Lettre 2

42 0 0
                                    

2ème lettre, y'en aura-t'il d'autres ? Vais-je continuer à t'aimer encore ? 3jours . 3jours sans nouvelles, sans réponse. Je ne sais pas ce que tu fais, ni ce que tu penses. A vrai dire, t'as toujours été mystérieux. Mais là, en plus d'être mystérieux, t'es indécis. Tu l'es tellement que tu disparais. Tu me laisses une deuxième fois dans l'oubli par peur de l'être. Tu veux marquer, Paul, très bien mais tu sais aussi à quel point t'es ancré en moi, à quel point tu m'obsèdes. Le mot est fort, mais à ce stade, c'est une obsession. Quel genre de fille normal t'écrirais des lettres car elle à dépassé le summum de sms envoyés? Et quel genre de fille ferait passer tous ses problèmes après toi? Le genre à modifier tout son emploi du temps pour te voir, le genre à essayer de trouver milles solutions pour ton mariage. Et pleins d'autres, pleins d'autres trucs débiles que je te trouve ou que je fais mais que tu ne verra jamais, parce que t'es trop borné et que tu ne penses qu'à toi. On se ressemble finalement, toi tu penses à toi pendant que moi je pense à toi. Tiens, une fois après que tu m'ai lâché, ton pote est venu me dire qu'il aurait aimé qu'il se passe quelque chose entre nous (il s'intéressait plus à moi que toi) et tu sais ce que j'ai répondu ? "Il y a Paul, je peux pas lui faire ça". Voilà tout ce que j'ai trouvé à dire après que tu m'aies clairement dit que tu me prenais pour une conne. Et j'aurais voulu lui dire plus, beaucoup plus, j'aurais voulu lui dire que moi, je pense à toi, même si t'es pas là, même si tu t'en fous, que tu penses pas à moi, même si tu me fais galérer. Il m'aurait dit de t'oublier et je lui aurais dit que je peux pas, je peux pas cesser d'aimer quelqu'un qui m'a marqué à ce point et partir avec son pote. C'est pas si facile, l'amour. L'amour rend fou, l'amour peut tuer, l'amour fait pleurer, rire, devenir lunatique, bipolaire, aveugle et toutes les maladies du monde. Tu sais, il y a des femmes qui ont été si perturbés de se faire quitter qu'elles en sont mortes. Rupture d'anévrisme, AVC, crise cardiaque, cancer du sein. Pire qu'une cigarette au final. Et pourtant, si c'est un amour avec toi, je ne demande que ça : de rire même pour souffrir, de chanter même pour pleurer, de danser même pour ne plus manger. J'entends ton prénom dans tous les échos du monde; ça devient lourd et grave de demander à la prof de répéter à chaque fois que je crois entendre ton prénom. T'entendre, entendre ta voix, douce et grave; ton rire, timide et apaisant; ta façon de parler. Tu ne t'es jamais demandé comment ça aurait pu être si tu n'étais pas parti? Et bien je vais te le dire. D'abord, cela ferait presque six ans. On se serait vus quand je serai rentré de Tarentaise, fin août. On aurait continué de s'aimer. Ensuite, tu m'aurais aider avec mes problèmes, il n'y aurais jamais eu Sacha, Hector, Valentin, Aurelien, Gabin... en bref, tous ceux qui m'ont détruit. On aurais jamais été détruit par personne parce qu'on aurait continué d'être ensemble. On aurait traversé chaque épreuve main dans la main. Au bout de trois ans d'amour platonique, on aurait fait l'amour. Tu aurais été doux et je n'aurais jamais eu mal, puis on serait allés faire des tests pour faire l'amour plus souvent, et à chaque fois, ça aurait été meilleur. On aurait tout essayé, on aurait fait l'amour dans toutes les villes du monde, partout, dans tous les lieux possibles. Tu m'aurai surprise avec un bouquet de rose à la sortie du lycée pour nos quatre ans puis on aurait fait un week-end road trip. On serait partis en Amerique, en Espagne, à Amsterdam... On aurait été fous, fous amoureux, pas de disputes, pas de questionnement, que de l'amour. Tu aurais été jaloux, je t'aurais rassuré et inversement. Je n'aurais plus peur de rien, on aurait eu plus peur de rien à force d'avoir tout affronter ensemble. Invincible. On aurait été invincible. Et cette année, pou nos six ans cet été, on se serait offert un appart à Paris. Tu serais resté toutes ces années en haute-savoie à m'attendre pour qu'enfin on partent tous les deux. On serait dans un immeuble hausmannien, on commanderais sur Ubereats et en attendant, on ferait l'amour. Le matin je me réveillerai, j'enfilerai un de tes tee-shirt avant de me diriger à la fenêtre pour voir la tour eiffel, Montmartre... ça sentirai le café dans l'appartement, quel bonne odeur. Je m'allumerai une roulée sur le balcon en plus de mon café. Tu irai chercher des croissants chauds et tu m'embrasserai dans le cou en me prenant par la taille. Je sourirai. Tu me dirais que je suis belle que tous les jours depuis six ans je deviens encore plus belle, que tu aimerais que je ne sois qu'à toi, que je ne parte jamais, que personne d'autres que toi m'attirerai. Je me retournerai et je t'embrasserai sur le front, signe de consolation et de protection. La suite, tu peux l'inventer si tu veux. En Allemand on parle de 'Das Kopfkino' (le cinéma dans la tête). A partir de Paris, j'ai tout inventé, on peut encore changer tout ça, il reste dix mois. Et si tu veux que j'aille encore plus loin dans mon imagination, je pourrais te dire qu'à 25ans, tu te marieras, sauf que la dernière heure avant cet événement où je serais convié, j'aurais reçu un sms : "C'est la dernière heure. Un mot de toi et j'arrête tout." Auquel j'aurais répondu : "Sois heureux, c'est tout ce que je veux." C'est ça qui me fait tenir Paul, rêver, imaginer ce qui aurait pu se passer s'il y avait eu ça ou ça ou bien ce qui pourrait se passer après un message risqué, un appel foireux, une dispute mal prononcé, un mariage arrangé, un baiser transformé. Nos baisers Paul... Je les aimes. Je les aimes tellement. Tout comme toi. On ne peut pas faire l'amour alors on s'embrasse, on embrasse notre amour, notre colère avec toute notre âme, tout notre passé. C'est notre façon de s'aimer : fumer et s'embrasser. Peut-être qu'on aurait jamais commencé à fumer si t'étais resté. Peut-être qu'on détruirait pas ce qu'on pourrait construire. Pourquoi c'est si dur d'attendre un message? De ne pas en envoyer? Qui est le problème maintenant? Toi qui ne répond plus ou moi qui t'harcèle? Je veux savoir bordel. Que s'est-il passé? Comment en l'espace de quelques heures j'ai pu perdre contact avec toi? Qu'as-tu appris? Vais-je devenir folle? Je pense. A force de penser à ce que je vais te dire quand tu reviendras, à force de m'imaginer tous les scénarios du monde, d'essayer de te conquérir. Mais j'aurais pas le courage de t'envoyer ces lettres tant que je ne saurais pas ce qu'il se passe. C'est la huitième feuille que je remplis et je ne trouve toujours pas de réponse. Comment tu veux que je crois que tu ne ressens rien alors que t'as tout fait pour me rendre jalouse, alors que t'as fais 1km à pied à 4heures du matin pour m'envoyer un message, alors que t'es venu me chercher toutes les fois où je me sentais mal à cause de mes parents, alors que t'es revenu t'excuser, alors que tu m'as confié des trucs que même tes parents ne savent pas, et tu t'attends à ce que je te laisse ? Après tout ça? Après tous les bas qu'on a eu tu ne penses pas qu'on peut affronter cela? Cette fois je suis en histoire et on parle de la Turquie. Je vois ton frère, souriant et extraverti, tous les jours. C'est un cauchemar. Voir ton petit toi tout le temps ça me détruit. Voir ton sourire sur les photos, ça me détruit.

Est-ce que je t'aime suffit ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant