Travel in Times

Chapitre 5 : L'Antiquité gauloise

Cette fois-ci, quand Tania reprit conscience, ses poumons étaient toujours emplis de fumée. En ouvrant les yeux, elle se rendit compte qu'elle se trouvait à présent dans une maison en feu. Au moins, se dit-elle, cette fois, elle avait une chance de s'en sortir. Ses réactions étaient ralenties, mais elle parvint à se glisser dehors, au prix d'efforts considérables. Une fois dehors, ses jambes se dérobèrent sous elle, et elle s'effondra sur le sol. Un groupe de villageois qui se trouvait là vint à sa rencontre, et l'aida à se relever. Ils lui demandèrent si d'autres personnes étaient dans la chaumière. La jeune fille répondit que sa famille devait encore se trouver à l'intérieur. En effet, elle entendit des cris provenant de la maison. Quand les hommes voulurent entrer, l'incendie redoubla, les obligeant à faire demi-tour. Tania regardait la scène, impuissante, l'esprit trop embrumé pour faire quoi que ce soit. Finalement, le groupe revint vers elle et l'emmena loin du danger. Des larmes coulaient sur les joues de la jeune fille, sans qu'elle sache vraiment pourquoi. C'était comme si elle venait de perdre des membres de sa famille alors qu'elle n'avait aucune idée de ceux qui se trouvaient dans la maison. Elle supposa que c'était le choc d'avoir failli mourir dans le feu. Elle se laissa transporter dans une taverne, et accepta l'hydromel que lui tendaient les hommes. Un petit remontant ne pouvait pas lui faire de mal. Elle alla ensuite se faire examiner par le druide du village : elle n'avait aucune blessure physique mais le mage lui conseilla de garder le lit pour la journée, conseil que suivit Tania. Pendant ce temps de répit, elle pensa qu'elle était comme un certain docteur, voyageant dans le temps ayant pour devoir de préserver le passé et de s'en souvenir. C'était une sensation plutôt agréable, en soi.

Le lendemain, elle fut emmenée dans la hutte du chef de village, où son sort fut décidé. Elle irait habiter chez un couple sans enfants du village, qui étaient d'accord pour l'accueillir, jusqu'à ce qu'un mari lui soit trouvé. Tania accepta cette idée, elle n'avait à vrai dire pas vraiment le choix. Il s'avéra par la suite que ses parents d'adoption étaient les propriétaires de la taverne. La jeune fille passait donc ses journées à servir des cervoises et à manger aux hommes du village. Cela lui plaisait beaucoup, et elle recevait même quelques pourboires. Qui eut cru que ce système existait déjà dans l'Antiquité ? Elle se rendit compte avec satisfaction qu'elle portait toujours son bracelet. Grâce à son argent, elle s'acheta une fibule en or, qui maintenait à présent sa cape. Tania passait le plus clair de son temps libre dans les bois, à observer et écouter les leçons du druide qui l'avait soignée. Celui-ci ne voyait pas ses actions d'un bon œil. Ce savoir était réservé aux hommes et aux druides, une femme n'avait pas à se mêler de ce genre d'affaire. La jeune fille contourna donc cette interdiction en mettant en place ses observations à distance. Le nombre de plantes aujourd'hui considérées comme des mauvaises herbes, et ayant en fait des vertus médicinales était impressionnant. Tania fit de son mieux pour retenir celles qui pourraient lui être utiles, et pour apprendre lesquelles soignaient quels maux. Il faudrait qu'elle les teste à son retour à la maison, si jamais elle parvenait à rentrer un jour. En attendant, elle décida de simplement se promener dans les bois, pour changer un peu. C'est ainsi qu'au détour d'un sentier, qu'elle vit une légion romaine. Tous ses sens furent alors en alerte : la guerre des Gaules ! Cela ne pouvait être que cela. Les Romains venaient pour envahir le village ! Il fallait qu'elle prévienne les autres, et rapidement. Tania rebroussa chemin en courant et alerta les villageois. Cependant, personne ne crut à ses dires. Il fallait absolument qu'elle convainc quelqu'un, ou tous serait massacrés avant le crépuscule. Elle se rendit alors au seul endroit où elle serait prise au sérieux, chez elle. Les taverniers écoutèrent son histoire de bout en bout, sans l'interrompre une seule fois. Quand elle eut terminé, ils lui demandèrent de les conduire au sentier où elle avait vu les légionnaires. La jeune fille s'exécuta et les conduisit sur le sentier, tentant de déduire l'endroit où se trouvait la garnison, après ces quelques temps de marche. Ses calculs s'avérèrent exacts. Au détour d'une clairière, les trois gaulois virent les soldats romains en pleine pause de ravitaillement. Elle remarqua encore une fois qu'ils étaient très ressemblants aux illustrations de ses livres d'histoire. Il faut dire que les vestiges de cette époque étaient nombreux à son époque, et les représentations étaient plutôt réalistes, pour l'époque et le support. Les paroles du couple la ramenèrent à la réalité. Ils disaient qu'il fallait prévenir les autres, et ressortir les armes. Ils ne s'en étaient pas servis depuis les accords de paix entre les différents clans gaulois, quelques années auparavant. Encore une fois, ils allaient devoir se battre, non plus pour agrandir leur territoire, mais pour préserver leur liberté. Arrivés au village, les taverniers accoururent chez le chef et leur racontèrent ce qu'ils avaient vu, exactement comme Tania l'avait décrit. Celui-ci ne put plus nier l'évidence. S'ensuivit alors un branlebas de combat, au cours duquel tous les villageois furent appelés à se rassembler pour former une stratégie de combat. Beaucoup étaient sceptiques, mais suivirent les ordres de leur chef. Les armes furent sorties des coffres, affutées et les cuirasses époussetées. Si bien qu' au milieu d'après-midi, tous les hommes étaient fin prêts pour le combat. Au bout de quelques heures, ils crurent à une farce, retirèrent leurs protections et se dirigèrent chez eux. Cependant, peu de temps après, des cors sonnaient autour du village. Tous se rendirent à l'évidence, Tania avait raison depuis le début, ce n'était donc pas la farce d'une gamine qui voulait se divertir. Le danger était réel, et tous les hommes revêtirent glaives, écus et cuirasses. Ils se mirent en formation sur la place du village, et attendirent l'assaut de leurs ennemis, qui ne furent pas longs à se montrer. La jeune femme se serait cru dans le décor d'un péplum : l'armée romaine formait comme un mur, et étaient largement supérieurs en nombre. Ses amis n'avaient aucune chance, elle en avait la certitude. Cependant, elle ne pouvait se résoudre à les regarder se faire massacrer, elle devait se battre elle-aussi. Aussi, elle se dirigea dans la hutte de ses parents et prit le glaive de son père. Elle trouva dans un coin, une cuirasse, tout jute adaptée à sa taille. Elle supposa que celle-ci appartenait au défunt fils des taverniers, mais le temps n'était plus aux hypothèses, il fallait qu'elle rejoigne les autres. Quand elle fut dehors, la bataille faisait déjà rage. Les gaulois luttaient avec acharnement, dans la force du désespoir. Elle se joignit à eux, et élimina plusieurs de ces ennemis, avec une rage qui la surprit elle-même. Soudain, elle entendit le tavernier crier. Elle se précipita vers lui pour lui porter secours. Il était à terre, le thorax barré d'une profonde entaille. Tania sut immédiatement qu'il serait trop tard pour le malheureux. Elle s'agenouilla à son côté, retenant ses larmes, et tenta de réduire la plaie. L'homme lui dit alors qu'il était trop tard, et lui ordonna de rentrer se mettre à l'abri. La jeune fille s'obstina, et resta avec lui jusqu'à ce qu'il rende son dernier souffle. Puis, elle reprit la bataille, jusqu'au moment où elle sentit une douleur lancinante dans son dos, et le sang couler le long de sa colonne vertébrale. Elle savait ce que cela signifiait, elle allait mourir dans quelques instant, mais cela lui était égal, elle s'était battue pour une cause juste. Elle avait défendu ses ancêtres, les siens en quelque sorte. Tania était fière de cela, mais ses forces l'abandonnaient. Elle s'écroula sur le sol, et ferma les yeux.