L'animal

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La bibliothèque est à l'image de la ville : pleine de livres en tous genres et pourtant bien vide. Enfin sauf que lorsque l'on s'y trouve Josh et moi. D'ailleurs quand on y est ensemble c'est de loin l'un de mes endroits préférés sur Terre. La bibliothécaire nous a vu nous passionner par tous ces livres, nous a vu grandir au milieu de ces étagères pleines de mystères. À nous trois on a dévoré le petit rayon SF en un été durant le collège.

Aujourd'hui Sharonna commence à se fatiguer plus vite donc elle nous surveille à peine, plongée dans son « King » favori usé à force d'être lu. Josh lui est toujours l'imbécile heureux s'émerveillant d'à peu près tout ce qui existe. Cette fois c'est au tour de ma barbe de bébé bûcheron d'être l'objet de son bonheur.

-Je peux toucher ?, me supplie-t-il pour la seconde fois. Allez j'en aurai jamais moi...

L'adonis qui me sert de meilleur ami et de grand-frère de temps en temps est également le plus gros gamin qu'il m'ait été donné de voir de ce côté du système solaire. Je ne peux que soupirer face à tant de puérilité et surtout je me dois de le laisser faire parce que je suis sympa mais surtout parce qu'il est terriblement imberbe. De toute façon, je compte me raser de plus près maintenant.

-Sincèrement, tu n'as rien retenu de mon histoire ?

Il émet un râle avant de lancer :

-Il n'y a rien à retenir, c'était juste une mauvaise fièvre. En plus tes yeux sont tout à fait aussi nuls que d'habitude.

-J'te jure que je me suis vu avec des yeux qui brillaient, j'avais même des crocs style Dracula, ai-je rétorqué en lui désignant mes gencives intactes au toucher.

-Grr !, se moque-t-il en m'offrant sa pire imitation du personnage. D'un côté je me dis que si tu es un vampire, ce dont je doute, il existe forcément des vampirettes. Imagines-moi avec une petite vampirette juste deux secondes.

-Pff... Vous m'exaspérez Joshua Green. Il est clair que tu n'aurais aucune chance de concrétiser quoi que ce soit avec qui que ce soit... Dur réalité que tu vis l'ami.

Après ce genre de provocations, un être humain pas préparé s'attendrait sûrement à une réponse avec des mots. Moi je sais qu'il ne va pas tarder à me faire exploser de rire. Il fait monter la tension en me fixant du regard juste avant de plisser les yeux et de faire une bouche en cul-de-poule. L'image est hilarante même si ça n'a duré qu'un court instant, le voir essayer de se rendre plus beau qu'il ne l'est le rend tellement dégueulasse. On s'esclaffe à gorges déployées en nous tenant le ventre tellement nos abdos nous font mal.

- Aide moi j'ai trop mal aux abdos tellement t'es débile.

- Non. Toi aide moi !, me répond-il

Comme à mon habitude dans ce genre de situation, je pousse sa chaise d'un puissant coup de pied et il se ramasse en se roulant par terre entre douleur et fou rire. Certains diraient que notre humour ne fonctionne plus, nous on dit que leur humour a besoin de prendre de la hauteur. J'adore faire le pitre quand c'est avec Joshua, sans lui je serai bien plus soucieux dans la vie.

Soudain je suis surpris par une phrase qu'il a dit:

"Putain j'espère que Sharonna est dans le coma sinon on est mort" suite à quoi je réponds:

-Si elle était dans le coma, la bibliothèque serait fermée.
Josh est tout aussi surpris que moi et il me coupe:

-Je n'ai pas dit ça... Comment t'as fait pour savoir ?

-Je suis sûr de t'avoir entendu souhaiter que Sharonna soit dans le coma.

-Attends, attends ! Réessaie, je crois qu'on tient un truc là.

-Que je réessaie quoi ?

-Devine ce que je pense, répond-il avant de fermer les yeux pour se concentrer sur une idée précise.
Tout d'abord je ne vois pas le but derrière ce défi, mais je crois qu'il tient vraiment un truc. Alors j'essaie de deviner ce qu'il pense. Je sais qu'il s'agit de nourriture, mais quel genre ? Après avoir vidé mon esprit je tente de me concentrer sur ma respiration, puis j'arrive à me concentrer sur la sienne. Maintenant je me sens connecté à Joshua d'une manière nouvelle. Il pense à une glace chocolat-vanille. Et je le sais car il l'a dit.

-Tu sais que ça ne sert à rien si tu me dis à quoi tu penses.

On ouvre tous les deux nos yeux en même temps et il me jure n'avoir rien dit.

L'ESSENCE TOME 1 : DissolutionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant