Vous êtes dans une nuit aussi épaisse que votre détresse actuelle. Il fait si sombre que vous trébuchez sur vos propres pieds alors que vos seuls ennemis sont derrières vous. Alors que vos yeux peinent à trouver une once de repaires au milieu de toute cette noirceur, vous continuez de courir en écrasant à moitié vos propres orteils. Pourtant, vous pourriez vous tordre la cheville sur chacunes des racines qui vous entoure. Vous en êtes bien conscient mais quitte à vous briser les articulations, autant trouver un abri d'abord.
C'est désormais l'instinct de survie qui parle, votre prudence n'est plus. Vos faibles bâtonnets coincés sur votre rétine oculaire essayent tant bien que mal de vous faire éviter les troncs et les branches. Ces derniers craquent sous vos pas, mais pas que les vôtres. Derrière vous, des pas lourds, puissants, se rapprochent. Ils deviennent de plus en plus distincts à mesure que vous perdez votre souffle. Leur martelement détruit votre sang froid, cette poursuite devient oppressante, comme si le poids de votre poursuivant venait broyer votre cœur afin de le faire battre plus vite. Au même rythme endiablé, votre souffle peine à trouver une cadence capable d'oxygèner vos muscles dans cet effort. Vous savez que vous ne tiendrez pas éternellement de cette manière... Il faut se cacher.
Alors que vous commencez à réfléchir à une idée, on vient vous attrapez le pied, vous déséquilibrant instantanément. Vous vous écrasez sur les branches, les pierres et les feuilles qui tapissent le sol dans un cri de surprise. La racine qui est responsable de votre chute vous retient encore la cheville, faisant penser à une main crochue de sorcière venant vous tirer dans les abysses. Malgré la douleur qui vous foudroie, seul l'instinct primitif domine. Dans un élan de courage vous arracher littéralement le bois tendre qui vous empêchait de bouger. Hélas, cette mésaventure vous aura fait perdre les quelques précieux mètres qui vous séparaient de la bête. Cette dernière rugit au loin vous faisant trembler de peur.
Vous avez le choix entre deux cachettes face à vous pour tenter en désespoir de cause de vous faire oublier. Il n'y a que 5 secondes pour vous décider.
La première est la plus difficile à atteindre : c'est se dissimuler derrière un épais arbre dans la pénombre, un chêne, plus précisément, qui vous tend les bras. Mais pour cela il faut se relever et courir malgré votre genoux en endoloris.
La seconde, moins coûteuse en effort, était de s'applatir dans les feuilles et s'en recouvrir partiellement afin de se fondre dans la pénombre. Évidemment, il serait impossible d'être complètement couvert, mais cela serait suffisant pour qu'on ne vous distingue pas dans la nuit.
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Vous avez 2 secondes pour décider
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La bête est bientôt là.
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Dans un éclair de génie, vous vous rappelez que le loup-garou qui vous poursuit est....Nyctalope....
Vous n'avez pas une piètre idée de ce que cela veut dire mais votre mère vous l'a souvent répété.
Cette idée est la dernière que vous avez car le temps presse .
Vous choisissez donc de vous enfouir dans les feuilles, la terre et les branches et d'attendre transit de peur que la bête arrive à votre niveau.
Alors que vous avez des petits morceaux de poussières qui vous encombrent le visage, vous entendez les lourdes pâtes de l'animal venir marteler le sol puis s'arrêter. Il est là, les yeux luisants d'une couleur lactascente surnaturelle. Le souffle puissant de l'animal pourrait balayer le sol entier de son tapis de mousse. Ses jambes humanoïdes couvertes de poils se sont arrêtées net.
Vous ne respirez plus. La terreur vous engourdit les entrailles et des acouphènes vous montent aux tympans. Ces instants sont insupportables. Le temps semble se figer. Mais quand il reprend, l'horreur arrive à son paroxysme.
Vous voyez la bête lever son museau dans la direction de votre cachette et votre cœur s'arrête en même temps que vous voyez les prunelles fluorescentes de l'animal vous transpercer l'âme.
Pourtant, un humain ne pourrait vous repérer dans ces ténèbres... C'est impossible ! Pour que ce loup vous ai vu il faudrait qu'il puisse voir dans la nuit ! Mais....
C'est alors que le loup se met à ricaner d'un air affreusement humain. De la bave vient s'écouler de ses fortes mâchoire et sa langue vient amoureusement lécher ses babines prêtes à déguster.
Votre sang se glace et tout espoir vous abandonne. Comble de misère, les griffes de sorcières vous retiennent désormais tout le corps, vous empêchant de tenter de vous mouvoir. Vous êtes donc condamnés à attendre que le loup vienne vous dévorer. La panique ne peut être plus forte : vous pleurez, vous vous débattez... Rien n'y fait, vous êtes toujours face à ce monstre cannibale.
Ce dernier sourit de ses dents jaunies et de la même voix aiguë que votre mère, il cite :
— Les loups-garous sont nyctalopes, ils ont la faculté de voir dans la pénombre ou pendant la nuit.
Sur ces paroles déroutantes vous plongeant dans un profond désespoir, le loup se jette vers vous, toutes dents dehors, impatients de vous déchiqueter entre ses crocs.
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Dans un hurlement qui réveilla tous les habitants de la maison, vous vous redressez en sursaut. Le corps plein de sueur et le poul d'une vélocité incroyable, vous vous asseyez sur le bord de votre lit, les larmes aux yeux.Pour en être sûr, vous tâter votre peau afin de vérifier que des traces de dents n'y ont pas été faites. Heureusement, à part le liquide chaud qui ruisselle de votre front et de vos aisselles, rien d'inhabituel n'est à signaler.
Ce n'était qu'un affreux cauchemar. Dans un soupir de soulagement, vous vous détendez légèrement. Cependant la noirceur de votre chambre n'est pas pour vous rassurer et ne participe pas à vous remettre de ce mauvais rêve. Vous vous jetez alors sur l'interrupteur de votre table de chevet.
Vous tombez alors nez à nez avec le fautif de cette aventure nocturne : le livre de fantastique que vous votre vous a recommandé votre chère mère et dont vous avez lu le début ce soir. Votre matrone a monté les escaliers en furie, inquiète d'avoir entendu un tel cri déchirer le silence de son sommeil. Elle ouvre votre porte à la volée, le visage tiré de fatigue et armée d'un couteau de cuisine.
— Que se passe-t-il ??? S'écrie-t-elle, les nerfs à bout. Pourquoi as-tu hurlé ???
Vous lâchez un rire nerveux, vengeance contre le loup-garous qui avait la voix de votre mère. Calmement, vous attrapez l'ouvrage traitant d'histoires surnaturelles et vous le tendez à votre mère qui ne comprend toujours pas. Mais après ce qu'elle vous a fait vivre, vous pouvez bien la faire mijoter un peu.
— Les histoires de loups-garous c'est pas pour moi. Vous lancez finalement dans un sourire humide.
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Sacré histoire ! Heureusement que ce n'était qu'un rêve ! On serait mort d'ignorance !Allez je vais aller dormir, la lumière des écrans ne suffit pas à me tenir éveillée et je ne vois rien dans cette pénombre. On est pas nyctalope nous !
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Sauvons nos mots
RandomL'appauvrissement de la langue est un phénomène qui s'aggrave de génération en génération. On donne le même sens à plusieurs mots différents, on en utilise 10 alors qu'un seul précis suffirait, on invente de nouveaux adjectifs, de nouvelles conjuga...