Chapitre 6 : Idées noires

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Les heures étant ce qu'elles étaient, le fameux 'demain' dont avait parlé Eijiro était arrivé. Beaucoup trop rapidement et brutalement. Izuku n'y avait pas songé de la journée, mais Ochako, en bonne amie surexcitée qu'elle était, le lui avait rapidement rappelé. Il avait alors éternué et prétexté un symptôme de début de maladie -toute excuse était bonne pour ne pas s'y rendre. Mais son amie brune avait rigolé en lui disant d'un air malicieux que c'était bien essayé, mais qu'il en fallait plus pour la convaincre. Bien sûr, Izuku était déjà allé à des dizaines de soirées, celles entre étudiants ou tout simplement en boîte avec Ochako lorsqu'ils avaient enfin atteint l'âge légal pour y entrer. Il aimait faire la fête, pouvoir danser et bouger, boire... Mais Dieu, il aurait tout donné pour ne pas aller à cette soirée. De plus, ça faisait bien longtemps qu'il n'en avait plus fait.

Le jeune sans alter, au milieu de héros. Totalement immergé dans ce monde qui le narguait depuis des années. Il s'était toujours efforcé d'éviter socialement les héros, et bon sang quelle idée avait eu Red Riot en l'invitant à venir faire la fête. Izuku avait tenté de lui dire qu'il n'était pas certain de venir, mais le grand sourire du rouquin s'était immédiatement fané et ses traits avaient prit un air peiné alors qu'un petit « oh non... » traversait ses lèvres.

Comment pouvait-on vouloir décevoir quelqu'un d'aussi gentil et mignon que Kirishima ?

Alors il avait dit à Eijiro qu'il s'arrangerait pour venir.

Izuku était prêt à se faire du mal pour faire plaisir à un (presque) inconnu. Pour ne pas culpabiliser. C'était peut-être égoïste, d'y aller pour éviter d'avoir sur la conscience qu'il avait rendu une personne triste, mais il s'en fichait pas mal. Mais quand on y songeait, il était bien trop naïf et bien trop con.

Son cœur allait s'accélérer, et sa poitrine se comprimer. Il allait suffoquer et paniquer. Sa gorge se nouerait alors qu'il allait se poser dans un coin, et regarder ceux qu'il n'avait pas pu devenir le narguer inconsciemment. Alors il allait jeter sa tête en arrière, regarder le plafond, récupérer sa veste et allait se poser dehors. Loin de tout ça, et attendre qu'Ochako ait envie de partir. La connaissant, elle allait boire, et il ne tenait pas à ce qu'elle rentre toute seule à l'appartement dans son état.

Il fut interrompu dans ses pensées, alors qu'il nouait les lacets de sa paire de chaussures rouges :

« Izuku-kun, j'ai retrouvé ta ceinture, elle était dans la salle de bain » arriva Ochako, tenant dans ses mains une ceinture très simple et assez fine.

Izuku la saisit en la remerciant, puis l'attacha à sa taille. C'était sa mère qui la lui avait offerte à son dernier anniversaire. Elle était en cuir noir, un peu usée, mais toujours très belle et en bon état. Elle avait du coûter assez chère, mine de rien.

Les craintes d'Izuku furent rapidement confirmées, la musique sonnait fort dans ses oreilles, les basses des enceintes envoyaient des « boum boum » qui accompagnaient les mouvements de son cœur et lui devenaient insupportable. Izuku paniquait. Maintenant qu'il y était, il se rendait compte qu'il aurait vraiment dû poser un thermomètre sur le radiateur pour simuler une fièvre. Il n'aurait jamais dû venir alors que son instinct lui recommandait de s'abstenir d'y aller. Il aurait dû s'écouter. Voir tous ces héros lui rappelait que lui n'avait pas eu cette chance de pouvoir en devenir un, qu'il y avait eu des inégalités ainsi que des injustices naturelles. Il ressentait la distance qu'il y avait entre eux et lui, elle etait omniprésente et presque palpable.

Ochako, en bonne sociable, avait dû se trouver des fêtards avec qui danser et discuter, a l'heure qu'il était. Elle l'avait emmené ici pour qu'il s'amuse et arrête de penser à ses cours, pour qu'il se détende, mais peut être qu'Izuku aurait du lui expliquer son mal-être quand au fait de venir à cette soirée...? Il ne fallait pas lui en vouloir, Izuku le savait, et pourtant, une petite pointe de reproches germait en lui.

Un tournis le prit.

Bon sang, qu'il se sentait mal.

Bien sûr, il n'y avait pas que des héros, il y avait aussi des citoyens normaux qui devaient être amis avec Eijiro, mais ils étaient bien là et reconnaissables, ces défenseurs de la loi. Ils avaient tous de grands sourires, ils avaient l'air d'être les plus heureux du monde, pour Izuku.

Il se leva du canapé, et alla se prendre un verre, et un deuxième, ainsi qu'un troisième.

Quand on y réfléchissait, s'enchaîner les verres alors qu'on ne tenait pas très bien l'alcool n'était pas la meilleure idée de la soirée. Et alors qu'Izuku espérait un effet anesthésiant la douleur, ses émotions se décuplaient, et bordel que cette boule au ventre faisait mal ! Il était encore maître de ses actions, alors comme il l'avait prédit avant de venir ici, il se rendit dehors, et vint s'assoir sur le trottoir, posant sa tête dans ses bras reposés sur ses genoux pliés. Quelques groupes discutaient ici et là, leurs membres rigolant, généralement avec un verre de bierre à la main. La musique s'entendait encore, comme un éco sourd étouffée par les murs. Et le vert se dit bêtement qu'Eijiro avait dû passer pour prévenir les voisins du grabuge qu'il allait y avoir.

Son regard était encré sur le goudron depuis plusieurs minutes déjà, tête baissée, il regardait devant lui et attendait il ne savait quoi. Des bruits de pas arrivèrent à ses oreilles, et deux chaussures marrons se stoppèrent devant lui. La voix d'un blond qu'il ne connaissait que trop bien mais qui aurait pourtant était son dernier choix si il avait dû deviner l'identité de la personne qui l'avait approché résonna :

« Ça se voyait que tu voulais pas v'nir, mais tu t'es quand même pointé, le Nerd. »

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C'est clair, mes chapitres ne font jamais la même taille.

12 décembre 2018

(PAUSE)Coffee - KatsudekuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant