Prologue II

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Visiblement irrité, Aidan lança un nouveau regard noir à son frère.

« Ils ne vont pas nous abandonner ! Merde ! » Rétorqua l'intéressé.

« Avec l'argent qu'on s'est fait, ils sont déjà loin ! » Répondit Aidan, sûr de lui.

« C'est moi qui nous ai réuni tous les cinq ! S'ils veulent se refaire du fric, ils auront besoin de nous ! »

« La bande à James n'aura pas fait long feu ... » Se contenta de répondre Aidan avant de s'allonger dans sa couchette, tourné vers le mur.

James lâcha le pendentif de son collier et fit dos à son frère, boudeur.

Sa petite sœur, March, le regardait avec de grands yeux du haut de ses sept ans. James lui sourit pour tenter de la rassurer.

Quelques jours auparavant, la « bande à James » composée de quatre bandits à la petite semaine d'une vingtaine d'années accompagnés d'une fillette de sept ans, chacun armés de bâtons et petites hachettes, s'en était pris à une carriole non escortée. Les domestiques qui la conduisaient avaient accepté de donner les couverts et les assiettes qu'ils amenaient au château.

Fiers de leur première prise en deux semaines, le groupe de voleurs avaient fanfaronné et Aidan voulut profiter de sa position de pouvoir en martyrisant les pauvres serviteurs. La bande, essayant de le retenir, avait réalisé trop tard que des gardes s'approchaient de la carriole et une course poursuite s'était engagé.

Le cheval étant plus rapide que l'homme, Aidan, James et March furent vite rattrapés et jetés en prison en vue d'être exécutés sur la place publique à titre d'exemple. Ne voyant pas leurs compagnons dans les cellules adjacentes, ils espéraient de tout cœur que ceux-ci ne s'étaient pas fait tuer, et qu'ils viendraient les sauver d'une quelconque manière que ce soit.

Enfin, James espérait, Aidan réfléchissait déjà à la façon dont il pourrait pisser sur le prochain garde qui viendrait leur apporter la nourriture afin de le distraire et peut-être leur donner une chance de s'échapper, et March se demandait si la petite souris du fond de la cellule daignerait sortir de son trou.

Bref, nos trois compères étaient au fond du trou.

C'est dans ce contexte particulièrement heureux et rempli de pensées joyeuses que Lovisa arriva, entourée des gardes de la salle royale. La pièce contenait un total de 7 cellules entourant le couloir principal délimitées par des barreaux. La seule sortie était un escalier de pierre menant au château.

La jeune femme fut jetée dans la cellule la plus distante de la sortie, qui se trouvait également adjacente à celle des trois voleurs. Quelque peu intimidée dans un premier temps, Lovisa tenta de s'approprier son environnement. Elle avait pris la décision de ne plus être noble parce qu'elle ne voulait pas qu'on lui dicte sa conduite, elle n'allait pas commencer maintenant à accepter son sort.

« Bonjour », dit-elle avec plus de timidité qu'elle ne l'aurait voulu.

James et Aidan, qui la dévisageaient sans s'en rendre compte furent totalement pris au dépourvu. Tentant de reprendre de la contenance, Aidan lui répondit d'un air malsain.

« Tu ne devrais pas t'adresser à nous comme ça, fillette. Tu ne sais pas pourquoi nous sommes là », débuta-t-il avec un sourire.

Lovisa lui sourit en retour.

« Vous nous plus, vous ne savez pas pourquoi je suis là », dit-elle, entrant dans son jeu.

Constatant que les vêtements de la jeune femme indiquaient une lignée noble, James eut soudain une idée. Il interrompit ce que son furieux frère s'apprêtait à dire pour éviter qu'il ne vienne tout gâcher. Il passa la tête entre les barreaux pour se montrer plus imposant, le pendentif de son collier flottant désormais dans le vide.

« Certes, mais il semble clair que ta place n'est pas dans cette cellule. Il ne serait pas étonnant que tu sois amené à en sortir rapidement, n'est-ce pas ? »

Le visage de Lovisa se rembrunit.

« Tout dépendra de ma mère ... » laissa-t-elle échapper. « Mais je préfère honnêtement être ici que de retourner là-bas. »

Les yeux de James s'écarquillèrent, le voleur sentant son plan lui échapper.

« Mais comment est-ce que tu peux dire ça ? T'as bien regardé où t'es arrivé ? Au moins là-haut tu as de quoi manger à ta faim ! Des beaux vêtements ! De l'argent ! »

La jeune noble s'enflamma.

« Tout ça n'est qu'une cage dorée. Ici au moins, je peux vivre comme je l'entends. »

« Mais t'es complètement tarée ! » S'exclama James.

Après une petite pause, elle ajouta.

« Tu parles de choses que tu ne connais pas ... » Tentant de donner un nom à ce nouveau visage, elle baissa son regard jusqu'à arriver sur le pendentif de James. « ... Griffe. »

Ne comprenant pas, James baissa rapidement la tête, se souvint qu'il portait des griffes d'ours en guise de pendentif. Il les avait découpées sur un cadavre d'ours plusieurs années auparavant et avait décidé de les porter. Sentant que « Griffe » n'était pas forcément un surnom très glorieux, il se sentit obligé d'ajouter :

« Sinistre ! Griffe ... Sinistre ! Grimclaw ! »

Aidan le dévisagea, incrédule. Lovisa sourit de plus belle, encore moins impressionnée qu'avant. « Au moins ça la fait sourire », se dit James. Il n'osa pas soutenir le regard de son frère, et continua dans son argumentation.

« Tu n'aurais pas envie de ... vivre comme tu l'entends ... dehors ? »

« Bof » Dit-elle, joueuse.

Elle fit une petite pause, le temps de voir le visage de son interlocuteur de décomposer avant d'ajouter :

« Ça vaut peut-être le coup d'essayer. »

James sourit, triomphant.

« Mon nom est Lovisa ! » Lança la jeune femme.

« Je suis ... Grimclaw, mais tu peux m'appeler James, voici mon frère, Aidan, et ma petite sœur, March ! »

« Enchantée ! »

Le Choix de la Liberté - Un Conte d'AntéronieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant