LA REINE D'EDERN

Chapitre 8: Draymor

           

Il faisait froid, humide et les arbres avaient maintenant perdu toutes leurs feuilles. Le vent s'était levé et il se mit à pleuvoir peu de temps après qu'Emma, Thomas et Amalric aient quitté Athoriah.

Aux environs de midi, ils s'arrêtèrent à l'orée de la forêt pour manger un peu de ce que les villageois leur avaient donné en quantité suffisante jusqu'à leur arrivée à Draymor, le lendemain matin.

« Quelle barbe, cette pluie ! » dit Thomas. « Ne peut-on pas faire un feu pour nous sécher et nous réchauffer ? »

« Nous n'avons pas le temps. Nous mangeons puis repartons immédiatement, » répliqua Amalric d'un ton sec.

Thomas se tourna vers Emma et leva les sourcils en soufflant.

« Amalric, » dit-il ensuite, « avec tout le respect que je vous dois, vous êtes toujours aussi aimable qu'à l'ordinaire ! »

Amalric se retourna, le dévisageant d'un air supérieur.

« Vous avez de la chance d'être le fils du Gouverneur sans quoi je vous aurais déjà fait ravaler vos paroles. Maintenant, mangez avant que nous ne repartions. »

Sans intervenir, Emma regarda successivement ses deux compagnons. Le chef de l'armée n'était pas du genre à se laisser marcher sur les pieds et Thomas avait intérêt à faire attention à la façon dont il lui parlait s'il voulait éviter de le mettre en colère. Cependant, il est vrai qu'Amalric pouvait, à l'occasion, se montrer un peu brusque, méritant peut-être l'ironie de Thomas ou les reproches qu'on lui faisait régulièrement.

Ils reprirent la route peu de temps après. Il valait mieux ne pas rester trop longtemps à un même endroit et plus vite ils arriveraient à Draymor, mieux cela vaudrait car le danger les guettait sans cesse.

Deux heures plus tard, ils arrivèrent devant une rivière qu'ils devaient traverser pour rejoindre le Nord de Sylvanéa, où se situait le village de Draymor.

« Pourquoi n'empruntons-nous pas le pont de Glabán ? » demanda Thomas.

« C'est un détour, nous perdrions trop de temps à le rejoindre, » répondit Amalric.

Pour ne pas le contrarier, Thomas n'ajouta rien et traversa la rivière sur son cheval. Emma s'apprêtait à faire de même mais Maelig refusa d'avancer, comme si quelque chose l'effrayait. La jeune femme lui donna alors un coup de talon mais la jument ne broncha pas.

« Tout va bien ? » demanda Amalric qui se trouvait un peu plus loin derrière elle.

« Je ne comprends pas, elle refuse de traverser... Elle semble avoir peur... »

Toujours en selle, Amalric rejoignit Emma et prit ses rennes pour essayer de faire avancer son cheval. Mais rien n'y fit et sa monture à lui réagit de la même façon lorsqu'il voulut faire avancer les deux bêtes.

« Que se passe-t-il ? » demanda Thomas qui était déjà sur l'autre rive.

« Nous allons traverser à pieds, nos chevaux refusent d'avancer ! » répondit Amalric.

Emma et lui descendirent de cheval, gardant les rennes en mains en espérant que les deux bêtes les suivraient. Ils allaient franchir la rivière lorsqu'Amalric retint brusquement la jeune femme par le bras.

« Restez où vous êtes, » dit-il en lui barrant le passage, les yeux fixés sur l'eau qui ondulait comme si une force invisible s'y trouvait. « Il y a quelque chose dans l'eau. »

Inquiète, Emma resta immobile tandis qu'Amalric restait attentif à ce qui s'apprêtait à surgir de la rivière. Il s'empara de son épée, s'assura d'éloigner la jeune femme, puis s'approcha lentement de la rive, la lame pointée vers l'avant.