Chapitre 3

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Longeant le couloir sur la gauche jusqu'à la chambre d'Uriel, j'en profite pour jeter un œil à l'extérieur. La piscine qui se situe au milieu du jardin me rappelle tous ces étés passés à barboter avec mon frère, mes sœurs et ma cousine. Aujourd'hui, ces doux souvenirs prennent un goût amer et je détourne très vite le regard. À la place, je me concentre sur le bruit étouffé de mes pas sur les épais tapis beiges.

Lorsque j'arrive devant sa chambre, mon poing frappe deux fois contre la porte. Il est clair qu'il y a quelques années, notre complicité m'aurait poussé à entrer sans me poser de questions. Dorénavant, je préfère m'abstenir pour éviter de surprendre quelque chose dont je ne voudrais pas être témoin.

— J'suis occupé !

Mes yeux roulent dans leurs orbites devant le cri paniqué qu'Uriel vient de lancer. Comme pour les filles, je ne sais pas ce qu'il manigance, mais il n'est clairement pas en train de bosser sur un projet scolaire, comme a l'air de le penser notre père. Je crois même entendre des bruits de verre à travers la cloison.

— C'est moi. Ouvre.

— Ah ! J'arrive.

Après une dizaine de secondes à patienter comme une plante verte devant la porte, le déclic se fait entendre et la tête d'un jeune brun aux yeux gris se glisse par l'entrebâillement. J'ai l'impression de me retrouver devant un miroir tant Uriel est mon portrait craché, dans une version plus jeune et plus rebelle.

— C'est pour ? me demande-t-il avec amusement.

Je hausse un sourcil en me demandant si j'étais aussi idiot que lui à son âge. Sûrement.

— C'est pour Uriel, il est là ?

Je croise les bras sur ma poitrine puis relève un sourcil en attendant qu'il se décide.

— Ok, vas-y, rentre, ricane-t-il. Mais reste discret.

Il ouvre la porte, me tire d'un coup sec pour me faire entrer dans sa chambre, avant de la refermer en vitesse derrière lui. Je me demande ce qu'il ne veut pas que nos parents découvrent pour agir ainsi. Je jette un coup d'œil suspicieux autour de la pièce, mais rien ne me semble sortir de l'ordinaire. Le lit d'Uriel est défait comme à son habitude. Son bureau, jonché de papiers en tout genre, est à peine visible en dessous et pour accentuer le côté anarchique, des vêtements traînent sur le parquet. Rien d'extraordinaire jusque-là. À vrai dire, je m'attendais même à pire, connaissant les goûts de mon frère pour le désordre constant.

— Qu'est-ce que tu caches ?

Il évite mon regard et va même jusqu'à s'asseoir sur sa chaise de bureau d'une démarche innocente. Plus suspect, tu meurs, pensé-je en affichant un visage empli d'une méfiance amusée.

— Rien. J'étais en train de faire un peu de rangement.

Et parce qu'il me lance le regard le plus candide qui puisse exister sur Terre, j'explose de rire. Il est impossible que quiconque puisse le croire alors qu'on dirait qu'il vient tout juste de dérober un billet dans le porte-monnaie de notre mère.

Je m'approche du lit avant de m'y écrouler. Face à mon attitude détendue, Uriel se joint à moi.

— Bon, d'accord. J'étais en train de compter mon stock de bouteilles pour la fête de ce soir.

Je lui envoie le t-shirt sale qui traîne au pied du lit, mais ce dernier l'évite au dernier moment.

— Pourquoi tu ne me l'as pas dit ? Je ne vais pas te balancer aux parents.

Le bleu de l'espoir [Édité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant