Perspective humaniste

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HISTOIRE

Introduction

À partir des années 1950 et 1960, la perspective psychodynamique et la perspective béhavioriste deviennent dominantes en psychologie.  À la suite de la Deuxième Guerre mondiale, de nouvelles préoccupations vont émerger (p. ex.  manque de sens à la vie, sentiment d'aliénation).  Elles font ressortir des questions auxquelles les différentes approches de la psychologie ne sont pas en mesure de répondre.  Ainsi, les adeptes de la perspective humaniste considèrent que de s'intéresser uniquement aux individus qui vivent des problèmes de santé mentale ne permet pas de comprendre le fonctionnement humain.  Pour cette raison, elles et ils croient que la perspective psychodynamique présente une vision pessimiste et incomplète de l'être humain – une psychologie de la  « déficience affective »  en quelque sorte.  Dans le même ordre d'idées, les adeptes de la perspective humaniste considèrent qu'il n'est pas possible de réduire la richesse de l'expérience humaine à quelques principes d'apprentissage et au comportement observable.  En ce sens, elles et ils croient que la perspective béhavioriste déshumanise l'individu en passant à côté d'aspects non directement mesurables de l'expérience humaine, p. ex.  amour, liberté, désespoir, créativité, valeurs, croissance.  James Bugental (1967/1975 : 17), par analogie, indique que si les adeptes de la perspective béhavioriste étudiaient la musique, ils ramèneraient une symphonie grandiose à une série de longueurs d'ondes.

Invention de la perspective humaniste

Au début des années 1960, un groupe de psychologues américains mené par Abraham Maslow (1908-1970) se présente comme la  « troisième force »  en psychologie.   Cette « troisième force »  devient, à partir des années 1960 et des années 1970, une alternative à la perspective psychodynamique (première force) et à la perspective béhavioriste (deuxième force).  Ce faisant, les psychologues de la  « troisième force »  vont inventer la perspective humaniste (plus populaire en Amérique du nord) et la perspective existentielle (plus populaire en Europe).

Les fondateurs de la perspective humaniste ne sont pas partis de rien.  Ils ont été influencés par le Romantisme, l'Existentialisme et la Phénoménologie (Hergenhahn 2001).  Le Romantisme est un courant philosophique et artistique inventé vers 1760.  Ses adeptes considèrent que chaque individu est unique et qu'il est important de faire confiance d'abord et avant tout à son intuition, à sa créativité et à ses émotions plutôt qu'à sa raison.  Elles et ils se méfient des institutions (p. ex.  religion, science, éducation) et des normes sociales parce qu'elles exigent des comportements qui peuvent ne pas convenir à l'individu.  Certains penseurs, comme Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), considèrent même que l'individu est naturellement bon.  L'Existentialisme est un courant philosophique et artistique inventé vers 1840.  Ses adeptes considèrent que chaque individu est unique, libre et responsable.  Elles et ils s'intéressent particulièrement à ce qui est spécial dans l'expérience humaine et au sens de la vie humaine et croient que chaque individu a la responsabilité et le devoir de construire un sens pour lui-même.  La Phénoménologie désigne une famille de méthodes de recherche qui portent sur l'expérience comme elle est vécue, sans tenter de la diviser en parties.  Différentes versions de la phénoménologie ont été mises au point par des philosophes romantiques et existentialistes au cours des années 1800.


PRINCIPES DE BASE

L'histoire de la perspective humaniste permet de comprendre qu'un certain nombre d'idées, avancées par un certain nombre de personnes sur un certain nombre d'années, ont été combinées d'une façon particulière en un système de pensée.  Les principes de base de la perspective humaniste représentent en quelque sorte les fondements de ce système de pensée ainsi que la vision du monde qu'il propose.  Les adeptes de la perspective humaniste ne remettent pas en question ces principes de base parce que cela compromettrait la viabilité de l'ensemble du système de pensée.  Comprendre les principes de base de la perspective humaniste permet de comprendre la logique derrière ses méthodes, ses applications, ses techniques, de même que la logique de ses propositions théoriques sur le fonctionnement de l'être humain.  Comprendre les principes de base de la perspective humaniste permet aussi de la comparer à d'autres approches, et de les critiquer.

Les principes de base de la perspective humaniste peuvent être regroupés en trois grandes idées.  Le premier principe de base est que, à l'échelle de l'Univers, l'être humain est unique.  Ce qui rend l'être humain unique, c'est sa conscience, qui lui permet de penser, de ressentir, d'agir de façon libre et responsable.  Il ne peut donc pas être comparé à un animal.  De plus, l'être humain fonctionne comme un tout.  Il ne peut donc pas être comparé à une machine qu'on pourrait défaire en morceaux.  Cela implique que les méthodes de recherche utilisées par les adeptes des autres perspectives de la psychologie, qui ont tendance à étudier un aspect de l'être humain à la fois sans tenir compte des autres, sont incomplètes.  Cela implique aussi que les recherches sur les animaux ne permettent pas de comprendre ce qu'est spécifiquement un être humain.  Les adeptes de la perspective humaniste ne sont toutefois pas contre la recherche.  Elles et ils croient que la psychologie doit améliorer la compréhension des différents aspects de l'expérience humaine afin d'aider les individus à enrichir leur existence.  La recherche peut être utile pour atteindre ce but.  À cet effet, les adeptes de la perspective humaniste proposent d'utiliser des méthodes compatibles avec la Phénoménologie (voir ci-dessus).

Le deuxième principe de base est que non seulement l'espèce humaine est unique, mais aussi que chaque individu est unique.  En effet, c'est la réalité subjective de chaque individu - ici et maintenant - qui cause ses comportements et ses processus mentaux.  La réalité subjective correspond à l'expérience consciente de l'individu, c'est-à-dire au contenu de sa conscience et à sa manière de vivre, de ressentir ce contenu.  La réalité subjective appartient donc à un individu en particulier.  Pour cette raison, il peut être risqué de faire de la recherche sur des groupes d'individus et de faire des généralisations à partir de moyennes qui, finalement, ne représentent pas la réalité de chaque individu du groupe.  Les adeptes de la perspective humaniste proposent donc d'étudier des individus en profondeur, avec des méthodes qualitatives (p. ex.  entrevues) plutôt que d'étudier des groupes de façon superficielle (p. ex.  méthode expérimentale).

Le troisième principe de base est que les êtres humains sont naturellement bons.  Cela implique, selon Abraham Maslow (1908-1970), que l'individu a une tendance naturelle à se développer de façon à tendre vers son plein potentiel par un processus d'auto-actualisation.  Carl Rogers (1902-1987) ajoute que l'individu est capable, en se fiant à son expérience subjective, de choisir par lui-même des activités qui le rapprochent de l'auto-actualisation et d'éliminer les activités qui l'en éloignent.  Selon les adeptes de la perspective humaniste, les comportements agressifs, intolérants et destructeurs peuvent être expliqués par la souffrance des individus qui se retrouvent dans un milieu ne leur permettant pas de se développer convenablement.


BIBLIOGRAPHIE

Cet article a été écrit en utilisant les références suivantes :

Bugental, J.  F.  T.  (1967/1973). L'homme, ce défi.  Dans J.  F.  T.  Bugental (Dir.), Psychologie et libération de l'homme (p. 11-22).  Liège (BE, EU) : Gérard et cie (Marabout).

Hall, C.  S., et Lindzey, G.  (1970).  Theories of Personality (second edition).  New York (NY, US) : John Wiley and Sons Inc.

Hergenhahn, B.  R.  (2001).  An introduction to the history of psychology (4th edition).  Belmont (CA, US) : Wadsworth-Thomson Learning.

Jourard, S.  M.  (1972).  La Transparence de soi.  Sainte-Foy (QC, CA) : Éditions Saint-Yves.

Morin, P.  C., et Bouchard, S.  (1997).  Introduction aux théories de la personnalité (2e édition).  Montréal (QC, CA) : Gaëtan Morin Éditeur.

Shaffer, J.  B.  P.  (1978).  Humanistic Psychology.  Englewood Cliffs (NJ, US) : Prentice Hall.

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