8.P

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-Allo ? Larme ?

-Ça te démangeais de me poser la question hein ?

Je ne dis rien, je sens une violente colère dans sa voix.

-Je suis désolée... Oublies ce que je t'ai dis.

Je l'entends soupirer.

-Mon frère jumeau s'appelle Pharaël.

-Wow... Vous avez des prénoms originaux tout les deux...

-Ne me coupe pas s'il te plait.

Je me pince les lèvres.

-Je disais donc. Mon frère s'appelle Pharaël. Lorsque nous étions petits, nous étions vraiment très proches. Toujours accrochés à l'un et l'autre. C'était mon frère, mon meilleur ami. J'ai fais une filière L et lui S. Comme ça, tu dois te dire que c'est inutile de préciser ça. Mais ça a son importance. C'est même en quelque sorte l'élément déclencheur. Ma famille est une famille d'ingénieurs. Jusque là, pas de problèmes, ce n'est pas grave en soit. Mais... Nos parents ont eu la sale manie de vouloir nous créer un avenir tout tracé depuis notre naissance. Entre coups de pressions et punitions si nous avions une note en dessous de 17, mon frère et moi nous serrions les coudes mutuellement. Lorsque la seconde fut terminée, j'ai fais une connerie. Comme ça ce n'est rien mais... Au lieu de mettre S comme mes parents le voulaient, j'ai mis L. Quelle erreur je n'ai pas faite là. Apres moult disputes avec mes parents, ils ont décidés de me laisser aller en L à condition que je prenne Spé-Maths. J'étais devenue la "honte" de la famille en choisissant la filière Litteraire. Mais en plus de ça, j'avais une fibre artistique que je voulais absolument développer. Je voulais donc faire une L Arts Plastiques. Autant dire que mes parents ont quasiment frôlés l'anévrisme et n'ont pas arrêtés de me répéter qu'ils avaient fait des concessions pour moi en me laissant aller en L et qu'ils étaient hors de questions que je devienne comme tout ces artistes chômeurs et drogués. Donc Arts Plastiques, niet. Bonjour Spé-Maths. Mon frère, lui, faisait son mouton avec tout le monde, et encore plus avec mes parents qui le voyaient comme une réussite. Lui qui faisait pourtant le plus preuve d'anarchie quand nous étions petits, voilà que tout les projets de mes parents lui avaient pollués l'esprit, l'avaient changés en à peine un été. Notre relation a commencé à se dégrader. Je faisais preuve de résistance envers mes parents qui passaient leur journée à me critiquer et me dire que si je ne remontais pas ma moyenne en maths, que je laissais de coté pour le français et l'histoire, je finirai sous un pont. Lui de son côté m'ignorait, voire me jugeait autant que mes parents. Lui qui m'avait défendue, protégée. Et voila que mon allié dans tout ça me tournait également le dos. Il ne me parlait presque plus au lycée, ni même à la maison. Le bac c'est enfin terminé. Mention très bien. J'avais eu d'excellents résultats en maths. Mais j'ai voulu l'impensable. Je voulais absolument entrer dans une fac d'arts. Au cours des deux années, j'avais développé une certaine aisance avec la photographie et je voulais à tout prix me lancer là dedans, en faire mon métier. J'en ai parlé à mes parents, toute joyeuse de leur montrer en plus de ça les photos que je réalisais, de leur faire part d'une infime partie de mon petit monde. Ce fut la pire soirée de ma vie. Photos dechirées, trace de main sur la joue et pleurs. Mon frère est monté peu de temps après que je me sois enfermée dans ma chambre pour me vider de toutes les larmes de mon corps. Il a toqué, il est rentré et m'a prise dans ses bras. Ça faisait tant de temps qu'il n'avait pas eu d'élan de tendresse envers moi que je me suis mise à pleurer encore plus fort en m'accrochant à lui. Je lui crié de me dire qu'il me comprenait, qu'il croyait en moi. Je me rappelle encore de sa grande main sur mes cheveux, de sa voix presque douce et de ses mots... Ses terribles mots. "Mais enfin Larme, ce n'est pas un métier photographe, il n'y a pas d'avenir là dedans... Cesses de faire ta crise d'adolescence et écoute les parents, ils sont passés par là, ils savent ce qui est bon pour nous." Dans la nuit, j'ai récupéré toutes mes affaires et je suis partie. J'ai fait le tour de la famille, des amis. Créchant de temps à autres chez ma grand-mère, ma tante, mon oncle, un cousin, une amie. Mes parents n'ont pas cherchés à me recuperer. D'après eux, j'avais dépassé les bornes. Et puis après tout, j'avais 18 ans. Ils avaient décrétés que je n'avais plus à dépendre d'eux. Mon frère pouvait lui, mais moi et mes sottises artistiques non. Grand bien leur fasse je me rappelle avoir pensé. Enchaînant petits boulots et cours. Je n'ai jamais revu ni reçu de nouvelles de mon frère. Jusqu'à ce que mes parents décèdent dans un accident de voiture. Lorsque je l'ai revu à l'enterrement, j'ai failli de nouveau craquer. Il me manquait tellement. C'était mon frère, mon seul et unique frère. Mais ce jour là, j'ai tout de suite vu dans son regard la haine qu'il me portait. Il m'en voulait. Il m'en voulait d'avoir coupé les ponts avec la famille et d'avoir suivi ma propre voie. Un regard, un "bonjour", pas de "au revoir". J'ai pleuré à l'enterrement, des larmes de rage, de tristesse. Envers mon frère, envers mes parents. Une fois la cérémonie terminée, je me suis précipité de rentrer chez moi et de me promettre de ne plus jamais y penser ni en reparler. Je ne suis pas venue chez le notaire. De toute façon, qu'est ce qu'ils pouvaient bien me laisser ? Moi la fille indigne, le mouton noir, le chien galeux. Et quand bien même ils m'auraient laissés un héritage, je n'en aurais pas voulu. Ça fait 5 ans que je n'ai pas revu Pharaël. Et je n'en ai pas l'envie.

Elle respire fort. Comme si elle venait de courir le 100 mètres.

De mon côté, je ne dis rien.

-Pandore ?

Un petit silence passe.

-Tu es encore là ?

À mon étoileOù les histoires vivent. Découvrez maintenant