Chapitre 4 : Le Poudlard Express

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Sur le quai 9¾, au milieu des enfants, adolescents et jeunes adultes, il devenait difficile pour Rogue d'exprimer ses émotions. Plus qu'à l'ordinaire. Devant lui, Harry trépignait d'impatience, regardant le train rouge et noir, aux écritures d'or, qui semblait se remplir bien plus qu'il n'aurait dû le pouvoir.

« Je peux monter ?

- Dans quelques minutes. »

Il posa sa main sur sa tête, de peur qu'il ne s'enfuie, et Harry soupira un peu, en essayant de se soustraire à son contact. Severus le regarda avant de le relâcher, il savait que ça finirait par arriver, mais il avait espéré... Qu'importe.

D'ici une dizaine de minutes maximum, il n'aurait plus d'excuses pour le retenir ici, mieux valait couper court. Il allait donc le laisser s'enfuir, quand il vit que Drago montait. Dans ce cas, ça attendrait encore un peu. Il aurait préféré le voir avec des individus plus... Disons des individus qui ne risquaient pas de le compromettre.

Il repéra un garçon aux cheveux roux, et eut un léger sourire. Un Weasley, ce serait très bien. Par chance, le garçon monta dans le train juste devant eux, et Rogue tapota un peu l'épaule de Harry pour lui dire de le suivre.

Le garçon, un peu perdu, s'exécuta sans un regard pour Rogue, qui fit mine de ne pas être blessé par son comportement. Il regarda Harry disparaître, puis se dirigea vers l'avant du train. Tout irait bien, il en était certain.

Sur le chemin, il tenta de rester fier, sûr de lui, malgré les regards et les murmures sur son passage. S'il avait su que simplement se couper les cheveux entraînerait ce genre de réactions...

Il monta prestement dans le wagon et marcha le long des sièges jusqu'à en atteindre un qui, un peu à l'écart, devrait lui permettre de ne pas avoir à parler. Il préférait ruminer, seul dans son coin, l'abandon que Harry venait de lui infliger.

Anxieux, l'esprit perdu, il repensa à leur conversation à propos de la baguette. Dans l'ensemble, il pensait avoir judicieusement choisi ses mots... Mais il savait que lorsque son souvenir serait dans la pensine, examiné et disséqué par l'œil et l'esprit vifs de Dumbledore, rien ne serait pareil.

Il glissa sa main dans la poche de sa baguette, où il trouva également la petite fiole pleine de filaments argentés, brillants comme des lucioles. Dès ce soir, il devrait se prêter au difficile exercice des souvenirs.

« Bonjour Severus. »

Il releva les yeux, surpris par la voix d'Albus, et relâcha la fiole pour se concentrer sur lui.

« Vous ne transplanez pas à pré-au-lard ?

- J'ai pensé que vous auriez besoin d'un peu de compagnie, cette fois-ci. »

Severus le regarda longuement, entre reconnaissance et déception de ne pouvoir être seul. Il écarta sa cape afin que Dumbledore puisse s'installer, et ils gardèrent le silence un moment.

« Je trouvais étrange l'idée de faire voyager les professeurs dans un wagon à part, mais je commence à comprendre, je crois, que vous vouliez éviter que Harry ne soit trop associé à vous... »

Il n'eut pas envie de répondre, mais il finit malgré tout par hocher faiblement la tête en signe d'assentiment.

« Il est déjà difficile pour lui d'être Harry Potter, il n'a pas besoin de se sentir obligé de rester avec moi.

- Harry Potter, peut-être... Mais être Harry Rogue Potter semble bien plus facile... »

Encore une fois, un sourire, mais il l'effaça rapidement bien qu'avec une certaine difficulté.

« Déménager à Londres également, était une décision destinée à lui faciliter la vie...

- Il était plus facile de vivre une vie normale en étant ici l'été.

- Sans doute, sans doute... »

Il sentait sur lui le regard perçant de Dumbledore, qui le scrutait et comprenait déjà sans un mot. Plus tard, ils en parleraient sûrement. Severus se sentirait attaqué, se mettrait sur la défensive, et Dumbledore resterait calme, imperturbable... Et puis il lui expliquerait sans doute qu'il ne devait plus interférer avec Harry... le laisser vivre, pour que la prophétie...

Il ferma les yeux un court instant. Il détestait y penser. Pendant de nombreuses minutes, il ne se passa plus rien. Le train démarra, et Rogue dut résister à l'affreuse envie de prétexter une ronde pour voir où était Harry, avec qui, si tout se passait bien, s'il n'avait besoin de rien.

Lui avait-il laissé assez d'argent ? Plus important encore, allait-il se lier d'amitié avec Drago ? Il ne le fallait surtout pas. Il préférait le voir auprès de la famille Weasley qui, bien que composée principalement d'éléments perturbateurs, à l'exception de Percy, avait au moins l'avantage de détester les Malefoy.

« Ne vous inquiétez pas, Severus. Harry saura choisir ses amis, qu'ils soient ou non de la famille Malefoy...

- Comment...

- Le jeune Drago a son âge, n'est-ce pas ? »

Il hocha un peu la tête, et n'ajouta rien. Ce n'était pas utile : Dumbledore n'avait besoin d'aucune information. Il maîtrisait tout, à chaque instant, et cela rendait la mort de Lily plus insupportable encore, chaque fois qu'il y pensait.

« Je comprends votre inquiétude, Severus... Mais Harry...

- Je sais. Harry est l'élu, nous devons le laisser agir à chaque instant tel qu'il pense devoir le faire. Mais bon sang, Albus ! Il a besoin d'aide pour ne pas faire les mauvais choix ! »

Dumbledore le regarda, et sourit tranquillement, ce qui agaça un peu plus Severus, mais il n'eut pas le temps de le rabrouer :

« Harry ressemble à James... Mais il n'a ni son arrogance, ni son besoin de reconnaissance... Le seul dont l'avis compte, c'est son père.

- Son père ne peut pas le lui donner, qui dit qu'il ne va pas croire à des promesses idiotes ?

- Je suis certain qu'en faisant des efforts, vous pourriez tout à fait lui donner votre avis, Severus. »

Interloqué, il leva les yeux sur le directeur, restant obstinément coincé dans un silence d'incompréhension. Dumbledore se leva alors que Rogue le suivait des yeux sans un mot.

« Je vais aller voir Minerva... Nous devons encore régler quelques petites choses... à propos de la pierre, bien sûr. »

Rogue vit Dumbledore s'éloigner, et son regard se posa sur le professeur Quirrell, qui le suivait également des yeux.

Dans les yeux de SeverusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant