Chapitre 1

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Les flash glaçants des appareils photos illuminent la salle, figeant l'horreur en même temps. La scène est calme. Pas silencieuse, juste sans agitation superflue. On entends juste le bruit de pas des enquêteurs et les paroles inaudibles des secours face au nombre de victimes.

Les visages quand à eux sont figés, choqués et horrifiés mais en même temps tellement professionnels. Seuls trois élèves ne sont pas décédés sous les balles. Deux d'entres eux sont néanmoins grièvement blessés, seule une adolescente a miraculeusement réussit à échapper à son professeur. Elle n'en reste pas moins choquée, elle n'a pas prononcé un mot depuis l'arrivée des secours et des services de police. Ils l'ont retrouvée allongée par terre, feignant la mort. Elle avait du sang sur le visage, ses vêtements étaient également tâchés du sang qui n'était pas le sien. Il a fallu du temps aux secours pour obtenir un regard de sa part. Mais il était vide, comme si ses yeux en avaient trop vu. Elle était restée comme cela jusqu'à ce que l'ambulance l'emmène à l'hôpital le plus proche où elle fut prise d'une crise de panique impressionnante suivie de tremblements incontrôlables et de pleurs à n'en plus finir.  

On compte trente victimes. Tous assassinés par leur professeur de français. Qui l'eût cru ? C'était un homme divorcé, sans histoire particulière selon les autres. C'était un personnage discret, qui parlait peu de sa vie à ses collègues. Evidemment il leur parlait, comme toute personne normale, mais il ne s'attardait jamais sur son passé et sa vie privée. Il était bien aimé de ces collègues, quoiqu'un peu incompris.

Ses élèves disaient bien l'aimer, il ne se plaignaient pas quand ils avaient cours avec lui. Il savait détendre l'atmosphère et faire en sorte que l'on se sente bien pendant son cours. Il y avait une seule et unique chose qu'il ne tolérait vraiment pas : l'intimidation faite d'élèves à élèves. Lorsqu'un élève était moqué pour une quelconque raison, il n'était plus du tout le professeur sympathique que ses élèves connaissaient si bien. Il entrait dans une colère noire, on aurait parfois pu croire qu'il allait frapper l'auteur des insultes. Si bien que dans son cours, les élèves étaient respectueux et tout se passait généralement bien. 

Un professeur d'allemand avait raconté qu'il lui arrivait parfois d'arriver énervé, tremblant de rage, mais sans jamais plus développer. Il faisait un peu ours à vrai dire.
Les enquêteurs pensent creuser la piste d'un drame familial et d'une possible dépression.
Le concerné avait tenté de se suicider en se tirant une balle dans la tête, hélas pour lui l'inclinaison était mauvaise. Il a été emmené d'urgence à l'hôpital, le dégoût de devoir s'occuper de cet homme se lisait sur le visage de la stagiaire.

La salle quand à elle est insupportable à regarder : les tables sont pour la plupart renversées ou cassées, les chaises ont ont subit le même sort, le sol est recouvert de sang et de traces de lutte apparentes. On peut deviner les derniers mouvements de désespoir de certains élèves à cause des traces laissées sur le sol. Cette salle où les élèves étaient d'habitude si vivants et si à l'aise était désormais froide et morte.

On entends encore au loin le bruit des sirènes des dernières voitures de polices ou bien des ambulances. Mis à part cela, il n'y avait plus aucun bruit, juste un portable qui vibrait. L'inspectrice s'approche doucement, prends le portable et le retourne pour en découvrir l'écran, avant de fermer les yeux. Sur l'écran était affiché "Maman". C'est le portable d'un des élèves décédés. Tout le monde ici savait qu'il allait falloir prévenir les familles, entendre les cris déchirés des parents qui n'y croient pas, devoir tenter de calmer cette douleur qui leur consume l'esprit et pire encore, devoir poser des questions aux parents sur la vie de leur enfant disparu.

Les journaliste sont déjà devant le lycée, prêts à sauter sur la première personne qui sortira du bâtiment. Evidemment, personne ne répondra à leurs questions. Les personnes continueront à faire leur travail, aussi difficile soit-il. Les passants se sont arrêtés, il s'interrogent. On voit des personnes qui rentrent du travail, des nourrices qui promènent les enfants, des personnes âgées qui promènent leur chien, des élèves qui rentrent chez eux. Une chose est commune à toutes ces personnes: leur expression. On peut lire sur leurs visages de l'inquiétude, de l'incompréhension et de la peur. Tous ont une question en tête : Qu'est-il arrivé, et à qui ? Aucun d'entre eux ne s'attends à la terrible réponse. Personne n'y croirait. Certaines personnes pleureraient tandis que d'autres garderaient le silence, choqués.

Il faudra expliquer. A tout le monde. Il faudra expliquer l'horreur de ce monde. Il faudra expliquer aux enfants pourquoi leur frère ou leur sœur ne rentrera pas du lycée ce soir. Il faudra l'annoncer au reste de la famille. 

Il faudra l'accepter.

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