Une Soirée

La réception (2)

Dans le petit salon les attendaient Serge Blandier, Olivier Dery, Yvan Deschamp, Caroline de Montmarse et Alice Brumile.

- Solange ! Enfin ! S'exclama Serge en se levant. La soirée n'en aurait pas été une sans toi.

Depuis sa rupture avec Élisabeth, le jeune homme s'était apparemment mis en tête de conquérir Solange. La jeune femme avait avoué à ses amis qu'elle avait d'abord trouvé amusant qu'il lui fasse une cour assidue, mais que bientôt, elle l'avait trouvé ennuyant, encombrant, voire intrusif. Chaque matin, il lui envoyait des fleurs, elle le retrouvait presque partout où elle allait, faisant chaque fois semblant de ne pas savoir qu'elle venait ici.

Il s'avança vers elle et fit mine de prendre sa main. Elle l'évita et ostensiblement s'éloigna de lui pour s'approcher de Caroline et lui faire la bise.

De son côté, Élisabeth, qui ne s'était absentée que quelques minutes, fut accueillie par un langoureux baiser d'Yvan, qu'elle écourta rapidement. Solange n'appréciait pas vraiment cette manière de s'afficher, mais elle savait que le signaler ne changerait rien. Quand elle faisait part de ses pensées à Élisabeth, celle-ci répliquait qu'elle était trop « vieux jeu ».

Solange remarqua qu'Olivier et Alice, côte à côte s'étaient levés sans séparer leurs doigts entremêlés. Solange sourit avec ironie : encore un couple qui n'aurait plus conscience de son existence avant la fin de la soirée. Elle se rappela soudain une remarque que lui avait faite Caroline une fois : « Parfois, on a l'impression que tu ne crois pas à l'amour. » Solange secoua la tête, là n'était pas la question.

Plongée dans ses considérations, Solange ne prêta pas beaucoup d'attention à ce que ses amis faisaient. Elle répondit machinalement à leurs questions, leur en posa d'autres par politesse. L'éclat rouge d'une rose attachée en boutonnière la ramena à la réalité et elle sursauta presque en se rendant compte que Hugo se tenait devant elle.

- ... non, en fait nous nous sommes juste rencontrés, et je l'ai accompagnée jusqu'à nos hôtes, disait-il.

Il lui envoya un regard éclatant. Elle se sentit terriblement gênée, et pour masquer son trouble, elle fronça les sourcils.

- C'est la première fois que nous vous voyons ici, monsieur de Saint-Nacre, dit-elle sur un ton qui exigeait des explications.

Après le regard, le sourire. Solange crut un instant qu'elle allait décrocher. Heureusement qu'il y avait un fauteuil derrière elle, car elle put au moins se rattraper avant de tomber et de se ridiculiser. Elle déglutit et quitta presque à regret le regard qu'il braquait sur elle.

- Je plaide coupable, dit-il finalement. Je connaissais les Masset par mon père qui m'en a beaucoup parlé...

- Alors, eux ne vous connaissent pas ? L'interrompit Serge.

Hugo se tourna vers lui, et Solange soupira de n'être plus sous le feu de ses prunelles.

- En effet, ils ne me connaissaient pas. Donc, mon père m'avait beaucoup parlé d'eux, et lorsque j'ai vu qu'ils organisaient quelque chose pour ce soir, je me suis dit que c'était l'occasion pour me présenter. Et monsieur Masset m'a aimablement proposé de rester.

- Alors vous vous êtes invité ? S'exclama de nouveau Serge en lui lançant un regard noir.

Le jeune homme ne supportant pas de voir un autre que lui tenter le flirt avec Solange avait décidé de gâcher la soirée de cet inconnu. Élisabeth vint à la rescousse. Elle prit familièrement le bras du jeune homme, faisant scintiller son bracelet doré, et lui lança une œillade dont Yvan pâlit.

- Et nous sommes tous ravis que vous ayez osé !

Solange se redressa. Élisabeth allait trop loin. Ce soir elle était censée être avec Yvan ! Celui-ci, d'ailleurs sembla penser la même chose puisqu'il lança un regard lourd de sens à Hugo.