Hannah

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Le 31 octobre à 22h59,

J’ai peur. Les corps tombent au-dessus de nos têtes. Je ne tiendrai pas. Je me sens faible et ma tête tourne de plus en plus. Lukas. Il est à côté de moi et tente de gérer cet atroce évènement tout en me soutenant, je le vois à son regard froid et détaché mais aussi chaleureux et bienveillant. Il ne veut pas se laisser dominer par des émotions néfastes comme la peur et la panique. Je dois me ressaisir, il ne peut pas porter le poids de nos vies sur ses épaules. Le sang bat à mes tempes. Je suis plus forte que ça. Je serre sa main, me tourne vers lui et dès lors que nos regards se croisent, je le sais. Je le sais au plus profond de mon être et cette pensée me glace le sang. Il a tranché. Il est, plus que quiconque, conscient de la gravité de la situation, il a connaissance de tout ce que cela implique, il pense avoir pris la bonne décision. Ne lui reste plus que mon accord. Vais-je en être capable ? Il m’expose son plan aussi clairement et calmement que possible. Nous sommes maintenant bloqués depuis une heure et demi, la pression dans mon crâne est à présent insoutenable, il n’y a toujours personne aux alentours, les hurlements se sont tus, les un sont morts ou évanouis, les autres économisent leurs forces et réfléchissent, nous voilà donc dans un silence tonitruant. J’ai peur. Malgré cela, j’accepte son idée. On doit s’en sortir et prévenir les secours pour sauver ceux qui sont toujours en vie. Lukas m'aide à me décrocher, nous nous tenons à la barre et balançons nos jambes pour poser nos pieds sur les rails en face de nous. Nous y parvenons, nous n'avions plus qu'à faire glisser nos mains sur la structure métallique et à descendre de la même façon que sur une échelle. Nous commençons notre descente, mon pied dérape. Je me retrouve alors au-dessus du vide, mes pieds s’agitant dans l'air fluide de la nuit. Je panique mais Lukas me conseille de me calmer pour ne pas aggraver la situation. Je me concentre sur mes mains, elles ne doivent pas lâcher. Lukas me tend la main, je m'en empare et réussi à revenir sur la structure de l'attraction.

Mon souffle se coupe, ma vision se brouille, je ne peux pas croire qu'il s'agisse de la réalité. Quelqu'un tombe, tombe, tombe, toujours plus bas, plus vite, comme aspiré par un trou noir.

Une personne grande et mince, aux cheveux bruns et en bataille. Lukas. Ce dernier geste lui a été fatal,  son crâne se fracasse contre le sol, ses membres forment des angles étranges autour de lui. Mes jambes oscillent, j'ai le souffle court et les oreilles qui bourdonnent. Je peine à mettre un pied en-dessous de l'autre tant ils tremblent, j’oublie tout, le manège, le silence assourdissant, les morts, la structure métallique, le vide. Seul la vision de sa chute tourne en boucle dans ma tête. Je descends aussi vite que mon corps le permet, rejoindre Lukas, être près de lui. C’est le plus important. D’autres personnes ont réussi à se détacher et commencent à rejoindre le sol, elles sont quatre, ce sont celles qui étaient dans les deux derniers wagons. Elles partent chercher les secours. Tout semble si lointain, ce n’est qu’un rêve, je vais me réveiller. Je descends, Lukas est tout proche. Une fois à terre, je cours vers lui et me jette à son cou, la vie commence à le quitter, son coeur ne bat plus. La pleine lune nimbait la scène d'un éclat irréel et dans cette lumière mes larmes se mêlèrent à son sang.

Le soir d'Halloween (version longue)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant