One shots

numéro 5

numéro 5:

"-Le crime passionnel...

-Comment ça le crime passionnel?

-On y pense jamais assez.

-Parce qu'il n'y en a pas tant que ça...

-Ah bon? J'trouve que c'est la plus belle raison pour tuer moi.

-Vous trouvez qu'il y a de belles raisons pour tuer, Marquand? Ça ne vous ressemble pas.

-L'amour. Quand on aime réellement quelqu'un, on peut tout faire pour cette personne, même tuer, dit-il, catégorique.

-Vous semblez parler d'un vécu. C'est ce que vous ressentiez avec Flora?

-Flora... Cette femme je... je sais pas... C'était quelqu'un de bien, j'l'écoutais pas assez, j'étais pas engagé avec elle. On a eu Juliette, et j'ai merdé, j'l'ai laissé l'élever seule, j'ai pas été là pour elles.

-Alors pourquoi toujours tout ramener au crime passionnel?

-Parce que je suis amoureux de l'amour, disons, argumenta-t-il pour ne pas lui avouer que c'était d'elle dont-il était amoureux.

-Vous êtes poète, Marquand?

-De plus en plus...

-Bon admettons votre théorie du crime passionnel, Julie vit avec Marc, élève Timothé avec lui, mais Florent ne le supporte pas.

-Voilà, Florent le supporte pas, retrouve Marc et le butte pour récupérer Julie et Timothé.

-Enfin, ça fait quand même trois ans qu'ils sont divorcés, Florent à dû l'oublier et refaire sa vie non? Ses connaissances le décrivent comme dragueur.

-Certains y arrivent. En réalité c'est impossible. Quand on a une personne dans le sang, dans la peau, on a beau faire des tonnes de rencontres, se persuader d'aimer quelqu'un d'autre, c'est toujours elle. On ne peut pas oublier LA femme qui a marqué notre vie, même des années après.

Quand il eut dit « se persuader d'aimer quelqu'un d'autre » Alice porta sa main droite à son pendentif, qui était en fait la bague que son homme lui avait offerte en lui demandant de l'épouser.

-Je comprends Florent, ajouta-t-il.

-Vous... vous pensez qu'on peut se forcer d'aimer quelqu'un juste par peur de... d'aimer une autre personne.

-Le genre humain, dit-il comme à son habitude, dès qu'il devait décrypter une attitude de la nature des Hommes à sa collègue. Ce qu'il faut, c'est être sur de soi, et de ne pas se lancer au hasard.

Il l'avait dit, pour elle bien sûr, mais pour lui aussi. C'est vrai, il n'y avait rien eu de spécial entre lui et Flora et pourtant ils avaient eu une fille, s'étaient mariés et avaient habité ensemble. Et puis pour Alice, parce qu'il l'aimait, et désirait de tout son coeur qu'elle renonce à Matthieu et se consacre a lui.

-Je... Allons interroger Florent.

-Après vous, insista le commandant, pour marquer sa galanterie, en ouvrant la porte de la salle d'interrogatoire."

Une demi heure après, l'homme ressortait menotté, la tête baissé et plein de regrets. Derrière lui se trouvait un juge et un commandant de police.

"-Vous aviez raison.

-J'vous l'ai dit, on vit avec une femme dans la peau, et à ce moment là, on agit que pour elle, tout le temps.

-Qui est votre muse, Marquand? le questionna-t-elle en espérant que ça ne soit pas elle, ou en priant pour que si, elle soit la femme qui occupe ses pensées ; elle ne savait pas quoi espérer.

-Je vous le dirais peut-être un jour, mais aujourd'hui, vous n'êtes pas prête. Allez rejoindre Matthieu et Paul. Bonne soirée, Alice, dit-il en saisissant sa main et en y laissant un maigre baiser."

La juge, prenant cet acte pour réponse, resta plantée, seule dans les couloirs de la brigade, des tas de questions en tête.

numéro cinq
« Victor Hugo »
30.05.2018