Si on m'avait dit que souffrir était une action qui s'exécutait en silence, j'aurais souri et gardé pour moi que je trouvais cette pensée idiote. Malheureusement, le destin a voulu que la sensation de souffrance, de pure douleur, me toucha en plein cœur, tel une lame bien aiguisée et préparée au combat. Je replongeais mes oreilles dans mon bonnet rouge et je retraçais comme chaque jour le chemin du retour, seul sentier que je m'étais autorisée à mémoriser après sa mort.
Il passa vingt minutes entre le moment ou je quittais le campus et ou, comme chaque jours, j'atteignais le perron de la maison dans laquelle je vivais avec mon père. J'ouvrais la porte avec un grincement sinistre qui me fit pousser un soupir empli de tristesse. Je lâchais brutalement mon sac et envoyais bouler mes converses blanches dans le hall. Je me dirigeai vers ma chambre et y entrai, les yeux dans le vague. Je m'appelle Storm et j'ai quinze ans.
Nous sommes arrivés, mes parents et moi, à Paris il y a de cela trois ans. Je venais à peine d'entrer en cinquième, et j'étais encore assez timide et peu sociale. En moins de temps qu'il n'en faut pour dire ouf, la déléguée de la classe, Lénaïs Durand, m'avait pris sous son aile et me protégeait comme le faisait une sœur. Nous avions rapidement fait connaissance et nous sommes devenues amies au même rythme. Nous avons réussies à passer en quatrième, à la grande joie de mes parents. Et là, le drame. Nous rentrions du mariage de ma marraine, il devait être à peu près minuit et quart. Nous étions sur l'autoroute et il n'y avait pas grand monde. Mes parents n'avaient pas bu pour éviter l'accident. Mais l'alcool n'était pas toujours la source principale des incidents . Il y avait un peu de gel, mon père a dérapé. Durant plusieurs minutes, la voiture a enchainé une bonne dizaine de tonneaux. Puis tous c'est stabilisé. Nous sommes enfin sortis de la voiture, et c'est là que nous l'avons vu. Elle était pleine d'éclats de verre fichus dans sa peau de porcelaine. Un mince filet de sang s'écoulait de ses lèvres et son crâne était littéralement fendu en différents morceaux. J'eus tôt fait de pousser un cri que mon père, aidé d'un conducteur qui nous avait vu, vit le corps de ma mère et se mit à pleurer. Mon père a passé une semaine à l'hôpital, plongé dans un coma artificiel, tandis que moi, j'écopais de seulement une cicatrice en forme de rose dans le cou, formé par l'impact des éclats de verres dans mon épiderme. Depuis, nous ne sommes plus jamais allés aussi loin qu'une heure de route.
Je m'allongeais sur mon lit, ces pensées pesantes me clouaient le moral comme une enclume en pleine mer. J'entendis à peine le claquement de porte qui signifiait le retour de mon père mais aussi le raclement caractéristique de la cafetière qui, chaudement, fait couler le café dans le mug. Je regardais la pluie tomber et, en souriant, je me souvenais que si il pleuvait, on ne distinguerait pas les larmes des gouttes d'eau sur mes joues.
L'orage éclate et mon nom me semblai aussi furieux que mon envie de tout casser dans ma chambre. Si ma mère avait été la, je lui en aurai parlé... comme n'importe qu'elle fille avec sa mère en somme. Mais je ne suis pas une fille normale.... du moins psychologiquement. Car, vous voyez vous vivre sans une mère alors que vous entrez en pleine période d'adolescence? Moi, pas. Mais je n'ai pas eu le choix et la vie à voulu que ... s'en soit ainsi.
Je me repris et me concentrai sur le livre que je devais lire en français : La rose de sable. La couverture était magnifique et le résumé, bien construit. Dès que je l'ai vu, j'ai eu envie de le lire. Je me plongeais dans le premier chapitre et priais pour qu'en anglais, le projet de commencer le programme de seconde soit vraiment réel.
Un petit bruit mat venant de ma chambre me fit émerger de ma lecture, à mon plus grand malheur. Je poussais un grognement de dépit puis répondis au toquement :
- Ouiii ?
J'appuyais bien sur le " i " pour énerver mon père. Un sourire fugace et vif émergea de ses lèvres et ce fut pour moi comme une récompense.
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La rose bleue
Fantasy- La rose bleue est ta mère, chérie. Mon père prononce ces mots comme s'ils peuvent éveiller en moi un souvenir enfoui, une partie de mon histoire. Mais il n'en est rien. Je sens plutôt couler en moi une angoisse diluvienne, et aussitôt, j'ai l'impr...