pourrais jamais rien faire pour qu'elle me reconnaisse un jour. Et ce qui me brise, c'est que je n'aurais même pas à essayer : c'est l'échec avant même de s'imaginer participer.

_ Espèce de sale connasse ! Que ça vous plaise ou non, DongHae est et sera toujours une partie de vous et vous ne pourrez jamais oublier le jour où vous l'avez mis au monde. Je ne comprends même pas comment il peut avoir encore envie de vous approcher alors que vous l'avez renié. Vous n'êtes qu'une...

_ JaeJoong, ça suffit !

_ Viens DongHae, viens t'asseoir.

J'ai l'impression de suivre cette scène en étant hors de mon corps. Je me laisse emporter par HyukJae qui me fait m'asseoir sur un des bancs, dos à ma mère, mon père et JaeJoong.

_ Ne pleure pas DongHae.

Mais je suis incapable de retenir mes larmes. Parce que j'ai mal au cœur, j'ai mal au plus profond de moi.

_ Je suis désolé mon ange, tu ne mérites pas tout ça.

Je sens ses bras venir enlacer mes épaules, me collant contre lui et ça me fait du bien. Ça me soulage de savoir qu'il est là et que je peux me laisser aller dans ses bras, pleurer contre lui et sentir ses mains me caresser le dos et la nuque.

_ Je suis tellement désolé pour tout ça, me chuchote-t-il. Tu mérites d'être le plus heureux du monde et je te promets que tu le seras.

_ Arrête de pleurer mon chat.

Je sens JaeJoong coller son torse contre mon dos et m'enlacer et ça me fait sourire. Oui, malgré mes pleurs, j'arrive à sourire parce que je sais qu'ils sont là pour moi. Que même s'ils n'étaient pas liés à moi au départ, ils forment ma famille. Et ça me rend un peu plus joyeux. Je me détache d'eux, essuie mes joues et vois qu'ils me sourient d'une façon si gentille et si tendre que j'ai l'impression de n'être qu'un petit enfant pendant une seconde. Je lève alors un peu plus les yeux et vois mon père discuter avec ChangMin puis se tourner vers moi avec le même sourire.

_ On rentre à la maison ? Nous lance-t-il.

Et on hoche tous la tête, contents de pouvoir enfin sortir de cette salle. On se lève et je sens aussitôt mes deux mains prises dans celle de mon petit ami et de mon beau-père. Nous sortons enfin de ce tribunal, mon père et ChangMin devant nous, mais je m'arrête de marcher lorsque je remarque ma mère qui, près du parking, nous regarde. Ses yeux sont posés sur nous, nous fixent, nous suivent et, même de loin, je sais qu'il n'y a rien de bienveillant qui émane de son être.

Et je ressens la colère qui arrive, qui monte en moi, s'intensifiant rapidement. Une haine envers ma propre mère, cette femme qui, même si elle m'a donné la vie, ne me considère plus comme faisant partie de la sienne. Alors pourquoi lui donnerai-je encore une partie de la mienne ? Elle me déteste, pourquoi ne pas lui rendre ce sentiment ? Pourquoi continuer à l'aimer indéfiniment, éperdument, mais inutilement ? Il faut que j'arrête de prendre sa défense, que j'arrête de croire qu'il est encore temps, qu'un changement est toujours possible. Elle ne reviendra jamais vers moi, elle n'aura jamais à nouveau ne serait-ce qu'un infime sentiment de protection et d'amour envers moi.

Désormais, c'est fini : si elle n'a plus de fils alors je n'aurais plus de mère. 

Tel père, tel filsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant