Prémices - Ecriture à quatre mains

Tandem

Hum... Un réveil, tout en douceur, contre un corps, chaud et moelleux, qui sent bon la vanille et le sable chaud... Oh ! Je délire un peu là. Ma main sur son ventre, je me souviens du début de matinée, de ce massage absolument magique. Et j'en avais bien besoin ! Quelle idée aussi de se lever à trois heures du matin pour bosser sur ce nouveau projet... Enfin, le soleil est bien levé maintenant et ma masseuse de choc dort toujours. Je souris en détaillant son visage, les courbes de son petit nez, de sa mâchoire... tout cela m'amenant sur ses lèvres, fines et douces. J'ai terriblement envie d'éprouver encore une fois leur douceur. Mais je ne veux pas la réveiller. Elle a fait une longue route cette nuit pour me rejoindre, après ce séminaire professionnel. C'est fou quand même... Qui aurait crû à une telle rencontre, il y a quelques mois ? Certainement pas moi ! Et pourtant, je me souviens de ce matin d'avril... Je ferme les yeux et je rejoue la scène.

Une petite balade matinale sur mon vieux vélo rouge : voilà de quoi recharger mes batteries ! Un moment de liberté, un instant de tranquillité dans cette société toujours speedée. Un rayon de soleil réchauffe mon corps déjà hâlé. Nous sommes dans le Sud, le moindre rayon de soleil et je teinte !

La température n'est pas encore trop élevée. Ce sera une belle journée de printemps comme je les aime. Une petite route isolée, un étroit chemin de terre, près d'un joli lac. L'effort m'a donné chaud, j'en ferais bien le tour, histoire de profiter de sa fraîcheur. J'avise les bancs qui, de loin en loin, ponctuent le chemin. Un peu de repos sur un de ces bancs sera également le bienvenu dans un petit moment.

Je pédale doucement, profitant du calme, et de l'ambiance sereine. Quelques canards batifolent sur l'eau. J'ai toujours adoré les canards et leur tenue souvent chamarée ! Le banc convoité se trouve de l'autre côté, encore quelques centaines de mètres et à moi la détente ! Un bruit attire mon regard : ce n'est rien, juste un héron qui s'enfuit. Il est majestueux, et je suis son vol du regard pendant un instant. Mais pourquoi s'est-il envolé ?

Un mouvement, prés d'une petite cabane, éveille ma curiosité. Une femme se tient penchée sur la balustrade. Elle admire, elle aussi, les oiseaux. Déçue de ne pas être seule : j'aurais aimé me poser là-bas comme elle et admirer cette nature tranquille et sereine. Tant pis, ce sera pour une prochaine fois ! Elle ne m'a pas remarquée et semble avoir chaud, elle aussi. Elle déboutonne sa veste d'un geste très sensuel. Je pédale toujours : un peu plus énergiquement, d'ailleurs. Je la trouve jolie, assez grande, élancée. Ses cheveux blonds paraissent si soyeux que j'ai envie d'y passer les doigts. Elle s'approche du bord et délace ses bottines, se déchausse et les pose délicatement sur le ponton. Elle regarde l'eau avec envie, s'assied sur le rebord et plonge ses pieds dans le liquide encore frais, en cette saison.

J'ai de plus en plus chaud. Je descends de vélo. J'hésite entre dévoiler ma présence ou profiter du spectacle. Quelque chose m'attire chez cette femme. Quoi ? Je l'ignore. Je me fraie adroitement un chemin dans les herbes hautes. Après tout, il n'y a rien d'indécent à admirer une jolie femme. Elle a l'air si détendue, si sereine. Sa main plonge dans l'eau, puis remonte, laissant les minces filets d'eau s'échapper de ses doigts. Encore humides, ceux-ci se faufilent sur sa nuque : elle ferme les yeux, appréciant visiblement la fraîcheur de l'eau. Ses doigts s'égarent à présent sur son cou, puis descendent légèrement dans son décolleté. Ma gorge se dessèche. Mon cœur s'accélère malgré moi. Je ne pédale plus mais j'ai toujours très chaud. Le soleil n'est pourtant pas virulent. Je me sens comme captivée, happée par l'instant. J'aimerais voir son regard, son sourire, caresser sa joue. Si elle s'aperçoit de ma présence, elle va prendre peur donc je reste là sans bouger, serrant fortement le guidon de mon vélo. Je le lâche définitivement et avance un peu plus, me trouvant ainsi complètement cachée par les herbes hautes.