Familiar

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Le soleil était déjà haut lorsqu'Harry émergea des brumes d'un rêve pour le moins étrange. Un Noël à Poudlard, chez les Serpentard... sérieusement ? Il déraillait sans doute un peu... et d'ailleurs où était-il ? Il fallut quelques instants à l'adolescent pour reconstituer les lieux et se souvenir qu'il était dans une chambre d'amis du manoir Prince... la maison de Severus Rogue. Une brève rougeur lui monta aux joues. Son rêve était sans doute né des révélations de la veille. Après tout, n'avait-il pas appris que tout le monde le considérait comme un pion ? Severus aussi. Le Directeur des Serpentard l'avait basiquement reconnu, armé de son petit sourire en coin qui en disait si long... Se passant une main sur le visage et cherchant ses lunettes, Harry s'apprêta pour débuter une nouvelle journée de folie. Lorsqu'il dévala les escaliers, il eut la surprise de trouver Severus Rogue assis, lisant le journal une tasse à la main. L'homme leva les yeux vers lui, un léger sourire sur les lèvres.

« Bonjour Professeur !

- Bonjour Harry. Tu peux m'appeler Severus et me tutoyer, tu sais... Nous avions bien commencé hier, il n'y a pas de raison de faire marche arrière. »

Le jeune homme opina silencieusement, les joues soudainement très rouges. Il s'installa à la table où trônait un petit déjeuner pour le moins royal. Ses envolées furent toutefois coupées lorsqu'il vit le gros titre sur le journal derrière lequel se cachait la tignasse sombre de Severus. « Une famille moldue assassinée par des partisans de Vous-savez-qui. »

« Est-ce que...

- Ton oncle et ta tante, oui. »

Un mélange complexe de sentiments assaillit le jeune homme tandis qu'il immobilisait sa tartine à mi-chemin entre son assiette et sa bouche.

« Et mon cousin ?

- Il était chez des amis, apparemment. Il est en vie. »

Harry opina, incapable de savoir s'il devait se réjouir ou s'il devait au contraire pleurer sa famille. Incapable de décider, il demeurait paralysé, troublé de l'ambivalence de ses émotions. Severus, quant à lui, regardait longuement le jeune homme, tentant de démêler les pensées qui semblaient s'entremêler sous le crâne de l'adolescent. Il ne savait s'il devait présenter ses condoléances ou avouer à l'adolescent qu'il était la raison pour laquelle les barrière protectrices s'étaient effondrées, causant indirectement le trépas de ses proches. Il demeura silencieux mais approcha la main du bras d'Harry avant de l'y déposer. Leurs yeux s'accrochèrent dans un long regard trouble. Le jeune homme fut le premier à détourner les prunelles.

« Je suppose que je n'ai plus d'endroit où aller, du coup.

- Tu resteras ici, tout simplement. Je ne suis pas venu te chercher chez ton oncle et ta tante pour te mettre à la rue la seconde d'après. »

La cacophonie d'émotions dans la poitrine de l'adolescent se fit plus bruyante et plus trouble encore. Quelque chose, au fond de lui, n'avait pour seule envie que de se lover dans les bras de l'homme encore. Il ne pouvait s'empêcher de redouter le moment où ces vacances prendraient fin et où il lui faudrait retourner à Poudlard. Severus serait-il encore aussi... gentil ? Comme s'il lisait les pensées du jeune homme, le professeur lui adressa un petit sourire.

« Tout va bien se passer, Harry. Maintenant comme à Poudlard. Je te le promets... Je te propose, pour commencer, quelques sorts de diagnostics après la fin de ton petit déjeuner. Je vais vérifier tout ce qui t'a été donné comme potions et tous les sortilèges sous l'influence desquels tu as été. »

Le changement de sujet eut un effet immédiat sur l'atmosphère du lieu : Harry sembla se détendre en concentrant son esprit sur autre chose, et il prit une bouchée de toast en opinant sous l'oeil satisfait du professeur de potions. Quelques instants et une tasse de thé plus tard, ils étaient tous deux assis dans le petit salon, contemplant les jardins sous l'orbe brûlante d'un soleil d'été. Severus avait pris dans sa paume le bras d'Harry, clos les yeux, et incantait des sortilèges. Un parchemin et une plume à papote virevoltaient au dessus du duo. Harry sentait la magie de l'homme l'entourer, se couler en lui. Une caresse électrisante qui lui faisait vibrer les os et lui chatouillait les muscles. Tous les muscles. La mine de l'homme était imperturbable. Le masque de bronze de son visage semblait à peine vaciller tandis que les formules en latin s'échappaient de ses lèvres. Le jeune homme se sentait étrangement sollicité. Il avait l'impression que tout son corps palpitait d'une sensation étrange, le laissant à la fois tendu et vidé de toute énergie. Autour de lui, tout semblait se brouiller et se distordre : les lumières étaient trop vives, le décor dansait autour de lui. Le jeune homme finit par fermer les paupières, légèrement nauséeux. Cette soudaine cécité lui apporta un peu d'apaisement. Lorsqu'enfin Severus rouvrit les yeux, il vit le jeune homme aussi fatigué que lui-même.

« Les sortilèges étaient censés n'être pas invasifs, mais il semblerait que tu aies été victime d'enchantements empêchant les diagnostics. J'ai dû les lever, ce qui explique notre fatigue à tous deux. »

Sa main lâcha le bras d'Harry et crocheta le parchemin. La plume à papote s'offusqua et entreprit une vengeance acérée sur le dos de la main de Serverus jusqu'à ce qu'il laisse l'objet magique – visiblement aussi caractériel que son propriétaire – achever sa ligne d'écriture. L'ustensile, ayant achevé sa besogne, s'en alla se reposer avec une grâce courroucée sur la table en laissant un Severus à la main griffée et maculée d'encre ainsi qu'un Harry aux yeux rieurs. Le jeune homme, cependant, ne se permit aucun commentaire, et l'hilarité déserta son regard lorsqu'il prit connaissance de la mine sombre de l'homme.

« A quel point est-ce mauvais ?

- Disons que tes vacances ne seront pas de tout repos... Il va falloir pas mal de travail pour lever les enchantements et purger ton organisme des potions.

- Par quoi commence-t-on alors ? »

Severus réfléchit puis afficha un petit sourire ironique du plus mauvais augure pour le jeune homme. L'adolescent déglutit au moment où le professeur reprit le dessus :

« Eh bien... toi, tu vas commencer par tes devoirs de vacances pendant que je prépare quelques potions. »

Harry soupira sans pouvoir refréner l'amusement qui brillait dans ses yeux. Il ne savait pas pourquoi, mais il l'aurait pariée, celle là.

Feel like GoldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant