14/Asher

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La main chaude d'Eden est dans la mienne et j'entraîne Eden derrière moi pour lui faire découvrir son cadeau. Je savoure le contact de sa peau dans la mienne. Nous arrivons au carport et je la vois écarquiller les yeux à la vue de ce qui s'y trouve. De multiples émotions passent sur son visage: étonnement, incompréhension, surprise, joie. Elle lâche ma main, bien trop tôt à mon goût, et se dirige presque en courant vers le carport a quelques mètres de nous.

L'immense abri face à nous est composé d'épaisses poutres en bois, d'un toit de tuiles grises et un immense sac de frappe s'y balance en son centre. Le vent froid s'y engouffre en même temps que nous et je vois ses yeux briller de bonheur.

- Pourquoi ?

C'est le seul mot qui sort de sa bouche.

Je hausse les épaules.

- Pourquoi pas ? J'en ai parlé avec ton frère avant de partir ce matin, je lui ai dit que tu aimais ça et qu'il t'en faudrait un pour les jours où tu ne veux pas me croiser au lycée.

Je sais qu'elle n'y est pas retournée depuis la dernière fois ou nous y sommes allés ensemble. Je sais aussi que c'est ma faute si cela lui manque. Elle a besoin d'expulser sa douleur. C'est la seule chose qui marchera tant qu'elle n'en parlera pas. Je sens qu'elle m'observe et je lui adresse un sourire contrit pour lui montrer que je sais que je suis responsable en parti de son mal être. Elle n'a pourtant pas l'air d'avoir besoin qu'on lui en rajoute.

Je ramasse les gants que j'ai apporté et lui présente pour l'aider à les enfiler. Elle ne dit plus un mot, elle se laisse faire et passe ses protections sur ses poings. Elle se met en garde et je me place derrière le sac pour lui maintenir.

Je l'encourage et lui apporte des conseils. Elle est concentrée et fronce de nouveau ses sourcils. Son petit geste m'a manqué, elle respire comme je le lui ai appris et place ses coups.

Gauche

Droite

Gauche

Je la laisse faire pendant de longues minutes et je comprends que cela nous a manqué à tous les deux. Ces moments de rapprochements étaient merveilleux et je prie pour qu'ils recommencent. La sueur commence à faire une pellicule sur sa peau. L'observer me donne chaud et j'essaie de ne pas trop la fixer du regard pour ne pas la déconcentrer.

La nuit est tombée depuis longtemps maintenant, je sens qu'elle commence à fatiguer, elle puise dans ses réserves et, comme moi, veut prolonger cet instant.

Elle s'arrête finalement, essoufflée, repue d'endorphine. Elle pose ses poings sur ses genoux et fait ses exercices de détente musculaire. Je lui propose la gourde que j'avais préparée et la regarde se désaltérer. Elle est si belle sous cette lumière artificielle.

Elle retire ses gants et s'affale sur un banc près de la terrasse. Je reprends ma veste de cuir, posée par terre, et la pose sur ses épaules.

- Enfile-la ou tu vas attraper froid quand tes muscles vont refroidir.

Elle s'exécute, toujours aussi silencieuse. Elle attend mes excuses. Quelles excuses puis-je lui donner pour pardonner mes actions ? Elle doit penser que je souffle le chaud, le froid.

J'inspire longuement avant de me lancer.

- Je ne m'excuserai pas pour ce que j'ai fait car j'ai mes raisons. Valables ou pas, elles font parties de ce que je suis. J'ai envie d'être avec toi, Eden, envie d'être ton ami mais j'ai d'autres choses importantes dans ma vie et je ne m'écarte jamais de la voie que j'ai choisie.

Elle hoche la tête silencieuse. Je n'ai jamais été très doué pour exposer mes sentiments. C'est toujours le contraire de ce que je veux dire que les gens comprennent alors je réfléchis longuement avant de reprendre.

Tout S'écroule Où les histoires vivent. Découvrez maintenant