Neelson ATLAS

Chapitre 3

Déposant les paniers remplis des trouvailles de la journée sur la grande table de chêne de la cuisine, Neelson portât son regard sur un imposant dos.

- Vous en avez mis du temps. tonna la voix grave de Leonard, dos au jeune homme.

- Oui, je nous ai retardé. Cependant, nous avons déniché plusieurs choses assez intéressantes...

- Quoi donc ? s'enquit le cuisiner faisant maintenant face à Neelson, ses yeux brillants de curiosité. Le jeune homme désigna les paniers du menton. Leonard reprit la parole :

- De l'essence d'épinette, et des fruits...bien, maintenant vient m'aider à préparer le dîner, à moins que tu préfères aller rejoindre le capitaine tout de suite, il te demande.

Leonard était un homme chaleureux et juste, ami du père de Neelson, il traitait celui-ci comme son propre fils. De stature moyenne et bon vivant, le cuisinier portait un tablier maculé de diverses taches soulignant sa pense bien remplie. Les joues rosies par la chaleur des cuisines, Léo passa une main dans ses cheveux miel.

- Je pense que tu devrais y aller, le capitaine Korad m'avait l'air inquiet. Mettant ainsi fin à ses réflexions, Neelson acquiesça avant de se détourner. La cabine du capitaine se trouvait à l'arrière du bateau.

Traversant le pont d'un pas pressé, il enjamba les quelques cordages le séparant de la cabine du capitaine. Il frappa deux fois et pénétra la sombre pièce. L'air y était lourd, une odeur de rhum et de musc nimbait la cabine. Une bougie posée sur le bureau massif faisait face au capitaine Korad. Ses yeux luisant à la lumière défaillante, une grande inquiétude se lisait sur son visage pourtant habituellement de marbre. Neelson s'avança et se pencha sur ce que le capitaine semblait étudier, une carte des vents.

- "Une tempête approche, nous devons quitter la baie avant demain soir, et avec un peu de chance nous pourrons l'éviter au niveau de l'île de Thalla.

- Les calculs sont bon ?

Le capitaine se leva et se dirigea vers le fond de la cabine. Il sortit un sac de tabac d'une armoire vitrée :

- Je les ai fait vérifier par David, si nous partons vers le nord maintenant, nous échapperons à la tempête et au pire des cas, nous pourrons nous réfugier à Thalla. Acquiesçant, Neelson demanda :

- Pourquoi m'as-tu fait venir dans ce cas ? Les yeux de capitaine se mirent à briller et il esquissait un léger sourire en coin.

- Par tous les dieux, tu n'es vraiment pas dupe ! malgré ma grande confiance en David, j'ai un mauvais pressentiment. Je compte sur toi pour surveiller notre progression, tu m'avertiras au moindre problème.

Neelson déglutit, Korad ne se trompait jamais, ses intuitions leur ont sauvé la vie à maintes reprises. Le jeune homme prit alors les cartes et se détourna. Avant qu'il ne pût fermer la porte, Korad lança d'un ton clair :

- J'aime beaucoup ton nouveau pendentif !" Neelson écarquilla les yeux portant une main sur le bijou, comment avait-il su ? Le jeune homme eu, en seule réponse, un rire franc.

Un sourire aux lèvres, Neelson ferma la porte derrière lui, Korad devrait être un descendant de lecteurs d'esprit, des personnes capables de lire aussi bien dans les cœurs que dans le vent. « Dommage qu'il n'utilise ses dons que pour des futilités" se dit le jeune homme en regagnant la cuisine.

Une nuit d'orage, les éclairs fusaient de part et d'autre du ciel. Les sillages de lumière éclairaient un visage effrayé. Les cheveux battant son visage, elle bravait le vent a la recherche d'un endroit sûr. Au loin, on entendait le bruit de chiens de chasse et de cris d'hommes. Encore un peu, elle s'enfonçait dans la forêt qui se faisait de plus en plus dense à mesure qu'on s'approchait de son cœur. Un crissement de trop attira son attention, une main attrapant son bras, elle retint un cri, l'enfant dans ses bras sentit sa peur, il se mit à pleurer. Un deuxième visage fut éclairé dans la nuit noire.

Un brouhaha suivi d'une violente secousse réveillèrent Neelson, des bruits d'épée faisaient rage à l'extérieur. Sans attendre, le jeune homme se vêtit et prit son épée, il sortit alors de sa cabine en trombe puis longea la cabine des autres marins. Sortant sur le pont Neelson se retrouva au milieu d'une mêlée violente. En effet, un bateau des Sanguinaires, les pirates les plus infames de la région avaient décidé d'attaquer le Meghinia. Castain se battait contre deux pirates à la fois, d'un coup d'épée, il fondit l'un et assomma l'autre avec le manche de son arme. Neelson dut écarter les assaillant qui se dressaient sur son chemin puis d'un mouvement d'épaules il abattît son arme sur la corde qui retenait le mat, celui-ci vint balayer l'air et envoyer un bon nombre de Sanguinaires dans l'eau glacée. Il se mit ensuite dos à Leo, et tous deux se battaient contre les assaillants qui battirent bientôt en retraite. Reprenant son souffle, Neelson aperçut Korad trainer un jeune homme visiblement évanoui de sa poigne de fer. Puis il attacha celui-ci au mat. Intrigué, il jeta un regard interrogateur au capitaine qui prit la parole d'une voix calme :

- « J'ai trouvé ce moustique dans la cale de l'autre bateau, il tentait visiblement de s'échapper. Il s'est fait assommer par un des membres d'équipage et au vu de ses blessures, il a dû se faire fouetter un bon nombre de fois. Il reprit d'un ton autoritaire, je veux que personne ne lui parle ni ne le détache, c'est clair ?

- Oui Capitaine !

- Bien, retournez vous coucher. » Et sans plus de cérémonie, tout l'équipage se dirigea vers les cabines.

Neelson et Leo s'échangèrent un regard interrogateur, c'était bien la première fois que le Capitaine réagissait de cette manière. Il avait beau être réputé pour sa cruauté, en réalité c'était un homme juste. Il n'était pas dans ses habitudes de laisser un pauvre homme agoniser, attaché au mat du bateau, ce qui rendait Neelson encore plus suspicieux concernant l'identité du prisonnier.

Un claquement de langue se fit entendre et Neelson se surprit à fixer l'édit prisonnier depuis un bon moment, il se tourna vers l'origine du bruit et réussit discerner la silhouette du capitaine. Celui-ci était de dos, debout devant les marches qui conduisaient vers sa cabine. Neelson n'avait nul doute concernant le destinataire de ce vulgaire reproche, et sans se faire reprendre une nouvelle fois, il rejoignit Léo qui l'attendait devant les cabines d'équipage. Une fois à l'intérieur, Léonard lui jeta un regard curieux, un demi sourire aux lèvres.

- Tu n'as servi à rien tout à l'heure, quels merveilleux rêves faisait tu pour ne pas entendre le brouhaha que l'on causait depuis bien une demi-heure ?

Neelson ne comprit pas tout de suite ce à quoi faisait allusion son ami avant de feindre l'indifférence et de se diriger vers sa cabine.

- Hé, on répond à ses ainés quand même ! Quel enfant impoli. On les élève toute notre vie et c'est comme ça qu'ils nous remercient, en nous laissant mourir lors d'une bataille épique. Tout ça pour les pauvres sirènes de leurs songes...

Le ton sombre de sa voix fit sourire le plus jeune qui lança sans se retourner :

- Estime toi heureux que je vous sois venu en aide, c'est bizarrement depuis que je suis intervenu que tout est rentré dans l'ordre."

En entendant le soupir forcé de Léonard, Neelson pénétra sa petite cabine en retenant son rire. Une fois dans son lit il s'autorisa à repenser au pauvre jeune homme attaché au mat, et ne put dormir de la nuit.