Fabrice.

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Deux jours plus tard, Aurélien reçut son salaire et le rajouta à l'enveloppe où il avait déjà mis l'argent de son compte. Guillaume le regarda faire, une boule dans le ventre. Il lui avait tout donné, littéralement. Il n'avait plus rien sur son compte et ce mois-ci ils mangeraient des boîtes de conserves. Mais Aurélien avait l'air de s'en foutre. Il revint avec l'enveloppe, la posa sur la table basse et se blottit dans ses bras, sur le canapé.

« Voilà, tout ira bien maintenant... »

Il embrassa le sommet de son crâne et le força à le regarder lorsqu'il sentit son cœur battre plus vite. Le plus jeune fuya son regard et il dut le lui demander pour qu'il ose le regarder.

« Orel, qu'est-ce qu'il y a ?

— C'est juste que... maintenant, tu es libre. Je te donne tout ce que j'ai et après avoir payé ta dette à ce dealer... Tu es libre de faire ce que tu veux. J'ai peur que tu t'en ailles et que je ne te revois plus jamais.

— T'as aucune raison d'avoir peur, Orel, soupira-t-il. La dette, c'est envers toi que je l'ai maintenant. Ne t'en fais pas, je ne vais pas m'évaporer.

— Je ne veux pas que tu te sentes redevable, lui dit Aurélien en lui lançant un regard inquiet, attrapant faiblement son tee-shirt de ses mains, avant de baisser la tête. Je le fais parce que tu comptes pour moi, tu comprends ? Je n'en retire rien.

— Je t'aime. »

Il avait laissé échapper ces trois petits mots et se mordit l'intérieur de la bouche. Aurélien se figea et releva le visage, confus. Mais il ne lui demanda pas de répéter. Il vint juste se caler de nouveau contre lui et embrassa la peau de son cou. Guillaume resserra son étreinte autour de sa taille. Il avait passé deux jours de pur bonheur à ses côtés et il savait maintenant qu'il ne voudrait jamais partir loin de lui.

En partant cet après-midi pour aller rejoindre Fabrice, l'enveloppe soigneusement rangée dans son sac, il embrassa amoureusement Aurélien. Comme une promesse que tout irait bien et qu'il reviendrait le plus vite possible. Il sentit son corps trembler légèrement contre le sien et ses mains serrer la fabrique de son pull, comme s'il ne voulait pas lâcher prise et le laisser partir. Et ça lui fit mal au cœur. Parce qu'il savait maintenant ce que ça faisait de tenir à quelqu'un et d'avoir peur pour sa vie. Pour la première fois de sa vie, il avait peur pour lui-même. Parce que quelqu'un avait confiance en lui et avait besoin de le savoir en sécurité. Il ne voulait pas le décevoir. Alors quand l'homme de main de Fabrice le frappa au ventre une heure plus tard, il encaissa sans broncher.

« T'as ce que tu voulais non ? cracha-t-il dans la direction de Fabrice en se relevant.

— Ouais, mais avoue que tu l'as pas volé celle-là. Et comment ça se fait que tu aies autant d'argent d'un seul coup ? Tu as gagné au loto ou quoi ?

— Ouais c'est ça.

— T'as une poule aux œufs d'or ? Tu fais chanter quelqu'un ? »

Devant son silence, Fabrice continua.

« Ce serait pas le garçon qui est venu te trouver la dernière fois ?

— Quoi ?

— Ouais, je l'ai vu moi aussi. Pas mal.

— Arrête, tu le laisses en dehors de ça. Il n'a rien à voir avec toute cette merde.

— Je suis impressionné, tu as encore cette once d'humanité. T'es pas encore pourri jusqu'à la moelle malgré l'endroit où tu as grandis.

— Je veux changer. Me ranger.

— Vraiment ? Pour ce garçon ?

— Entre autres. Il m'a aidé à ouvrir les yeux. Il m'a aidé.

— C'est bien. Tout le monde n'a pas la chance d'avoir été aidé comme ça. Rends-toi compte de la chance que t'as. Pour moi, il est trop tard. Mais toi, tu en as encore le temps. Décroche. C'est le mieux qu'il peut t'arriver, crois-moi. »

Il regarda Fabrice, surpris de sa déclaration, puis comprit à son regard qu'il était temps qu'il y aille. Il jeta un regard aux hommes de main et leur fit un signe de tête. Il espérait ne plus jamais les revoir de sa vie.

Il courut loin de la cité, jusqu'à en avoir les poumons perforés, en manque d'air. Il savait qu'il aurait à y revenir et, du moins, à s'occuper de son appart pour le vider, mais ce n'était pas le plus important à ce moment-ci. Il pensait seulement à Aurélien et voulait se jeter dans ses bras et l'embrasser passionnément. Lui qui l'avait sauvé, littéralement.

Mini Fiction OrelxGringe - Tout nous sépare.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant