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J'ouvre en grand ma fenêtre. Mon temps est compté. L'air n'est ni chaud ni froid. Aucune sensation de chaleur ou autre. L'air rentre juste dans mes poumons et je sens mon ventre se contracter tant les sensations sont euphorisantes. Mes tremblements fous ont cessé.

Pilules magiques, transforment mon monde. Réussi à me rattraper, t'es mon héroïne.

La nuit est belle. Ca brille. Ca scintille. Comme ses yeux. Même de là où je suis, je peux voir qu'il a volé les étoiles du ciel pour les mettre dans ses pupilles sombres comme mon coeur.

-Aris, je murmure, euphorique.

Il est là, beau comme un ange, innocent dans notre jardin. Je n'attends pas longtemps avant de descendre le rejoindre. La Terre tourne pas vrai? Ca se sent. Elle est en pleine rotation et elle s'amuse avec ma gravité. Plusieurs fois, mes genoux rencontrent le sol qui tangue comme l'océan.

L'océan. Aris l'adore. Il adore voir que quelque chose est plus grand et infini que sa vie. Il aime se dire que se noyer dans un océan, c'est mourir dans ses larmes. Oui. Il est poétique mon Aris. C'est un sacré poète. Il arracherait des pleurs à Rimbaud et ferait tomber amoureux de lui les plus grands illusionnistes des mots.

Mais il n'y à que moi qu'il aime Aris. Il me l'a dit. En passant devant la paillasse, j'hésite à lui lever mon majeur mais je me contente de chuchoter des insultes sournoises.

-Paillasse maléfique. Ton marbre ne me tuera pas.

Je souris. J'ouvre les baies vitrées. Aris. Je ne le vois nulle part dehors. Ma mâchoire tremble. Mon euphorie retombe.

-Aris...pas déjà...s'il te plaît, je murmure.

Je sors. Vague conscience de l'herbe froide qui caresse mes pieds. Les particules de glace qui la recouvre crissent sous mes pas. J'avance dans le jardin.

-Aris? je murmure de nouveau.

Le sol est houleux. Je trébuche.

Reste à genoux, la vie pèse trop lourd.

Je sens des choses brûler mon corps à différents endroits. Comme si quelque chose se posait dessus. Je lève les yeux au ciel. Il pleurs lui aussi? Ses larmes sont blanches et glacées en tout cas. Elles me font trembler.

-A-a-aris, dé-dépêche si-si-s'il te plait...je dis en claquant des dents.

J'entends une voix.

-Robin...derrière-toi.

Sa voix. Lisse. Je me lève et me retourne. Aris est là. Mince, les cheveux trempés, vêtu de son traditionnel sweat rouge et de son jean. Moi, avec mon simple bas de survêtement, j'ai froid. Je marche vers lui. Il recule. Je ne m'arrête pas. Il recule toujours. Je tombe. Dégoût lassé. C'est ce que je ressens. Je me dégoute et je suis lassé. Un animal blessé et vulnérable, qui n'attire que la pitié, avec le coeur en sang. C'est ce que je suis.

Pilules magiques, tes effets disparaissent.

Mon temps est compté. Je pleure plus fort. J'ai envie de crier. J'étouffe un râle sourd en me mordant la langue jusqu'au sang. Accès de lucidité qui me frappe si fort que je m'effondre dans les larmes blanches du ciel qui piquent ma peau nue. Je me lève. Je sais où est allé Aris.

La couleur de l'océan [terminée☆]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant