Une semaine s'était écoulée depuis qu'Ezra avait récupéré les enfants. Ses prévisions s'étaient avérées justes, son dos était en souffrance, la rendant particulièrement irritable. Grincheuse, elle se rendit chez le meilleur ami du père des deux petits chenapans qui lui volent son lit. Il était absolument hors de question et inconcevable qu'il reste dans un état aussi passif. Aaron avait toujours était là et il n'allait certainement pas observer de loin la déchéance de son ami.
Bien décidée à faire valoir ses idées en utilisant toute sa mauvaise humeur elle toqua à la porte de Joshua. Aucune réponse. Elle recommença, plus fort cette fois. Rien. Elle pesta. Elle n'avait jamais beaucoup aimé cet homme. Elle ne le respectait pas. Il lui faisait penser à un rat, de par son apparence et de sa lâcheté.
Elle continuait de frapper, passablement énervée. Elle était prête à enfoncer cette fichue porte - porte qui se moquait d'elle, elle en était certaine - si la voisine n'était pas sortie agacée par le bruit pour lui annoncer que toute la famille était partie. La rouquine ne comprit pas. Comment ça partie ?
Soudain Ezra se souvint qu'ils avaient prévu de fuir il y a déjà de cela plusieurs mois. Ils avaient décidé d'attendre la naissance du petit dernier Feldcher car Joshua devait être le parrain. Cet « ami » avait abandonné un proche pour son propre petit confort. Il avait fui, sans rien dire, sans dire au revoir, sans un petit mot. La voisine la coupa dans sa liste de reproches :
- Mademoiselle Springer, si vous le désirez...
- Madame Springer, corrigea Ezra dont la colère augmentait à chaque seconde.
- Oh, excusez-moi vous comprenez comme je ne vous ai jamais vu avec votre époux j'ai cru...
- Je n'excuse pas. Cessez de croire et revenez à ce que vous désiriez dire initialement.
- Puisque vous le prenez ainsi, je voulais simplement vous dire que j'avais la clé de l'appartement si vous en aviez besoin, rétorqua la vieille voisine dont la moutarde montait au nez.
- Parfait, j'en ai besoin. Comprenez, vos très chers voisins ont oublié de me rendre des affaires avant leur départ.
Ezra récupéra la clef. Elle était furieuse. Tout, absolument tout allait de travers. Cette vieille aigrie et ses « mademoiselle », son dos foutu,ces lâches absents, Aaron dont elle se questionnait sur l'état, Evelyne qui devait bien rire d'elle de là où elle était. Oui, décidément rien n'allait.
Elle entra dans l'appartement comme un taureau rentre dans une arène. Elle ne savait même pas ce qu'elle cherchait mais elle comptait bien le trouver. Les meubles étaient encore là, la décoration aussi. Tout semblait figé dans une épaisse couche de poussière. Toute la famille s'était littéralement et purement envolée.
Ah elle le revoyait fanfaronnant sur son idée brillante de se rendre à Varsovie, parce que tu comprends Femme les méchants nabots au pouvoir et bah ils nous aiment pas trop. Elle les aurait frappés. Quelle bande d'égoïstes ! Ils partaient au moment où on avait le plus besoin d'eux. Ezra ne le supportait pas.
Elle sortit une cigarette et la fuma essayant risiblement de se calmer. Elle observa autour d'elle. Elle n'était que peu souvent venue ici, la plupart du temps ils se réunissaient tous chez les Feldcher. Chez elle il n'y avait pas la place et ici, il y avait ces affreuses gamines, braillardes et pleurnicheuses. Ezra les avait immédiatement détestées, toutes des pestes.
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Le cri de la Guerre
Historical FictionJanvier 1933, Hitler est nommé Chancelier. Janvier 1933, Simon a dix ans. Il ne comprend pas tout, mais sait que la situation est grave. Simon est un Juif allemand. Il va devoir (sur)vivre et grandir avec ces mots qui lui collent à la peau.