A nous deux

7 2 0
                                    

A nous deux. A nos trois ans de haine et d'amour. A mon verre de whisky au soir, a mon haleine de tabac froid au petit matin. A ta langue lourde de fatigue quand tes paupières te tombaient sur les pommettes, à ton poing serré contre mon torse quand tu pleurais dans mon cou. A nos larmes versées, à nos fous rires échangés, à nos rêves partagés, à nous cauchemars endurés. Aux mots d'amours qu'on s'est chuchotés, aux saloperies qu'on s'est hurlés. A notre fille Julia, a notre fils Victor, à nôtre labrador au poil long et à notre maison au bord de la mer. Bref à tous ces objectifs, tous ces rêves d'enfants qu'on a laissé se perdre quelque part dans un coin lointain et brumeux de notre imaginaire. A toutes les fois ou tu m'as dis « Je te déteste » et à toutes les fois ou tu m'as dis « je t'aime plus que tout », à toutes les fois ou tu m'as « t'es qu'un monstre » et à toutes les fois ou tu m'as dis « t'es le meilleur ». A toutes les fois ou je t'ai dis « je te hais de tout mon cœur » et toutes les fois ou je t'ai dis « t'es la seule que j'aime », à toutes les fois ou je t'ai dis « t'es qu'une sale pute » et à toutes les fois ou je t'ai dis « t'es la plus belle merveille de ce monde ». A ton grand front, a ton grain de beauté sur le gros orteille, à tes cicatrices au bas du dos, à ton nombril gonflé et aux tâches à côté de ta pupille gauche, à tes yeux rieurs, à tes lèvres pulpeuse, à tes sourcils frustrés, a ton menton boudeur, à ta poitrine généreuse, à tes petites fesses plates, à tes grandes jambes, à tes chevilles bien tracés. A mon t-hirt spiderman, à ma veste en cuir râpé, à mon pyjama en velour bleu, a toutes mes fringues que t'as portées. A notre premier regard, à notre premier étreinte, à notre premier baiser, à notre première déclaration, à notre premier verre, à notre première nuit d'amour, à notre première après-midi de baise, à notre première disputes, à notre première crise. Aux partis de cartes avec ma sœur, aux jeux vidéo avec tes frères, à ma rencontre avec ta mère et au premier diner avec mes parents. A notre week-end à la plage, à nos après-midi dans ta chambre , aux soirées au restaurant et aux nuits dans mon lit. A ton anniversaire, à halloween, à la saint-valentin et aux jours ordinaires qu'on transformait en occasion de se montrer qu'on s'aime. Au silence, aux promesses, aux cris et aux mots d'amour. A ton oui pour la vie et à notre adieu pour toujours.

A nous deux. A ce couple d'ados, qui aujourd'hui perdu dans un coin brumeux de notre imaginaire vivent dans une maison sur la plage qu'elle a dessiné et qu'il a construit. Tu connais cette plage, c'est celle ou il n'y ni touriste tartiné de crème solaire qui grille sur la sable, ni de marchand de bonbons ambulants qui couvre les cris de mouettes par des braillements assourdissent. C'est cette même plage ou la mer est rocheuse, ou le sable est parsemé de buissons. Parce que les rochers et les buissons c'est bien, c'est naturel, c'est sauvage. Et l'été alors que le ciel et bleu, la chaleur pesante et la mer plate et lisse, ils sortent de l'eau pour se planter dans le sable et observer, l'un dans les bras de l'autre, Julia et Victor se baigner avec leur labrador à poil long. Il restent là jusqu'au coucher du soleil qu'ils peuvent voir s'enfoncer dans la mer à l'horizon sous un panel de nuages aux couleurs rose, orange, violet et rouge. Puis l'hiver ils restent au lit. Elle porte son pyjama en velour bleu et son t-shirt spiderman, elle à le nez rouge, il y a des mouchoirs roulés en boule sur sa table de nuit. L'humidité est pesante. Le ciel est blanc, la mer grise. Prêt du crépitement des flemmes de leur cheminé, elle s'endort dans ses bras, bercé par le son de l'océan qui s'agite comme une machine à lavé, et le tapotement de la pluie qui se déchaine sur le toit de leur petite maison. Elle sert son poing sur son torse, elle a la langue alourdie de fatigue. Lui, il lui raconte une histoire dans un chaud murmure qu'il lui souffle dans l'oreille pour accompagner ses rêves. Ils s'endorment.

A euxdeux, santé.     

Sac de frappeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant