CHAPITRE 9. Sleep on it

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Abigail se figea en voyant son supérieur entrer dans la pièce. Que faisait-il là à une heure pareille ?

"Tiens, Abigail." lâcha t-il simplement.

Le cerveau de la dite Abigail se mit à tourner à cent à l'heure. Il fallait qu'elle justifie sa présence ici, au risque de se faire passer un sacré savon.

"Et ça devrait m'étonner ?" continua t-il, en s'appuyant davantage contre la porte.

Il avait l'air... étrange. Il n'était pas aussi droit que d'habitude.Sa voix était à peine tremblante. Il s'écarta de la porte, et s'y appuya de nouveau immédiatement. Pas parce qu'il l'avait décidé visiblement, mais plutôt parce que son corps avait besoin d'un soutien.

"Vous me fatiguez tous..." soupira t-il en baissant les yeux et en se massant les tempes.

"Et vous, vous avez bu." conclut Abigail, en sentant quelques effluves d'alcool parvenir jusqu'à elle.

Elle attrapa discrètement la bouteille, qu'elle cacha dans sa veste : mieux valait lui retirer ce cadeau-là, pour l'instant. Elle le vit alors se pencher, et accourut pour le rattraper. Il s'appuya sur son épaule, et Abigail prit encore davantage conscience du poids de l'homme : elle comprenait parfaitement comment il parvenait à lui mettre des coups de poings aussi puissants durant leurs entraînements.

"Je dois travailler." reprit-il, à peine hésitant.

"Bien sûr." pouffa t-elle en passant son bras sous son épaule pour le soutenir. "Vous allez surtout dormir."

Abigail se demandait quelle dose d'alcool il avait pu ingérer pour se trouver dans cet état : vu sa corpulence, il devait prendre au moins deux fois la quantité qu'elle pouvait ingérer au maximum pour ressentir un minimum des effets du liquide. Elle ne fit pas attention à sa protestation et commença à le forcer à faire demi-tour pour sortir du bureau. Elle réussit à le traîner dans le couloir, et se rendit rapidement compte, qu'elle n'avait aucune idée d'où se trouvait le logement de Reyes. Et à cette heure, personne ne pourrait lui indiquer. Qui plus est, il valait peut-être mieux que personne, à part elle, ne voit le Commandant de Blackwatch dans cet état lamentable.

Elle décida de l'emmener jusqu'à chez elle. Elle dormirait sur le canapé. Malgré les quelques bâtons qu'il lui mit dans les roues, elle parvint à l'amener jusqu'à chez elle, et à le faire tomber dans son lit. Elle pensait qu'il lui donnerait du fil à retordre, et qu'il se relèverait, ou ne s'endormirait pas immédiatement. En réalité, il tomba dans les bras de Morphée quelques minutes à peine après qu'elle l'ait déposé sur son matelas. Elle le fixa un instant, endormi.

Dans cet état, le Commandant n'avait plus rien d'effrayant. Ses traits s'étaient détendus dès l'instant où il s'était endormi. En le voyant comme ça, Abigail eut même un peu de compassion et de tristesse, en repensant à ce qu'Angela lui avait dit. La jeune femme se demanda donc ce que cet homme avait comme secrets, ce qui faisait qu'il était si froid avec les autres, et qu'il se comportait étrangement durant certaines périodes. Il n'avait pas même pointé le bout de son nez à la réception, et réapparaissait d'un coup, alcoolisé.

Elle aurait aimé comprendre, mais elle n'était même pas sûre qu'elle aurait un jour l'occasion de connaître ne serait-ce qu'une chose sur cet homme dont tout le monde ignorait tout. Machinalement, elle posa sa main sur son front, sans vraiment s'en rendre compte. Sa peau était douce, et chaude. Le Commandant Reyes était un homme plutôt agréable à regarder. Il avait quelques cicatrices ici et là, avait souvent les traits tendus par la colère, mais il demeurait tout de même un très bel homme. C'est la réflexion que se fit Abigail en se levant pour aller elle-même se coucher. Elle partit se mettre sur son canapé avec une couverture, et s'endormit presque aussitôt.

Le silence est d'or, le silence de la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant