Tu t'approches, tires la chaise à ses côtés, t'y assois. Tu lèves le menton, admires les joyaux qui pendent dans le ciel, qui tâchent de lumière le ciel si noir.- Je savais que tu serais là.
Ta voix est douce, légère, et se fait emporter par la petite brise, rejoignant tous les autres mots jetés.
Les mains du garçon sont fermement agrippées à ses cheveux, et les mèches blondes couvrent ses yeux.
Tu n'as pas besoin de les voir pour savoir qu'ils sont baignés de larmes.
- C'était quoi, aujourd'hui?
Un hibou hulule quelque part dans l'obscurité; des cigales jouent dans l'herbe haute du jardin; au loin, un klaxon de voiture retentit.
- Ils étaient tous là, autour de moi. Ils pointaient leurs doigts sales, et ils ricanaient, ils riaient, ils riaient aux éclats. Puis ils se rapprochaient, et leurs yeux vides rétrécissaient, et leurs bouches s'agrandissaient, et je criais, je criais, et aucun son ne sortait. Et ils tombaient sur moi comme des corps morts, puis tout était noir. Mais j'entendais encore leurs rires répugnants, en écho, sans fin...
Ses doigts tirent plus sèchement ses mèches et son corps se crispe.
Tu sais qu'il peut se blesser comme il l'a déjà fait alors, en faisant preuve de toute la douceur que tu possèdes, tu poses ta main sur son épaule.Il réagit immédiatement; et la seconde après, il est tourné vers toi, tenant fermement ton poignet.
- Pourquoi?
Ses yeux brillent si forts qu'ils pourraient détrôner les étoiles, et les sentiments y sont si présents, si réels, que la beauté des constellations parait bien fade et abstraite.
Sa voix n'est qu'un murmure, mais tu peux y discerner le désespoir qui y règne. Tu es si habituée à l'entendre.- Pourquoi ils ne partent pas?!
Il a élevé le ton, et la fin de sa phrase s'est brisée dans sa gorge.
Le hibou ne hulule plus, les cigales se sont tues; le silence est revenu.
Des larmes coulent sur ses joues, et de ton autre main, tu viens les sécher, doucement, tout doucement. Sa peau est lisse mais son visage est froid; tu te demandes depuis combien te temps il est ici, dehors, seul.
- Je ne sais pas.
Il ferme les yeux, pose sa paume sur tes doigts, qui reposent sur sa joue.
Tu observes son visage si beau, ses traits si doux. Tu te demandes pourquoi la vie a décidé de lui arracher son innocence, comment elle a osé briser ce garçon si gentil.
Tu te demandes si tu verras son sourire à nouveau, un jour.