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Tobio était anxieux, il ne pouvait le démentir. Il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter sur ce qu'Oikawa voulait lui dire. Et si Iwaizumi avait tout découvert ? Et s'ils ne pouvaient plus continuer à se voir pour une raison ou une autre ? L'angoisse lui étreignait la poitrine. Je ne veux pas perdre Oikawa, songeait-il. Qu'est ce que je ferais ?

Il accélérera le pas et commença à détailler les promeneurs en espérant reconnaître Tooru, mais il le vit de loin, habitué aux courbes de son corps et attiré par le lien qui les unissait -et son cœur tomba dans sa poitrine lorsqu'il s'avança lentement, comme lors du premier rendez-vous. Oikawa avait un sweat gris et noir, de marque, et un jean plissé. Ses cheveux étaient savamment ébouriffés, et il écoutait de la musique, assis sur un banc, les jambes croisées.

Quand il vit Tobio venir à lui, il eut un tressaillement, arracha ses écouteurs et se leva. Une fois face à Tobio, il parut hésitant, puis l'embrassa sur la joue et se rassit. Il toussota et tapota le banc, à côté de lui, ou Tobio s'assit d'un air perdu. Il attendit qu'Oikawa commence à parler. Pour la première fois, celui-ci semblait se débattre avec les mots. Habituellement, il était direct, ne craignait pas d'employer des expressions fortes et les mots coulaient d'eux mêmes de sa bouche, et Tobio se dit que ça devait être grave, et se crispa.

Le plus âgé s'en rendit compte et, lui faisant un sourire rassurant, il lui prit la main. Leurs doigts s'entrelacèrent par réflexe, mais Tobio se rendit à peine compte du geste, vaguement conscient d'une chaleur contre sa paume, obnubilé par les traits nerveux d'Oikawa.

-Tobio.., commença celui-ci, et Kageyama nota l'absence du -chan.

Il ne put se contenir davantage et se pencha vers Oikawa, en serrant inconsciemment sa main plus fort, et en demandant avec une pointe d'hystérie :

-C'est fini, c'est ça ? On peut plus se voir ?

Les sourcils d'Oikawa s'arquèrent et ses lèvres s'entrouvrirent. Il paraissait sincèrement surpris, mais cette expression fut bien vite remplacée par un pouffement de rire qui n'avait rien de naturel.

- Non, non ce n'est pas ça...

Tobio sentit une vague de soulagement lui traverser le corps et se relaxa, remarquant pour la première fois à quel point il était tendu. Ses doigts tapotèrent le dos de la main d'Oikawa alors que ses yeux ne quittaient plus son visage, emplis de curiosité qui avait remplacé le désespoir.

-Ça fait un moment que ça me tourne dans la tête, commença Oikawa. Je ne sais pas trop par où commencer. Par le fait qu'avec Iwa-chan, ce n'est plus comme avant... je suis ennuyé, frustré de lui. Pourtant ce n'est pas de sa faute.

-Je sais, coupa Tobio. C'est pour ça qu'on se voit, on en a déjà parlé, c'est pareil avec Hinata...

-Non.

Oikawa eut un sourire particulièrement dénué de joie et baissa les yeux.

-Sa compagnie m'est indifférente. Ce n'est pas que le cul. C'est tout.

Tobio ne comprenait pas vraiment pourquoi Oikawa lui parlait de ça. S'il en avait marre d'Iwaizumi, il n'avait qu'à le quitter. Il s'apprêta à énoncer cette idée à voix haute, mais lorsqu'Oikawa releva les yeux, ils étaient mouillés, les cils trempés prêts à lâcher les gouttes chaudes sur les joues à tout moment. Tobio referma la bouche, choqué. Il n'avait pas vu Oikawa pleurer depuis sa sixième. Au fond de lui, quelque chose remua et il ressentir l'urgence de le prendre dans ses bras, mais il resta immobile, captivé par les yeux noyés. La voix d'Oikawa était maîtrisée lorsqu'il reprit la parole.

Des Coeurs et Des Corps - Scènes coupées et brouillonsWhere stories live. Discover now